Ce que contenait le plan Borloo pour les banlieues écarté par Macron en 2018 et qui revient dans l’actualité

Jean-Louis Borloo et Emmanuel Macron, le 13 novembre 2017 à Clichy-Sous-Bois.
Jean-Louis Borloo et Emmanuel Macron, le 13 novembre 2017 à Clichy-Sous-Bois.

POLITIQUE - Jean-Louis Borloo doit avoir les oreilles qui sifflent. Après les émeutes consécutives à la mort de Nahel et les questions sur les difficultés des banlieues qui en découlent, le plan de l’ancien ministre, soumis en 2018 à Emmanuel Macron et mis sous le tapis, revient sur le devant de la scène.

Ce mercredi 5 juillet, le ministre Christophe Béchu en charge de la Cohésion des Territoires n’a pas échappé à une question sur ce sujet. À la lumière des derniers évènements, n’aurait-il pas fallu accorder davantage de considération à ce rapport que le président de la République avait finalement écarté au motif qu’un plan négocié entre « deux mâles blancs ne vivant pas dans ces quartiers » n’aurait « aucun sens » ?

Au sein du gouvernement, les avis divergent. Un conseilleur ministériel influent regrette désormais « une erreur », tandis qu’un ministre de l’aile gauche assume car « le sens de la société, c’est la disparition de ces quartiers prioritaires de la ville. » « Quand le président de la République a refusé le plan Borloo, c’était dans ce sens-là, même si nous n’avons pas encore trouvé la façon de changer les choses en profondeur », estime-t-il.

Christophe Béchu, lui, n’est pas tout à fait du même avis : « La vérité, c’est que les gouvernements successifs ont mis en œuvre beaucoup des mesures de ce plan », mais « au lieu de le faire en bloc, on l’a fait au fur et à mesure », assure-t-il sur LCI, en prenant l’exemple des « cités éducatives » lancées septembre 2019 et tirées du rapport Borloo.

Le rapport intitulé « plan de Réconciliation Nationale » - contenait 19 volets destinés à « faire revenir la République » dans les quartiers face au « repli identitaire et communautaire ». Petit tour d’horizons des principales mesures d’un rapport que vous pouvez retrouver en intégralité en fin d’article.

L’éducation, priorité du plan Borloo

Pas moins de six volets sont consacrés à l’éducation, avec en substance, la volonté d’assurer une meilleure prise en charge, plus complète, à l’école mais aussi en dehors. Parmi les différentes propositions : les « cités éducatives » évoquées par Christophe Béchu et le lancement d’une « académie des leaders », « aussi sélective » que de l’ENA, pour intégrer l’administration publique.

Jean-Louis Borloo plaidait aussi pour une éducation par le sport, « le meilleur levier pour accompagner l’insertion sociale et professionnelle et l’accès à l’emploi », avec le recrutement de 5 000 « coachs d’insertions » ; une meilleure formation au numérique, avec la création de « 200 campus numériques à l’avant-garde » avec des cours d’informatique, des formations avec emploi garanti, des Moocs, des cours de codage et des formations en ligne pour passer le permis de conduire.

Enfin, un volet « À la rencontre de l’autre » proposait l’organisation « dans des conditions financières abordables » pour chaque enfant et adolescent de quatre voyages le temps de la scolarisation dans des territoires différents du lieu d’habitation et, pour les élèves de lycée, dans un État membre de l’Union européenne.

En parallèle pour les plus jeunes, Jean-Louis Borloo demandait la création de 30 000 places de crèches et 300 maisons d’assistance maternelle supplémentaires dans les quartiers prioritaires, la relance des classes passerelles et l’élargissement et une meilleure dotation du « programme de réussite éducative ».

Pour la mobilité

Un volet du plan est consacré à la mobilité, avec un focus particulier sur l’Île-de-France où « des états généraux des transports » sont réclamés. Dans le détail, les préconisations portent sur le renforcement des dessertes des quartiers prioritaires, l’amélioration du réseau, « agir sur le tarif », le renouvellement du matériel roulant, l’injection « immédiate » d’un milliard d’euros uniquement pour les RER…

Les mobilités individuelles font aussi l’objet d’un paragraphe, avec l’établissement d’un plan de transport individuel dans chaque agglomération et des aides au permis de conduire, la location de vélos, le covoiturage, les garages solidaires, les taxis municipaux…

Pour l’emploi

La « mère des batailles » selon Jean-Louis Borloo. Pour la gagner, il préconisait un fort développement de l’apprentissage et de l’alternance, avec le recrutement de 50 000 apprentis en 3 ans dans les quartiers prioritaires, l’inscription de la responsabilité sociale des entreprises dans la loi PACTE ou encore la simplification des aides accordées.

En parallèle, le plan Borloo recommandait l’installation d’un système de « coaching » pour accompagner les jeunes en fin de parcours scolaires vers l’emploi, le déploiement « à titre exceptionnel et provisoire » 720 conseillers supplémentaires de Pôle emploi dédiés à un accompagnement intensif dans les agences situées dans les quartiers prioritaires ou encore le recrutement chaque année de 5 000 personnes pour la défense nationale

Pour la sécurité et la justice

Renforcement et amélioration des conditions de travail de la police de proximité ; création d’un « médiateur de la police nationale » et déploiement de 500 « correspondants de nuit » pour contribuer à une politique de « tranquillité publique » ; appel à des volontaires issus des quartiers ; déploiement de la vidéo surveillance afin de « retirer, pour l’essentiel, la suspicion sur les comportements et l’intimidation »… Voilà pour l’aspect sécuritaire. Sur le plan de la justice, le rapport préconise de remédier à l’engorgement de l’appareil judiciaire, avec la création de 2000 postes de magistrats, de 100 postes de conseillers d’insertion et de probation et le déploiement de procureurs spécialisés en matière de lutte contre les discriminations et marchands de sommeils.

Contre les discriminations

Pour lutter contre les discriminations, le rapport recommande aussi de nommer des procureurs supplémentaires spécialisés. Sont aussi préconisés : la création d’un observatoire national des discriminations, le renforcement du réseau du Défenseur des droits, des « testings » sur le terrain pour épingler et dénoncer publiquement, selon la technique du « name and shame » les entreprises discriminantes…

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