Le constat de Sandrine Rousseau sur le barbecue et le virilisme partagé par 62 % des hommes

Sandrine Rousseau, députée EELV de Paris, photographiée à l’Assemblée nationale le 2 août.
ALAIN JOCARD / AFP Sandrine Rousseau, députée EELV de Paris, photographiée à l’Assemblée nationale le 2 août.

Menée sur un échantillon de 2033 hommes représentatifs de la population masculine, cette étude de l’Ifop offre une lecture intéressante au-delà de la polémique.

POLITIQUE - Impossible d’être passé à côté. À la fin du mois d’août, Sandrine Rousseau a provoqué un tollé en associant le barbecue au virilisme, en marge des universités d’été d’Europe écologie les Verts.

Plus précisément, la députée de Paris a déclaré vouloir « changer de mentalité pour que manger une entrecôte cuite sur un barbecue ne soit plus un symbole de virilité ». Une sortie qui a provoqué une levée de boucliers, de l’extrême droite à l’extrême gauche, puisque le communiste Fabien Roussel a joint sa voix au concert des critiques.

Des réactions éruptives — et pour la plupart hostiles — qui ont eu un immense écho sur les réseaux sociaux. Selon les données fournies au HuffPost par Visibrain (plateforme de veille numérique), sa sortie a généré plus 327 279 tweets, dont 100 400 publiés le 30 août, au plus fort de la polémique.

Ce jeudi 21 septembre, l’Ifop publie une enquête fouillée sur le sujet soulevé par l’écoféministe. Menée avec « Darwin nutrition » sur un échantillon de 2033 hommes représentatifs de la population masculine française du 5 au 7 septembre 2022, celle-ci tend à confirmer le constat fait par Sandrine Rousseau. Mais avec plusieurs nuances. Explications.

Le barbecue ? Un truc de bonhomme, mais…

Premier constat : 78 % des hommes en couple s’occupent plus souvent du barbecue que leur moitié. À ce sujet, l’Ifop observe une forme de clivage géographique : 48 % des hommes ruraux en couple sont « exclusivement en charge de la gestion du barbecue », contre 42 % des résidants de communautés urbaines de province, et 26 % de l’agglomération parisienne.

Autre chiffre intéressant, 46 % des hommes partagent l’idée selon laquelle ils s’occupent mieux du barbecue que les femmes. Un constat partagé par 66 % des « gros consommateurs de bœuf » (c’est-à-dire ceux qui revendiquent une consommation quotidienne).

Et parmi les hommes qui jugent que la braise, la bidoche et la fumée, c’est quand même mieux quand c’est bibi qui s’en charge, 89 % adhèrent à des clichés « hypersexistes ». Mais nous parlons là d’une infime minorité de sondés.

Car les hommes interrogés sont parfaitement conscients de cette représentation des choses, et veulent majoritairement la combattre. Ainsi, 62 % approuvent l’idée « de déviriliser la consommation de viande cuite au barbecue ». Ce qui correspond exactement à la phrase prononcée par Sandrine Rousseau.

Une adhésion au point de vue de la députée écolo que l’on observe d’ailleurs dans l’ensemble du spectre politique, de l’extrême droite à l’extrême gauche, aussi paradoxal que cela puisse paraître. Ainsi, 59 % des hommes interrogés se disant « très à droite » partagent ce souhait, comme 53 % de ceux se disant seulement « à droite ». Chez ceux « très à gauche », l’adhésion à l’idée de Sandrine Rousseau grimpe à 75 %.

Viandards et extrême droite

Pour autant, « l’étude montre une politisation autour des enjeux liés à la nourriture », explique au HuffPost François Kraus, directeur d’étude à l’Ifop. « On observe la reproduction d’un clivage qui existe aux États-Unis, entre les rednecks qui revendiquent la viande et le pick-up contre les bobos de San Francisco qui roulent à vélo », poursuit le sondeur, qui pointe une « dynamique identitaire » dans ces résultats.

De fait, les 18 % de Français qui se revendiquent comme « très viandards » sont majoritairement « très à droite », le parti politique le plus représenté dans cette catégorie étant Reconquête !, suivi du Rassemblement national et des Républicains.

La viande rouge est, pour les plus droitards, incontestablement un marqueur de virilité

Même podium chez ceux qui disent manger de la viande « sans jamais se soucier de la fréquence ». À l’inverse, ce sont les écolos qui sont les plus nombreux parmi ceux qui affirment « en manger le moins possible », ce qui traduit donc une cohérence avec leur appréciation des enjeux environnementaux.

« Ce qui est intéressant, c’est qu’on observe un marqueur politique en fonction du type de viande consommé », remarque aussi François Kraus. Ainsi, les électeurs d’Éric Zemmour sont les plus représentés (et de loin) parmi les 42 % des sondés qui apprécient « beaucoup » la côte de bœuf grillée (63 %).

« La viande rouge est, pour les plus droitards, incontestablement un marqueur de virilité, avec une volonté d’envoyer bouler le politiquement correct de l’alimentation », poursuit le spécialiste, qui remarque que dans l’ensemble du spectre politique, les plus nombreux à juger adéquat le terme dénigrant « homme soja » pour qualifier les végétariens sont les électeurs de Reconquête !.

En outre, 43 % des hommes qui s’auto-qualifient comme « très patriotes » se définissent comme « très viandards ». Une confirmation, en réalité, de ce qui s’observe sur les réseaux sociaux, où des figures (masculines) de l’extrême droite en ligne aiment se mettre en scène devant des plats de viandes gargantuesques.

Pas étonnant donc de retrouver les représentants de ces courants parmi les adversaires les plus zélés de Sandrine Rousseau sur les réseaux sociaux. Quitte à paraître plus nombreux que ce qu’ils sont vraiment.

« La grande majorité de la population masculine partage ce qu’elle dit sur le barbecue et la viande. Ce que l’étude souligne aussi, c’est le hiatus entre ce qui se passe sur les réseaux sociaux et l’état de l’opinion sur le sujet », observe François Kraus. Pas de quoi, d’un côté comme de l’autre, jeter de l’huile sur le feu.

VIDÉO - Clémentine Autain (LFI) : "Il y a une différence des sexes dans la façon dont nous consommons de la viande"

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