Comment Bernie Sanders est devenu le candidat favori de la Silicon Valley

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(AFP/Robyn Bec)

Dans la dernière ligne droite des primaires qui l’opposent à Hillary Clinton, Bernie Sanders devra compter sur les victoires décisives des Etats de New-York et de Californie. Pour cette dernière, il a déjà l’avantage d’être soutenu par les grandes firmes de la Silicon Valley.

Graduellement, les scores se rapprochent. Et pourtant, il reste encore les votes de 20 Etats américains avant que Bernie Sanders, 1038 délégués à ce jour, et Hillary Clinton, 1289 délégués, ne soient fixés sur le résultat final des primaires démocrates. Plusieurs dates-clés jalonnent encore leurs chemins respectifs : New-York sera la prochaine, ce mardi 19 avril, tandis que les votes décisifs de la Californie sont attendus le 7 juin. Pour ce dernier Etat, Bernie Sanders part avec un avantage : les magnats de la Silicon Valley californienne l’ont élu favori depuis un bout de temps. Mais comment le sénateur du Vermont fait-il pour être le candidat préféré des plus grandes entreprises technologiques des Etats-Unis ?

Du désordre aux diners pro-Hillary Clinton

Vendredi dernier à San Francisco, des centaines de partisans de Bernie Sanders sont venus perturber une soirée de collecte de fonds pour Hillary Clinton. L’événement, qui se déroulait dans la villa de l’investisseur milliardaire Shervin Pishevar, était animé par George Clooney et sa femme Amal. Le prix des places pour rejoindre cette soirée, par ailleurs co-organisée par Steven Spielberg, le PDG de Dreamworks Jeffey Katzenberg et bien d’autres ? Entre 33 400 et 353 400 dollars. Sur la guest-list se côtoyaient, entre autres, Jane Fonda, Ellen de Generes ou Melanie Griffith.

Armés de leurs pancartes “Feel the Bern” et de poêles et casseroles, les manifestants se sont donc réunis devant la villa de Pishevar pour exprimer leur désaccord avec les sommes “immorales” de cette collecte. The Guardian y a compté une majorité de jeunes, dont beaucoup issus de l’industrie tech. “Bernie est du côté du peuple. Hillary est juste une vendue” a clamé Bill Sandberg, 29 ans, tout juste licencié de la start-up Zedo. “Combien d’entre nous ont leurs week-ends libres ici ? On travaille jusqu’à pas d’heure pour eux afin qu’ils s’enrichissent toujours plus” tonne un autre employé de ce secteur.

Depuis, George Clooney a fait son mea culpa sur les montants indécents récoltés ce soir-là (15 millions de dollars). Mais les résultats parlent d’eux-mêmes : depuis février, Bernie Sanders a récolté 3,2 millions de dollars de dons dans le domaine de la technologie, quand Clinton en a amassé 1,5 million, selon le site de données CrowdPac.

Il séduit les petits donateurs et les grands oubliés du secteur tech

Durant le dernier trimestre 2015, des employés issus des cinq plus grandes firmes technologiques de la Silicon Valley (Apple, Google, Microsoft, IBM et Amazon) ont versé 105 000 dollars de dons à Bernie Sanders, contre 95 000 dollars dans les mêmes entreprises pour Hillary Clinton, d’après un rapport du Wall Street Journal. Dans la Silicon Valley, comme dans d’autres états, la plupart de ces donations sont modestes et bien souvent inférieurs au plafond de 2700 dollars autorisé par la loi. Elles s’élevaient ainsi à 30 dollars en moyenne, en octobre 2015.

Autre point important : ces dons modestes mais nombreux sont aussi la conséquence d’un milieu rongé par les inégalités. Ecrasés par les loyers de San Francisco, ville américaine où ils sont les plus chers, les employés de la tech réunissent aussi bien les jeunes précaires qui tentent de remplir leur frigo et bénéficient de mauvaises conditions de travail que les “petites mains”, comme le souligne une récente enquête sur les “jobs invisibles de la tech” : “agents de sécurité, employés des cafétérias, chauffeurs, infirmières, concierges”.

S’il veut gagner, Bernie Sanders doit garder cet électorat précieux, car il a depuis longtemps écarté celui, très utile, des “super PAC”, ces “comités d’action politique” indépendants des candidats, qui apportent un énorme soutien financier à ces derniers grâce à des fonds quasi-illimités et des campagnes de dénigrement. Or, le candidat démocrate de 74 ans a refusé de bénéficier de ces “super PAC” quand Hillary, de son côté, a accueilli à bras ouverts leurs “dizaines de millions de dollars”.

De plus, beaucoup d’adeptes du transhumanisme, véritable marotte de la Silicon Valley, voient en Sanders le candidat présidentiel idéal selon le HuffPost américain. Ayant connaissance des capacités de l’Intelligence Artificielle à remplacer les jobs humains et démanteler lentement le capitalisme tel que nous le connaissons, ces férus de technologie du futur sont prêts à repenser l’économie différemment. De fait, ils accueillent volontiers les idées du sénateur du Vermont, particulièrement portées sur l’emploi des jeunes, et la lutte contre le chômage de cette branche d’âge. Rendez-vous le 7 juin pour que les votes californiens parlent d’eux-mêmes.