Les citadins ont-ils fui la ville après le Covid ? Ces cartes et courbes ont de quoi surprendre

Young woman holding a picture frame. Outside the frame is a city, but inside the frame is a view of the countryside.
Tim Robberts / Getty Images Young woman holding a picture frame. Outside the frame is a city, but inside the frame is a view of the countryside.

COVID-19 - Apporter de la nuance. Souvent évoqué en France depuis l’apparition de la pandémie de Covid-19, le fameux exode urbain des citadins vers la campagne n’a pas eu lieu dans les proportions fantasmées par certains. C’est ce qu’ont observé des chercheurs de la plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines dans une étude rendue publique et relayée par Le Monde, vendredi 17 février.

« Exode urbain, un mythe, des réalités » présente ainsi le travail réalisé au cours de cette enquête pluridisciplinaire depuis l’été 2021 pour mettre en lumière la diversité de profils de ceux partis s’installer à la campagne depuis le début d’année 2020, moment où le Covid-19 a fait son apparition dans l’Hexagone.

Et leur travail invite à « fortement nuancer l’idée d’un exode urbain » provoqué par la pandémie puisque 36,5 % des déménagements continuent de se faire de grande ville à grande ville après le début de la crise sanitaire (avec toutefois une légère baisse par rapport à la dernière année précovid). À l’inverse, les déménagements de commune rurale à commune rurale représentent 7 % des déménagements, mais connaissent un léger essor. Si exode urbain, il y a eu, ce n’est donc pas en faveur de des espaces ruraux mais d’espaces urbains plus petits.

Après le début de la pandémie, les Français se sont plutôt déplacés d’une grande ville à une autre, plutôt que vers les campagnes.
Étude « Exode urbain, mythe ou réalité » Après le début de la pandémie, les Français se sont plutôt déplacés d’une grande ville à une autre, plutôt que vers les campagnes.

Un désir de ruralité

Ainsi, l’étude affirme que le Covid-19 a « globalement accéléré les départs en provenance des grands centres urbains, en particulier des plus grandes métropoles, vers d’autres territoires, au premier rang desquels des villes (un peu) plus petites et des couronnes périurbaines ». Provoquant ainsi un phénomène de « (ré)équilibrage de l’armature urbaine », qui s’observait déjà en France, avant la crise.

De quoi balayer l’idée préconçue d’un départ massif d’urbains pour le calme de la campagne, même si plusieurs facteurs ont effectivement poussé au déménagement en s’inscrivent dans cette démarche, comme « le désir de campagne », l’anxiété face à la question écologique et climatique ou la possibilité de télétravail rendue plus flexible par la pandémie. « Les espaces ruraux voient augmenter fortement leur solde migratoire après le début de la crise sanitaire » mais ce phénomène reste minoritaire et concerne surtout « les territoires proches des centres urbains ».

Autre idée balayée par ce rapport, le « profil type » des ménages susceptibles de déménager après l’apparition de la crise sanitaire. Si la présence des ménages « de classe supérieure » est bien réelle, elle doit elle aussi être nuancée puisque des flux de personnes avec de plus faibles revenus et avec un capital socioculturel et économique moins important sont également observés. Au même titre que les flux de profils préretraités.

Mais l’étude admet que la crise sanitaire n’est pas étrangère au phénomène de changement de vie ressenti par de nombreux Français au cours de ces deux dernières années, mais pas obligatoirement vers les communes rurales. Le rural continue d’ailleurs de représenter une faible part des déménagements depuis des villes ou d’autres communes rurales. Avant la crise du coronavirus, la part de déménagements vers les communes rurales représentait 17,2 %, contre 18,1 % seulement post-Covid-19.Surtout, Depuis la pandémie de Covid-19, l’attrait des Français pour les façades littoral s’est renforcé, une tendance déjà observée avant la crise sanitaire.

Depuis la pandémie de Covid-19, l’attrait des Français pour les façades littoral s’est renforcé, une tendance déjà observée avant la crise sanitaire.
Étude « Exode urbain, mythe ou réalité » Depuis la pandémie de Covid-19, l’attrait des Français pour les façades littoral s’est renforcé, une tendance déjà observée avant la crise sanitaire.

Pas de « désamour des villes »

Au contraire, la grande majorité des déménagements se sont effectués entre des villes de tailles similaires. À tel point que plus d’un quart se font au sein d’une même commune.

Et ne sont pas uniquement les Parisiens fortunés à qui l’on doit cette tendance, au contraire puisqu’on retrouve également des « néo-ruraux », mais aussi des retraités ou des professions intermédiaires… « Pour eux, la crise et ses conséquences ont été un moteur parmi d’autres de déménagement : plus souvent un catalyseur d’un départ anticipé et souhaité qu’une motivation ad hoc ».

Loin d’un renversement territorial, l’étude atteste de l’attractivité intacte des grands pôles urbains que sont Paris, Marseille, Lyon, ainsi que les autres métropoles régionales comme Lille, Strasbourg, Grenoble, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Rennes, Brest, Nice. Soit les villes qui concentrent, outre la population, de nombreux emplois et services.

Les déménagements en France métropolitaine entre mars 2020 et mars 2022
Étude « Exode urbain : un mythe, des réalités » Les déménagements en France métropolitaine entre mars 2020 et mars 2022

À ce titre, 43 % des départs enregistrés dans les 12 premiers mois de la crise s’effectuent vers les villes d’au moins 200 000 habitants, contredisant donc l’idée d’un « désamour des villes ».

« Ainsi, on ne trouve ni les traces d’une réorientation géographique massive des populations, ni celles d’une recomposition des flux vers des espaces isolés, hors des aires d’attraction des villes. Il n’y a donc pas de grande ’rupture’ territoriale dans les intentions de mobilité avant et après la crise », conclu l’équipe de chercheurs.

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