Cisjordanie : le chaos à Huwara inquiète jusqu’à Paris et Berlin

Cette photo prise le 27 février 2023 montre une vue aérienne d’une casse où des voitures ont été incendiées pendant la nuit, dans la ville palestinienne de Huwara près de Naplouse en Cisjordanie occupée.
Cette photo prise le 27 février 2023 montre une vue aérienne d’une casse où des voitures ont été incendiées pendant la nuit, dans la ville palestinienne de Huwara près de Naplouse en Cisjordanie occupée.

INTERNATIONAL - Des « violences inacceptables » qui laissent déjà craindre une nouvelle escalade. Les habitants de la ville palestinienne de Huwara, en Cisjordanie occupée, ont découvert ce lundi 27 février les dégâts d’une attaque menée par des colons israéliens après la mort de deux d’entre eux par des tirs palestiniens, dimanche après-midi.

Fait rare, les autorités israéliennes ont même appelé les colons au calme après ce nouvel épisode de violences qui intervient alors que le conflit connaît déjà une nette escalade et que des responsables de chaque côté se sont engagés, lors d’une réunion dimanche en Jordanie, à « prévenir toute nouvelle violence ».

Pourtant c’est ce même dimanche soir que des centaines de colons israéliens sont entrés à Huwara, petite ville du nord de la Cisjordanie occupée où les tensions sont fréquentes. Ils ont jeté des pierres vers des habitations palestiniennes, incendié des bâtiments, des poubelles et des voitures, a constaté un journaliste de l’AFP sur place.

« Ils ont incendié plus de 20 bâtiments, dont des magasins, des maisons. Même les arbres n’ont pas été épargnés », relate Kamal Odeh, un habitant. D’après Wajeh Odeh, membre de la municipalité de Huwara, plus de 100 voitures ont été incendiées et 30 maisons brûlées ou endommagées.

« Nous considérons ces actes comme des actes de terrorisme », a dit un responsable de l’armée israélienne à des journalistes, estimant que de 300 à 400 colons étaient entrés dans la ville palestinienne par esprit de « vengeance ». Au total, dix personnes ont été arrêtées, a indiqué l’armée, qui a dit avoir évacué des dizaines de Palestiniens dont les maisons étaient menacées par des incendies.

Malgré la tension palpable, plusieurs centaines de personnes ont assisté aux funérailles des deux colons à Jérusalem ce lundi. Leurs cercueils étaient recouverts de drapeaux israéliens et portés par des proches et des soldats, selon un journaliste de l’AFP sur place.

Les funérailles des deux colons israéliens à Jérusalem ce 27 février, un jour après avoir été abattus alors qu’ils traversaient la ville de Huwara, en Cisjordanie.
Les funérailles des deux colons israéliens à Jérusalem ce 27 février, un jour après avoir été abattus alors qu’ils traversaient la ville de Huwara, en Cisjordanie.

Une escalade de violence qui inquiète Paris et Berlin

Ce lundi, la France a jugé « inacceptables » les violences contre des civils palestiniens en Cisjordanie occupée, tout comme celles perpétrées contre les deux Israéliens tués plus tôt dimanche.

« La France condamne fermement l’attaque qui a coûté la vie à deux Israéliens le 26 février. Les violences contre les civils palestiniens sont inacceptables », a indiqué le ministère français des Affaires étrangères dans un communiqué.

Paris « suit avec la plus grande préoccupation les violences en cours en Cisjordanie, en particulier à Huwara, qui menacent de dégénérer hors de contrôle », insiste le Quai d’Orsay qui en appelle à toutes les parties « pour qu’elles évitent d’attiser ces violences et contribuent à la désescalade ». Paris a également pointé du doigt le gouvernement israélien, responsable, selon la France, de « protéger les civils palestiniens et poursuivre les auteurs des violences ».

Des inquiétudes et des avertissements partagés par l’Allemagne. « Il est urgent que les accords pour éviter une escalade soient respectés et que tout le monde s’engage maintenant à ne pas attiser une situation déjà très tendue », a déclaré Christofer Burger, porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères, lors d’un point presse régulier, condamnant lui aussi les violences d’un côté, comme de l’autre.

« Il ne peut y avoir de justification au terrorisme, aux incendies criminels et aux actes de vengeance envers des civils », a de son côté estimé le médiateur de l’ONU pour le Proche-Orient, Tor Wennesland, se disant « profondément préoccupé », dans un communiqué.

Israël accusé de protéger des « actes terroristes »

« Nous ne pouvons tolérer une situation dans laquelle des citoyens se font justice eux-mêmes », a déclaré le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, après des propos similaires du ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, de maires de colonies et du premier ministre Benjamin Netanyahu.

À la tête depuis fin décembre d’un des gouvernements les plus à droite de l’histoire d’Israël, qui compte plusieurs ministres eux-mêmes colons, Benjamin Netanyahu a demandé qu’on laisse « les forces de sécurité accomplir leur mission ».

Des organisations israéliennes de défense des droits humains ont toutefois dénoncé un « pogrom », « soutenu » par le gouvernement israélien, d’après « La paix maintenant ». Quant au président palestinien, Mahmoud Abbas, il a accusé Israël de « protéger les actes terroristes perpétrés par des colons ».

L’armée israélienne a multiplié depuis près d’un an les opérations présentées comme « antiterroristes » dans le nord de la Cisjordanie. Mercredi, ce sont onze Palestiniens qui ont été tués à Naplouse, dans l’incursion militaire israélienne la plus meurtrière en Cisjordanie depuis 2005 au moins.

Depuis le début de l’année, le conflit a coûté la vie à 63 Palestiniens (dont des combattants et des civils incluant des mineurs) et à 12 Israéliens (dont des mineurs et des forces de sécurité), selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de sources officielles israéliennes et palestiniennes.

À voir également sur Le HuffPost :

En Israël, Benjamin Netanyahu limoge Arié Dery, reconnu coupable de fraude fiscale

En Israël, Netanyahu promet d’annexer un bout de la Cisjordanie s’il est réélu