Les choix culture du « Point » : retrouver « Friends » ou se pâmer devant Joan Mitchell ?

Joan Mitchell, La Grande Vallée XIV,1983 Musée national d’art moderne, Centre Pompidou, Paris© The Estate of Joan Mitchell  - Credit:Fondation Joan Mitchell / The Estate of Joan Mitchell, Courtesy Joan Mitchell Foundation
Joan Mitchell, La Grande Vallée XIV,1983 Musée national d’art moderne, Centre Pompidou, Paris© The Estate of Joan Mitchell - Credit:Fondation Joan Mitchell / The Estate of Joan Mitchell, Courtesy Joan Mitchell Foundation

Foncer voir « Saint Omer », grand film

Juste le bruit de l'océan, et la silhouette d'une femme noire, de dos, un enfant dans les bras. Ainsi commence Saint Omer, le premier film de fiction de la documentariste Alice Diop, inspiré de l'affaire Fabienne Kabou : en 2013, cette jeune femme sénégalaise avait abandonné sa fille de 15 mois à la mer. Infanticide. Cet acte fascine Rama (Kayije Kagame), prof de fac et écrivaine, qui veut en faire le sujet de son nouveau livre et suivre le procès de celle qui est renommée ici Laurence Coly. La voici, Guslagie Malanda, dans le rôle de l'accusée, prononçant les mêmes phrases que dans la réalité. Que va-t-il se passer entre les histoires de Rama et de Laurence, ces deux femmes noires ? Le rapport à la maternité, à l'origine africaine, à l'exil, l'immigration, à la folie, autant de thèmes traversent en profondeur ce film ascétique, intense, justesse et puissance à la fois, et de toute beauté, lumière, sons, tout y concourt : décor de boiseries du tribunal dans lequel semble se fondre l'accusée, vêtement jaune de Rama, regards ardents, silences chargés, sans oublier les respirations en écho à la musique, comme si chacune, chacun, retenait son souffle devant l'incompréhensible, l'inadmissible. Et ce qui se joue aussi dans l'interrogatoire : comment parle-t-on si bien français, comment peut-on étudier Wittgenstein quand on vient d'Afrique ? Les propos des témoins éclairent ce que la figure de l'autre, différent, compte de pr [...] Lire la suite