"C'est trop court pour s'organiser" : ces Français bloqués malgré l'"urgence" d'aller voter aux législatives

La tenue de nouvelles législatives les 30 juin et 7 juillet prochains était loin d'être à l'agenda des Français, dont certains auront déjà pris la route des vacances d'été. Quelques jours après l'annonce surprise d'Emmanuel Macron, des Français pris de court racontent à BFMTV.com la galère et leur organisation de dernière minute pour espérer aller voter.

Comme nombreux Français, Jean-Luc se trouve dans une impasse pour les élections législatives des dimanche 30 juin et 7 juillet prochain, lui qui "ne s'attendait pas une seconde" à ce qu'Emmanuel Macron ne dissolve l'Assemblée nationale et ne convoque de nouvelles élections le soir des élections européennes.

Le sexagénaire a beau retourner la situation dans tous les sens, il lui a fallu se rendre à l'évidence: il ne pourra se rendre aux urnes ni pour le premier, ni pour le second tour. "Je pars trois semaines en Italie le 30 juin et tout est réservé", confie à BFMTV.com ce Français expatrié en Belgique qui n'envisage pas de faire de procuration, trouvant la démarche trop lourde. "Tant pis", conclut-il. "C'est dommage mais je suis un peu déconnecté de la politique de toute façon".

Moins de trois semaines avant l'échéance, Jean-Luc est loin d'être un cas isolé: Juliette raconte "l'affolement" qui l'a envahie devant sa télévision dimanche soir lorsqu'elle a réalisé qu'elle ne pourrait peut-être pas aller voter, puisqu'elle sera encore en vacances dans le Périgord pour le premier tour. Prise par la panique, la jeune femme de 29 ans a cherché une solution pour prendre part au scrutin "coûte que coûte".

"C'est inconcevable pour moi de ne pas voter, surtout face à une telle urgence", raconte cette professeure d'Histoire-géographie, qui devra finalement se résoudre à écourter ses congés pour aller voter. Bien que ce soit loin d'être le plus pratique pour elle, l'enseignante fera l'effort de prendre le volant plus tôt que prévu dans l'espoir d'arriver à temps pour pouvoir glisser son bulletin dans l'urne à Dijon.

De la même manière, Bianca Sorrento et son conjoint vont eux-aussi vont sauter dans un train pour Paris plus tôt que prévu dimanche 7 juillet afin de pouvoir participer au second tour. Mais contrairement à Juliette, le sort de leurs bulletins de vote dépendra de la ponctualité de leur train et des transports en commun.

"J'espère qu'on arrivera à temps", lance la jeune femme, professeure de japonais. "Notre train arrive à 18h30 à Paris donc on va devoir courir pour arriver au bureau de vote avant la fermeture. Ça va être une partie de stress, mais ne pas réussir à voter me mettrait en colère".

"Le calendrier n'est vraiment pas idéal. Je sais qu'il (Emmanuel Macron) n'avait pas tellement le choix, mais ça va paralyser énormément de monde", prédit d'avance la jeune femme de 24 ans, qui trouve cela "osé et presque injuste" d'organiser "des élections d'une telle importance le premier week-end des vacances scolaires".

Ces derniers jours, bon nombre d'internautes médisent le choix des dates sur les réseaux sociaux, à l'instar des maires qui s'affolent de délais trop courts pour organiser deux nouveaux scrutins au beau milieu des fêtes de fin d'année scolaire et du début de la période estivale. Certains Français, comme Bianca Sorrento ou Antonin Atger, prédisent même déjà des taux d'abstention en hausse à cause du début des vacances.

"Ça tombe mal, avec l'arrivée des beaux jours on est beaucoup à avoir prévu de partir", analyse Antonin Atger, qui vit entre Paris et Londres. Cet écrivain de profession, qui a déjà prévu de faire une procuration avec son voisin pour pouvoir partir à l'étranger, déplore tout de même l'"inélégance" du choix de ces dates qui "prennent les gens au dépourvu".

"Ce n'est pas normal d'être à ce point dans la précipitation pour une élection de cette importance", peste-t-il. "Ce n'est pas un vote anecdotique, ça ne doit pas se faire du revers de la manche"

Un avis partagé par Bianca Sorrento, qui s'attend à ce qu'un bon nombre de ces concitoyens ne prennent pas la peine de faire le déplacement, bien que "la France soit à un tournant". "On est sur une élection fondamentale qui va changer le visage de notre politique et malheureusement les conditions ne sont pas réunies pour faire barrage" (à l'extrême droite).

Hugo, par exemple, se trouve bien mal à l'aise à l'approche de ce nouveau scrutin auquel il ne s'attendait pas du tout. D'ordinaire, ce Parisien de 30 ans n'a pas l'habitude de manquer à son devoir citoyen, mais cette fois, il ne sait pas trop sur quel pied danser: doit-il annuler ses vacances sur le bassin d'Arcachon ou les écourter afin de rentrer plus tôt à Paris le jour du second tour?

"J'ai regardé un peu pour échanger mes billets de train le 7 juillet, mais c'est hors de prix et il n'y a presque plus de place", confie cet habitant du 10e arrondissement de la capitale, "à la fois inquiet et gêné" par l'imprévu de cette situation.

À ce jour, Hugo n'a pas encore trouvé de solution mais il ne compte pas faire une croix sur ces vacances entre amis pour lesquelles il a déjà engagé beaucoup de frais. "C'est prévu depuis six mois: l'hébergement, la voiture de location, les transports sont déjà payés... Au sein de notre groupe ça créé d'énormes problèmes d'organisation et c'est parfois trop court pour pouvoir trouver une solution de dernière minute".

Par ailleurs, impossible pour lui d'envisager de faire une procuration car sa famille n'habite pas la capitale et ses amis proches seront à ses côtés dans le bassin d'Arcachon. Ne restent éventuellement que ses collègues de travail, mais encore faut-ils que ces derniers acceptent. "C'est une demande un peu gênante, d'autant qu'ils n'habitent pas du tout dans le même coin de Paris que moi ce qui veut dire qu'ils devront se déplacer dans mon bureau de vote", explique le trentenaire.

Sinon, une autre solution est possible avec le site "Plan Procu". Créé par l'association A voté, cette imitation de Tinder propose de trouver un internaute disponible près de chez vous pour voter à votre place. Si la démarche repose sur la confiance, la co-présidente de l'association Clémence Pène a fait savoir à Tech&Co qu'elle avait déjà séduit au moins 2000 personnes en vue des prochaines législatives.

Article original publié sur BFMTV.com