Cannabis : bientôt des tests salivaires dans la rue pour détecter les fumeurs ?

Gabriel Attal réfléchirait à s'attaquer aux consommateurs en étendant aux piétons les tests de détection du cannabis, utilisés lors de contrôles routiers.

L'usage des tests salivaires pour détecter le cannabis pourraient être élargis à la rue Getty Images/iStockphoto
L'usage des tests salivaires pour détecter le cannabis pourraient être élargis à la rue Getty Images/iStockphoto

"La drogue, c'est de la merde, on ne va pas légaliser cette merde", lançait en 2020 le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, interrogé sur LCI sur une éventuelle légalisation du cannabis. Une ligne dont le Premier ministre Gabriel Attal ne semble pas dévier avec cette idée avancée lors d'une réunion autour du chef du gouvernement.

Selon RMC, le gouvernement réfléchirait d’autoriser la police et la gendarmerie à pratiquer des tests salivaires dans la rue, pour détecter les fumeurs de cannabis, autrement dit sur des piétons. Car ces tests existent déjà et les forces de l'ordre y ont recours mais uniquement lors de contrôles routiers, pour détecter l'usage de la drogue au volant, et donc à des fins de sécurité routière.

Une idée déjà évoquée par Gérald Darmanin

L'usage de cannabis peut en effet affecter l'évaluation des distances, des mouvements des autres véhicules, mais diminue aussi la coordination motrice, la vigilance, augmente le temps de réaction et affecte la mémoire à court terme. Autant d'effets qui peuvent avoir des conséquences sur la route, comme le rappelle le site sante-addictions.

L'idée du gouvernement serait donc d'étendre ces tests à tous les piétons, au point que, toujours selon la radio, plusieurs sources évoquent des annonces en préparation pour la semaine prochaine. L'idée avait déjà été évoquée par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, mi-mars lors d'un déplacement à Lyon.

L'idée ne fait pas l'unanimité dans la majorité

Il évoquait alors l'idée "de généraliser la possibilité, sous l'autorité du procureur de la République, de faire des tests salivaires pour tout le monde sur la voie publique par des policiers et des gendarmes", rapportait Libération. Objectif ? "Mettre la peur du côté de celui qui consomme", expliquait-il au quotidien.

Une idée reprise par Gabriel Attal donc, mais qui est loin de faire l'unanimité au sein de la majorité. "Je ne vois pas comment un policier arrête des gens dans la rue comme ça", réagit un député. "Légalement, ça ne tient pas", estime-t-il auprès de RMC. Une autre, rapporte qu'"un certain nombre de députés ont dit que c’était 'touchy'. Il faut voir les tenants et aboutissants, mais si c’est faire comme ça des tests dans la rue, je n’y suis pas très favorable", complète-t-elle.

Des tests peu fiables ?

D'autant qu'il existe actuellement des limites à ces tests censés détecter le cannabis, dont nous vous parlions déjà en 2023 dans cet article. "Depuis deux ans, un dossier de conduite sous stupéfiants sur deux qui arrive dans mon cabinet est en relation avec le CBD. Certains clients sont de bonne foi et me prouvent la consommation avec une analyse ou une facture d’achat, d’autres me le disent sans me le prouver, et ne sont peut être pas de bonne foi", nous expliquait à l'époque Maître Antoine Regley, avocat spécialiste du droit routier.

En cause, le fonctionnement de ces tests de dépistage : à l'instar des tests de dépistage salivaire du Covid, il s'agit de récolter de la salive dans la bouche du conducteur, puis de l'enclencher dans un appareil qui recherche la présence, pour le cas du cannabis, de tétrahydrocannabinol (THC), présent à hauteur de 15%.

Les consommateurs de CBD pourraient être testés positifs

Le THC, classé parmi les stupéfiants dans un grand nombre de pays dont la France, est la molécule responsable des principaux effets psychoactifs du cannabis. Problème, c'est que le CBD est aussi composé de résidus de THC, à hauteur de 0,3% pour que la vente soit légale en France.

Sauf que cela peut suffire à rendre le test positif, comme en témoignaient plusieurs avocats en droit routier. "Rien n’est fait pour dire si le THC détecté dans un test salivaire vient du CBD, qui peut contenir des résidus de THC, ou de l’usage de cannabis", déplorait Maître Antoine Regley, avocat spécialiste du droit routier, en 2023.

Si le problème soulevé dans cet article a été réglé puisque la Cour de cassation a estimé le 21 juin 2023, la conduite sous l’emprise du CBD, si des traces de THC sont trouvées lors d’un dépistage, constituait une infraction, le problème pourrait ressurgir avec l'hypothèse de tests de dépistage étendus aux piétons. Car si la consommation de cannabis est illégale, celle de CBD reste légale, à condition de ne pas prendre le volant.