Le budget pour 2024 définitivement adopté par le Parlement, après des 49.3 en série

Élisabeth Borne (ici photographiée le 20 décembre à l’Assemblée au côté de Franck Riester et d’Éric Dupond-Moretti) a dû engager à dix reprises la responsabilité de son gouvernement pour faire voter les budgets de l’État et de la Sécurité sociale. Sans qu’aucune motion de censure ne soit adoptée.
LUDOVIC MARIN / AFP Élisabeth Borne (ici photographiée le 20 décembre à l’Assemblée au côté de Franck Riester et d’Éric Dupond-Moretti) a dû engager à dix reprises la responsabilité de son gouvernement pour faire voter les budgets de l’État et de la Sécurité sociale. Sans qu’aucune motion de censure ne soit adoptée.

POLITIQUE - C’est désormais le même cérémonial qui se répète semaine après semaine. Le budget de l’État pour 2024 a été définitivement adopté ce jeudi 21 décembre à l’Assemblée nationale grâce au rejet d’une énième motion de censure déposée de la gauche. Un vote non concluant qui marque la fin d’un exercice encore marqué par une série de 49.3 qui lassent opposition comme majorité.

Pour preuve : bien loin des débats inflammables de ces dernières semaines sur l’immigration, c’est dans un hémicycle très clairsemé que les députés se sont retrouvés pour la dernière fois de l’année, le temps d’assister donc au rejet de la motion.

49.3, motion de censure, 49.3, motion de censure…

En réclamant la censure, l’Insoumis Eric Coquerel, président de la commission des Finances, a autant contesté le budget que la loi sur l’immigration, qu’il juge « ignominieuse » et « nauséabonde ». Sans suspense, seuls 116 députés ont apporté leurs voix à cette motion de censure, loin des 289 nécessaires pour faire tomber le gouvernement. Son rejet entraîne l’adoption du projet de loi de finances 2024 (PLF).

Face à ses opposants, la Première ministre Élisabeth Borne a pour sa part défendu la création de plus de 2 000 postes de policiers et gendarmes, une hausse des moyens de la Justice et de la Défense, des revalorisations pour les enseignants et un « budget vert » avec 7 milliards d’euros supplémentaires en faveur de la transition écologique.

Mais toujours empêtré dans ses soucis de majorité relative, le gouvernement a eu recours comme l’an dernier à dix reprises à l’arme constitutionnelle du 49.3 pour faire passer sans vote ce budget de l’État et celui de la Sécurité sociale adopté le 4 décembre. 49.3, motion de censure, 49.3… : le ballet désormais bien réglé a créé une usure dans l’hémicycle, plus que l’année passée quand les députés découvraient la nouvelle configuration de l’Assemblée nationale sans majorité absolue. Face à cette rengaine trop entendue, l’opposition dénonce « mépris du Parlement » et « déni de démocratie », mais sans grand espoir de voir le gouvernement d’Élisabeth Borne vaciller.

Sur le fond des débats, le gouvernement avance sur une ligne de crête, entre ses dépenses et la volonté de réduire le déficit public à 4,4 % du PIB en 2024. Bercy a promis d’aller chercher 12 milliards d’économies supplémentaires par an à partir de 2025, une mission « difficile », reconnaissent des députés macronistes.

Streaming, Airbnb et Fifa

La gauche, elle, pointe déjà « l’austérité ». Elle reproche au gouvernement de ne pas en faire assez sur l’écologie et le logement et de refuser d’augmenter la fiscalité des plus riches ou des grandes entreprises. La droite pour sa part considère que les économies structurelles manquent à l’appel. LR a notamment réclamé une coupe de 6 milliards d’euros sur le montant de l’indemnisation chômage.

Dans la dernière ligne droite, les débats se sont notamment concentrés sur les pénuries de logements, une « bombe sociale », selon nombre d’élus. Entre deux 49.3, le gouvernement a laissé passer une mesure du Sénat pour réduire plus drastiquement que prévu la niche fiscale dont bénéficient les locations de meublés touristiques comme Airbnb. Une « erreur matérielle », explique-t-on au gouvernement, qui assure que la mesure ne s’appliquera pas en 2024, malgré les voix à gauche et dans la majorité qui la réclament.

Autre controverse, le gouvernement a soutenu contre l’avis de l’opposition des mesures fiscales avantageuses pour les fédérations sportives internationales, dont le but principal est d’essayer d’attirer en France la puissante Fifa, grande instance du football mondial. Un « mini-paradis fiscal », a dénoncé Lisette Pollet (RN).

L’exécutif a par ailleurs repris à son compte une taxe votée au Sénat sur les plateformes de « streaming » musical, afin de financer le Centre national de la musique (CNM). De quoi hérisser Spotify France qui a annoncé en représailles cesser de soutenir les Francofolies de La Rochelle et le Printemps de Bourges, dès 2024.

Pour améliorer la construction du budget, le gouvernement entend avancer l’an prochain les discussions budgétaires, y compris avec les oppositions. « Le budget 2025 sera plus exigeant encore. On doit le construire très tôt », a expliqué le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave.

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