Bande de Gaza: comment va s'organiser l'acheminement de l'aide humanitaire depuis l'Égypte

Des dizaines de camions remplis de tonnes d'aide internationale attendent depuis des jours dans le désert du Sinaï égyptien de rentrer dans la bande de Gaza, où la situation humanitaire devient "incontrôlable" selon l'OMS.

À l'issue d'une rencontre avec Benjamin Netanyahu à Tel-Aviv ce mercredi 18 octobre, Joe Biden a déclaré qu'Israël avait accepté l'ouverture du point de passage de Rafah entre l'Égypte et l'enclave palestinienne pour les livraisons de nourriture, d'eau et de fournitures médicales.

Peu après, le Premier ministre israélien a effectivement assuré qu'"Israël n'empêcherait pas l'acheminement de l'aide humanitaire via l'Égypte".

Dans la foulée, la présidence égyptienne a confirmé qu'Abdel Fattah al-Sissi et Joe Biden s'étaient mis d'accord "sur l'acheminement de l'aide humanitaire vers la bande de Gaza via le terminal de Rafah, de manière durable".

Bombardements sur Rafah

L'Égypte, frontalière de la bande de Gaza, a longtemps été un médiateur traditionnel entre Israël et le Hamas et a été le premier pays arabe à signer un accord de paix avec l'État hébreu en 1979.

Ce mercredi, Joe Biden a affirmé avoir obtenu du président égyptien de "laisser jusqu'à 20 camions traverser" au passage de Rafah, le seul qui ne soit pas contrôlé par Israël. Toutefois, cette aide ne pourra pas arriver avant vendredi en raison de travaux à faire sur la route, détruite par les bombardements israéliens.

"Ils doivent combler les nids-de-poule pour faire passer ces camions", a expliqué le président américain, précisant que cela devrait prendre "à peu près huit heures" jeudi.

Aide conditionnée aux action du Hamas

Le président américain a aussi soutenu que ce convoi n'était pour l'heure qu'un début. "Nous voulons faire passer autant de camions que possible. Il y en a, je crois 150 environ", a-t-il dit, indiquant cependant que l'entrée d'un second convoi dépendrait aussi de "comment se passe" la distribution du premier.

"Si le Hamas (s'en) saisit ou ne les laisse pas passer (...) alors ce sera fini", a prévenu Joe Biden lors d'un entretien avec les journalistes à bord de son avion.

Cette aide humanitaire sera également acheminée sous la supervision de l'ONU, a déclaré le ministre égyptien des affaires étrangères, Sameh Shoukry, à la chaîne de télévision Al-Arabiya.

100 camions par jour

Si l'accord constitue une avancée, les Nations unies et d'autres organismes ont prévenu que l'aide ne serait toujours pas à la hauteur des besoins. Les 2,3 millions d'habitants de la bande de Gaza subissent depuis dix jours un siège total les privant d'eau, d'électricité et de nourriture tandis qu'Israël continue de pilonner ce territoire.

L'aide devra être "conséquente", de l'ordre de 100 camions par jour, a déclaré ce mercredi Martin Griffiths, le chef des situations humanitaires d'urgence à l'ONU, soit les niveaux d'avant le conflit ; les habitants dépendent déjà en grande partie de l'aide humanitaire, un blocus terrestre, maritime et aérien y étant en vigueur depuis 2007.

"Nous devons pouvoir avoir l'assurance que nous pouvons intervenir à grande échelle chaque jour, de manière délibérée, répétitive et fiable", a insisté Martin Griffiths.

"Deuxièmement, nous devons être en mesure d'atteindre les gens en toute sécurité", a-t-il insisté, rappelant que le droit humanitaire international oblige les organisations à fournir de l'aide là où les gens s'estiment être en sécurité.

27 tonnes d'aide russe

La Russie a par ailleurs annoncé ce jeudi qu'elle allait livrer prochainement 27 tonnes d'aide humanitaire aux civils de la bande de Gaza à partir de l'Égypte voisine.

"Un avion spécial (...) s'est envolé de l'aérodrome de Ramenskoïe, près de Moscou, vers l'aéroport d'El-Arich, en Égypte. L'aide humanitaire russe sera remise aux représentants du Croissant-Rouge égyptien pour être envoyée dans la bande de Gaza", a déclaré le vice-ministre Ilia Denissov cité dans un communiqué, sans toutefois préciser quand cet avion avait décollé.

"La population recevra de la farine, du sucre, du riz (et) des pâtes", a-t-il ajouté.

La question des otages

De son côté, "Israël n'empêchera pas l'aide humanitaire depuis l'Égypte tant qu'il s'agit de nourriture, d'eau et de médicaments pour la population civile dans le sud de la bande de Gaza", a confirmé le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu.

L'État hébreu a cependant mis une condition: cette aide ne transitera pas par son territoire tant que les otages détenus par le Hamas ne seront pas libérés. En outre, depuis plusieurs jours, des voix israéliennes s'élèvent pour conditionner un retour de l'électricité et l'aide humanitaire à Gaza à l'accès aux otages par la Croix-Rouge.

Sur BFMTV, Raphaël Morav, ambassadeur chargé d’affaires d'Israël en France, a affirmé ce mercredi que l'eau et l'électricité reviendront à Gaza "quand les otages auront au moins eu une visite de la part de la Croix-Rouge".

Un million de déplacés

Après l'annonce de l'ouverture du passage de Rafah, les États-Unis ont toutefois mis leur veto à une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU qui appelait à une "pause humanitaire", Washington reprochant au texte de ne pas mentionner le "droit d'Israël à se défendre".

À l'inverse, plusieurs pays comme l'Irlande ou le Royaume-Uni ont annoncé augmenter leur aide humanitaire à destination des Palestiniens.

Plus de 1.400 personnes ont été tuées en Israël lors des attaques du Hamas le 7 octobre. En représailles, l'enclave palestinienne est bombardée sans relâche, avec au moins 3.500 Gazaouis tués, selon un bilan communiqué par le ministère de la Santé du Hamas. Depuis le début de la guerre, d'après l'ONU, plus d'un million de Palestiniens ont été déplacés.

Article original publié sur BFMTV.com