Bébé secoué: une nourrice condamnée à douze ans de réclusion

La façade du Palais de justice de Strasbourg, le 15 décembre 2021 (PATRICK HERTZOG)
La façade du Palais de justice de Strasbourg, le 15 décembre 2021 (PATRICK HERTZOG)

Une assistante maternelle a été condamnée mercredi à douze ans de réclusion criminelle pour avoir causé la mort d'un bébé de six mois dont elle avait la garde, en le secouant violemment.

Vanina Reysz, 44 ans, a en outre été condamnée par la cour d'assises du Bas-Rhin, devant laquelle elle comparaissait depuis lundi, à une interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole avec des mineurs.

Cette peine, conforme aux réquisitions de l'avocate générale Claire Vuillet, est "inutilement excessive, dix ans après les faits", a déclaré à l'AFP l'avocat de Mme Reysz, Eric Amiet, annonçant interjeter appel.

Cette mère de deux enfants comparaissait libre après une longue instruction ponctuée par de nombreuses expertises et compléments d'expertises.

"Je regrette", avait-elle déclaré mercredi matin avant que la cour ne se retire pour délibérer. "Je n'ai jamais voulu faire du mal volontairement à Hugo. Il n'y a pas un jour où je ne pense pas à Hugo, à sa famille", avait-elle poursuivi. "Je ne suis pas une meurtrière."

Pour les parents du petit Hugo, un maître pâtissier et une secrétaire-comptable, âgés de 42 ans aujourd'hui, c'est un "soulagement", a déclaré à l'AFP leur avocat Pascal Créhange. "Ils vont enfin pouvoir commencer le travail de deuil."

- Dix ans d'instruction -

Le couple avait dit sa soif de "vérité" sur le déroulé de la matinée du 22 octobre 2013. Ce jour-là, à 07H30, la mère de Hugo dépose un bébé souriant et en bonne santé chez sa nourrice à Marlenheim (Bas-Rhin).

Moins d'une heure plus tard, vers 08H30, l'assistante maternelle appelle les pompiers, affolée. "Il ne respire plus", "il est très, très mou", dit-elle d'une voix haletante.

Aux urgences, les parents de Hugo apprennent que leur fils est décédé. "Là, tout s'est effondré, on ne voulait pas le croire...", a raconté lundi le père, en larmes.

La nourrice avoue avoir secoué le bébé mais explique avoir agi sous le coup de la panique car l'enfant était devenu "amorphe, comme une poupée de chiffon", après avoir englouti le contenu d'un biberon. Selon elle, le lait lui sortait par le nez et la bouche.

"C'était pour le faire revenir à lui", a-t-elle assuré en sanglotant.

Selon des experts entendus par la cour d'assises, Hugo présentait des lésions correspondant à un secouement très violent survenu le jour même des faits et à un secouement antérieur, environ deux semaines avant sa mort.

- Secousses "très violentes" -

A la barre sa belle-soeur, l'ancienne enseignante de son fils, son neveu et le patron de son mari l'ont unanimement décrite comme une personne douce et bienveillante, qui ne se mettait jamais en colère.

"Sa personnalité rend invraisemblable la commission de violences volontaires", a plaidé son avocate, Charlotte Barby.

Si l'ancienne nourrice a reconnu avoir secoué Hugo, les gestes qu'elle a décrits et mimés lors d'une reconstitution ne sont pas compatibles avec les graves lésions constatées chez l'enfant, dont une hémorragie rétinienne, ont souligné des experts entendus par la cour.

Pour entraîner le décès, ces secousses devaient être "très violentes", selon le professeur Jean-Sébastien Raul, médecin légiste qui a autopsié le nourrisson.

"L'accusée ne nous a toujours pas dit ce qui s'est réellement passé", a regretté dans sa plaidoirie Me Créhange, l'avocat des parents de Hugo.

L'ancienne nourrice avait changé de version deux mois après les faits, affirmant qu'elle avait eu un malaise le matin du drame et que le bébé avait pu se cogner la tête contre un mur. Mais les experts ont écarté toute cause accidentelle du décès.

Depuis le drame, elle a cessé de garder des enfants: son agrément, accordé en 2012 lui a été retiré après ce drame.

Elle a entamé une reconversion et s'est formée récemment pour être assistante dentaire.

Son avocat, Me Amiet, a dénoncé un "procès expéditif" et un "délibéré expéditif, d'une heure pour un dossier de dix ans. "Avec des délibérés d'une telle rapidité, les procès d'assises deviennent inutiles", a-t-il tancé.

De leur côté, les parents de Hugo ont eu deux autres fils. "On les a gardés nous-mêmes", a confié le père, sa compagne reconnaissant qu'elle ne "fait plus confiance à personne".

pau/bdx/fan