Au Salon de l’agriculture, il n’y a pas qu’Emmanuel Macron et le gouvernement qui jouent gros

Emmanuel Macron, avec Oreillette, la vache égérie du Salon de l’Agriculture le 24 février 2024.
LUDOVIC MARIN / AFP Emmanuel Macron, avec Oreillette, la vache égérie du Salon de l’Agriculture le 24 février 2024.

POLITIQUE - Huées, cordon de CRS, grille forcée… l’inauguration chaotique du Salon de l’agriculture le 24 février par Emmanuel Macron restera comme une journée plus que difficile pour l’exécutif. À quatre mois des élections européennes, il faut absolument réussir à répondre à la crise agricole et les responsables politiques qui se pressent porte de Versailles à partir de ce lundi 26 février ont tous le même objectif en tête.

Emmanuel Macron au Salon de l’Agriculture : on a suivi la visite sous extrême tension du président

Le poids politique des agriculteurs reste marginal sur le papier, avec moins de 1,5 % de l’électorat. Mais ils sont les représentants les plus emblématiques de la France rurale, auxquels les Français sont très attachés et qui pèsent plus lourd sur le plan électoral. « Parler d’agriculture, ce n’est pas seulement parler aux agriculteurs (...), mais aussi aux consommateurs qui se posent des questions », résume à l’AFP François Purseigle, professeur des universités à l’Institut National Polytechnique de Toulouse. Le soutien de la population à la contestation agricole est d’ailleurs massif, 82 % selon un sondage YouGov pour Le HuffPost réalisé début février en pleine mobilisation.

Dans ce contexte, l’exécutif a tout mis sur la table pour tenter de répondre à la colère : suppression de la taxe sur le GNL, pause d’Ecophyto, déblocage de centaine de millions d’euros, nouvelle loi Egalim, plan élevage, prix plancher, trésorerie d’urgence… Cette pluie d’annonces n’a pas suffi à calmer les agriculteurs, comme en a témoigné la visite houleuse d’Emmanuel Macron. Et en attendant, face au gouvernement qui patine, les autres formations politiques entendent bien abattre leurs cartes.

LR en opération reconquête, avec Ciotti et Wauquiez

Ce lundi, pas moins de quatre d’entre elles vont se croiser dans les allées du SIA. Jordan Bardella, président du RN, en sera à son deuxième jour consécutif. Le président des Républicains Éric Ciotti et l’eurodéputé tête de liste François-Xavier Bellamy seront aussi de la partie, tout comme Manon Aubry, tête de liste LFI et sa collègue députée Aurélie Trouvé. Sans oublier une délégation de députés Renaissance conduite par le président du groupe Sylvain Maillard.

Pour la droite, le Salon de l’Agriculture sonne avant tout comme une opération reconquête d’un électorat qui lui était autrefois favorable. Pour parvenir à ses fins, LR a avancé ses pions avant même le début du Salon, avec la sortie d’un Livre blanc de 60 propositions et la nomination de la céréalière Céline Imart numéro 2 sur la liste européennes. « Nous voulons lancer un message pour dire que l’agriculture est un secteur stratégique. De l’agriculture dépend notre souveraineté alimentaire », faisait valoir Éric Ciotti sur RTL le 20 février.

Outre François-Xavier Bellamy et Éric Ciotti ce lundi, la droite pourra aussi compter sur une figure de poids, en la personne de Laurent Wauquiez, pour mettre en avant ses propositions le 28 février.

La gauche en mission réconciliation, le RN au défi d’être crédible

Sur la gauche de l’échiquier politique, il faut convaincre qu’il n’y a pas incompatibilité entre les revendications du monde agricole et les logiciels socialiste, insoumis et communiste, sans même parler des écologistes pour qui le défi est particulièrement grand. La secrétaire nationale Marine Tondelier ne cesse de marteler qu’« agriculteurs et écolos sont alliés sur de nombreux sujets », quand la tête de liste Marie Toussaint érige en guise de preuve les votes des écologistes au Parlement européen, par exemple contre les traités de libre-échange qui ulcèrent les agriculteurs français. Les deux se rendront ensemble au Salon le 1er mars.

Reste le Rassemblement national. S’il cavale en tête des intentions de vote, le RN est confronté à un double défi chez les agriculteurs. Primo, rassurer sur sa position vis-à-vis de l’UE. Car malgré des critiques, la FNSEA s’affirme encore et toujours « pro-européenne » et le parti lepéniste est souvent renvoyé à son scepticisme vis-à-vis de la politique des 27.

Segundo, il faut réussir à formuler des mesures concrètes. Invité de BFMTV ce dimanche, Jordan Bardella n’a pas échappé à cette remarque d’un agriculteur : « Cela fait 6 ans que vous êtes (élu), on n’a vu aucune proposition arriver de votre mouvement. Quelles sont concrètement vos propositions en faveur du monde de l’élevage par rapport à l’Europe ? », a demandé en direct du Salon un éleveur de bovin.

Porte de Versailles, il reste deux semaines à chacun pour convaincre les agriculteurs. Avant d’en récolter les fruits (ou pas) le 9 juin prochain.

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