Au Niger, la junte mise sous pression par la Cedeao et la France, le président Bazoum reparaît en photo

Après le sommet de la Cedeao, le président du Tchad a rencontré le président déchu du Niger Mohammed Bazoum (à droite) et partagé la première photo de lui depuis le putsch militaire dont il a été victime.
Après le sommet de la Cedeao, le président du Tchad a rencontré le président déchu du Niger Mohammed Bazoum (à droite) et partagé la première photo de lui depuis le putsch militaire dont il a été victime.

INTERNATIONAL - Alors qu’une première photo du président déchu a émergé en ligne, les pays d’Afrique de l’Ouest ont fixé ce dimanche 30 juillet un ultimatum d’une semaine à la junte putschiste qui s’est emparée du pouvoir au Niger, affirmant ne pas exclure un « recours à la force ». Un blocus économique a également été ordonné.

La France a salué ces « décisions prises par les chefs d’État » de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Ce bloc ouest-africain, l’Union Africaine, et les pays occidentaux, dont la France et les États-Unis, ne reconnaissent pas les « autorités » issues du putsch et demandent tous un retour à l’ordre constitutionnel au Niger après le coup d’État.

D’autant plus que la pression s’accroît sur les putschistes et le nouvel homme fort proclamé du Niger, le général Abdourahamane Tiani, chef de la garde présidentielle, à l’origine de la chute de Mohammed Bazoum. L’ensemble des partenaires occidentaux et africains du Niger demandent un rétablissement au plus vite de « l’ordre constitutionnel ».

Le Kremlin a quant à lui appelé ce lundi « toutes les parties à la retenue » et à un retour à la légalité. « Ce qui se passe là-bas suscite une sérieuse préoccupation », a également déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, pour qui la situation doit rapidement se rétablir « afin d’éviter d’en arriver à des pertes humaines ».

Ultimatum de la Cedeao

Un sommet extraordinaire de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (dont le Niger est membre avec 14 autres pays) s’est tenu en urgence dimanche à Abuja, sous l’égide du président du Nigeria, Bola Tinubu, à la tête de l’institution régionale depuis le début du mois.

La Cedeao en a profité pour exiger « la libération immédiate » du président Bazoum et le « retour complet à l’ordre constitutionnel », selon les résolutions lues à la fin du sommet. Si ces demandes ne « sont pas satisfaites dans un délai d’une semaine », la Cedeao « prendra toutes les mesures nécessaires » et « ces mesures peuvent inclure l’usage de la force », selon ces résolutions.

L’organisation régionale a également décidé de « suspendre toutes les transactions commerciales et financières » entre ses États membres et le Niger, et de geler les avoirs des « responsables militaires impliqués dans la tentative de coup ».

L’UE « appuiera rapidement et résolument » les décisions de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), qui a ordonné dimanche un blocus économique du Niger, a ajouté le chef de la diplomatie des Vingt-Sept, Josep Borrell, dans un communiqué.

La France a également salué ces décisions et dit soutenir « les sanctions économiques et financières décidées à l’appui de ces demandes ». Le Quai d’Orsay a aussi assuré avoir renforcé la sécurité de l’ambassade de France au Niger après une vaste manifestation dimanche devant l’ambassade de Niamey.

Plus tôt dimanche, Emmanuel Macron avait menacé de répliquer « de manière immédiate et intraitable » à toute attaque contre les ressortissants de la France et ses intérêts au Niger, où des milliers de manifestants favorables au putsch militaire ont ciblé son ambassade à Niamey. Une ligne également défendue par l’Union européenne qui a indiqué lundi tenir les putschistes responsables « de toute attaque à l’encontre de civils, et de personnel ou installation diplomatiques ».

De son côté, Washington a fait part de son « indéfectible soutien » à Mohammed Bazoum, assurant que le coup d’État mettait en péril le « partenariat » entre les États-Unis et le Niger.

Une photo de Bazoum souriant

Le dirigeant du Tchad, Mahamat Idriss Déby Itno, dont le pays n’est pas membre de la Cedeao, mais qui est voisin du Niger, a participé au sommet de dimanche avant de rencontrer le président du Niger, retenu par les putschistes depuis quatre jours.

Il a ensuite passé quelques heures à Niamey, pour « voir ce qu’il peut apporter au règlement de la crise », selon N’Djamena. Pendant sa médiation, il a pu échanger avec Mohammed Bazoum, dont il a publié une photo sur sa page Facebook. Il s’agit de la première image du président nigérien depuis le putsch. Assis à côté du président tchadien, Bazoum apparaît même souriant.

Mahamat Idriss Déby Itno s’est également « entretenu avec le général Tiani et lui a transmis un message de la Cedeao », selon l’entourage du président Bazoum. L’ex-président du Niger, Mahamadou Issoufou, a également annoncé dimanche qu’il s’employait à « trouver une sortie de crise négociée » pour faire « libérer » son successeur Mohammed Bazoum, et « le restaurer dans ses fonctions ».

La France accusée de vouloir « intervenir militairement »

Lors des événements survenus dimanche devant l’ambassade de France à Niamey, des grenades lacrymogènes avaient été tirées pour disperser les manifestants favorables au putsch militaire qui cherchaient à entrer dans l’ambassade après avoir décroché une plaque affichant « Ambassade de France au Niger » et scandés des slogans anti-Français, armés de drapeaux du Niger et de la Russie.

Dans un communiqué publié ce lundi, les putschistes ont accusé « les services de sécurité » d’une « chancellerie occidentale », sans préciser laquelle, d’avoir tiré dimanche à Niamey du gaz lacrymogène sur les manifestants soutenant la junte, avec « pour conséquence six blessés, pris en charge par les hôpitaux » de la capitale.

Et dans une autre déclaration lue dans une vidéo à la télévision nationale, les putschistes ont accusé la France de vouloir « intervenir militairement » pour rétablir le président dans ses fonctions.

Selon ce même communiqué, des « frappes françaises » auraient été autorisées par le ministre des Affaires étrangères du Niger, Hassoumi Massoudou, conjointement avec la France et l’État-major de la garde nationale du Niger afin de « libérer Mohammed Bazoum ». Des frappes qui n’ont toutefois « jamais eu lieu », comme le rapporte un journaliste de France 24 sur place.

Le Niger est le dernier allié avec lequel la France, ancienne puissance coloniale, entretient un partenariat dit de « combat » contre les jihadistes, dans cette région minée par l’instabilité, la précarité et les attaques de groupes jihadistes.

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