Au Festival de Hyères, la mode s’empare des jouets pour petits garçons pour une bonne raison

Leevi Ikaheimo, finaliste du 38e Festival de Hyères, présente sa collection « No Pain No Glamour ».
Tatu Rouvinen Leevi Ikaheimo, finaliste du 38e Festival de Hyères, présente sa collection « No Pain No Glamour ».

MODE - De larges épaules, des cuisses robustes et des abdos saillants… Cette description n’est pas celle des mannequins qui ont défilé lors du 38e Festival international de mode, de photographie et d’accessoires de Hyères, qui se clôture ce dimanche 15 octobre, mais celle d’une série de vêtements qui y ont été présentés.

Parmi eux, une combinaison en cuir matelassée, équipée de protections disproportionnées aux épaules, coudes et genoux. Ses couleurs jaune, rouge et noir dessinent, elles, les contours des muscles du corps humain. Aux pieds de celui qui l’a revêtue ? Un bien étonnant modèle de chaussures de ski revisitées.

« No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.
Tatu Rouvinen « No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.
« No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.
Tatu Rouvinen « No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.

Culotte de ring en acier, cagoules et cuissardes à grosses épines, mais aussi un sac à main façon fléau - cette arme moyenâgeuse faite d’une masse de fer retenue par un bout de chaîne - ont été aperçus. Le créateur de ces pièces, qu’on dirait faites pour des avatars de Fortnite, est Leevi Ikäheimo.

Le jeune designer finlandais, diplômé de la prestigieuse université d’Aalto à Helsinki, concourt avec les huit silhouettes de sa collection No Pain No Glamour pour le prix mode du festival. Un prix qui, par le passé, a déjà été remis à certains designers de renom, comme Viktor & Rolf ou Anthony Vaccarello, actuel directeur artistique de Saint Laurent.

Derrière l’ironie du titre de sa collection se cache un sujet très sérieux : « l’idéal masculin et la pression à ressembler à tel type d’homme plutôt qu’un autre », nous dit le créateur de mode.

Des jouets genrés stéréotypés

Et pour cause, si ce qu’il a présenté ressemble autant à des figurines de super-héros taille humaine, c’est parce qu’il veut nous faire réfléchir sur la manière dont les jouets en plastique destinés aux garçons les conditionnent à une image stéréotypée, viriliste et irréaliste du corps masculin. Lui, en a pris conscience en observant son petit-cousin s’amuser. « Ce genre de figurines, nous les avions déjà à notre époque, mais de nos jours elles ont des proportions encore plus exagérées », constate ce dernier.

Comme la fête, la techno et la nuit, qui sont aujourd’hui des sources d’inspiration pour Leevi Ikäheimo, les jouets permettent aux enfants de se créer un imaginaire. « Tandis que nous rêvons à cet âge-là de devenir ces personnages, ces images nous atteignent inconsciemment », estime-t-il.

« No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.
Tatu Rouvinen « No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.
« No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.
Tatu Rouvinen « No Pain No Glamour », 38e Festival de Hyères.

Nombre d’études l’ont montré : le marketing des jouets genrés, comme ceux pour jouer à « la petite ménagère » ou au « jeune bricoleur », ont un impact dans la construction psychologique des enfants. Or, si la question autour des standards de beauté féminins véhiculés par les jouets, comme la poupée Barbie, a beaucoup été abordée, le débat chez les garçons, en matière de G.I. Joe et d’Action Man, l’est nettement moins, suggère Leevi Ikäheimo.

Leevi Ikäheimo joue avec la mode

Comme l’ont fait avant lui Jean-Paul Gaultier et Thierry Mugler, avec leur approche du « fantasme masculin ultime », la mode peut jouer un rôle là-dedans, selon lui. Sur les podiums, déjà. Contrairement aux défilés de prêt-à-porter féminins où quelques femmes dites « plus size » défilent désormais, les marques de vêtements masculins peinent encore à inviter des hommes gros ou maigrichons pour présenter leur collection pendant la Fashion Week, sur les réseaux sociaux ou dans les campagnes publicitaires.

« Il reste encore beaucoup à faire dans la mode masculine », souffle Leevi Ikäheimo. C’est, au fond, aussi ce qui le titille. « Ça choque encore les gens de voir un homme avec un short plutôt qu’un pantalon, observe-t-il. Plus que dans la mode féminine, il y a encore plein de possibilités excitantes pour brouiller les frontières du genre dans le vêtement masculin. »

Sa touche à lui ? L’humour et la dérision : « C’est important que les gens rient en voyant mon travail. Ça les pousse à se demander pourquoi j’ai fait ça. Et donc, à réfléchir à l’absurdité de cet idéal masculin. »

À voir également sur Le HuffPost :

La Fashion Week de Paris se termine, et voici trois tendances incontournables qu’on a repérées

À la Fashion Week de Paris, le défilé Hermès perturbé par une militante de l’association Peta