"Au début, ils avaient des formes un peu bizarres": comment les Minions ont été créés

Détail de la couverture du beau livre
Détail de la couverture du beau livre

Les Minions, qui comptent en 2022 parmi les héros les plus populaires au monde, ont des origines françaises. Ces adorables créatures, doublées par le réalisateur Pierre Coffin, ont été imaginées par le dessinateur Éric Guillon, devenu depuis le directeur artistique phare du studio d'animation Illumination. Le beau livre Tout l'Art d'Éric Guillon (Huginn & Muninn), paru début juin, réunit plus de 900 illustrations inédites du dessinateur et raconte leur histoire.

"Comme des lutins qui travaillent pour le Père Noël"

Tout a commencé par un dessin, celui de Gru, l'attachant méchant raté de Moi, Moche et Méchant, raconte à BFMTV Éric Guillon: "C'est un dessin qui date du début du projet, du temps où il s'appelait Evil Me. Je devais dessiner Gru. J'en avais fait un personnage un peu filiforme en costume, mais je trouvais qu'il lui manquait quelque chose."

Il décide alors de dessiner autour de Gru "des petits acolytes pour créer une interaction et positionner le personnage sur le papier". Les Minions sont nés. "C'était des humains", se souvient-il. "Ils portaient déjà leur petite salopette bleue. Ils étaient tout petits, comme des lutins qui travaillent pour le Père Noël."

Une idée qui lui avait traversé l'esprit en travaillant sur un autre projet: "On était fin 2007. C'était la période de Noël. Je travaillais en parallèle sur une pub pour des supermarchés belges pour gagner ma vie. Je travaille souvent par association d'idées et c'est comme ça que je suis arrivé à ces petits ouvriers."

Le réalisateur espagnol Sergio Pablos, à l'origine du projet Moi, Moche et Méchant, avait de son côté imaginé les Minions "comme des hommes de main ["minion" signifie "larbin" en anglais, ndlr], des gros balèzes armés", s'amuse aujourd'hui Éric Guillon. "Mais je n'en savais rien! J'avais juste eu une discussion avec Pierre Coffin à l'époque, qui m'avait briefé."

"J'en ai fait des petits robots"

Le dessin retient l'attention de Chris Meledandri. "Puis ça a pris une autre direction. J'en ai fait des petits robots en forme de gélules, parce que je trouvais ça sympa et que j'étais un peu fan de SF." Une idée, là aussi, inspirée par un autre projet: "Je recycle souvent quand je démarre sur un projet, parce que ça permet de se lancer et de faire des premiers dessins. C'est toujours ce qui est le plus difficile."

Mais le design des robots ne convient pas à Pierre Coffin et Chris Renaud, les deux réalisateurs de Moi, Moche et Méchant: "Les Minions devaient être mignons! S'ils avaient été des robots, on n'aurait pas eu assez d'empathie pour eux. Ils ont proposé à ce moment-là de faire un mixte entre ce côté robotique et un truc plus organique."

Éric Guillon décide de conserver leur forme de gélule. "Au début, ils avaient des formes un peu bizarres", précise-t-il. "J'ai aussi gardé l'œil unique, puis j'en ai fait des personnages de chair." Il propose aussi de leur ajouter des coupes de cheveux différentes pour bien les distinguer. Dans Les Minions 2, le nouveau personnage, Otto, porte quant à lui un appareil dentaire.

"C'est presque une erreur"

Le teint jaune des Minions a été "une évidence", assure Éric Guillon. "Dans les premières recherches intermédiaires, j'en ai fait des rouges, des bleus, des verts... mais le jaune s'est détaché tout de suite." En tout, la conception des Minions a pris seulement cinq mois.

"Il faut bien comprendre qu'à l'époque, les Minions n'avaient pas cette importance", insiste Éric Guillon. "Ce n'était pas vraiment le sujet du film. Puis le public a accroché. Et c'est devenu ce que c'est devenu. C'est presque une erreur!"

Au fur et à mesure des années, le design des Minions n'a pas changé. "Par contre, on a créé plus de variétés et on les a déguisés. Très vite, on s'est aperçus qu'on pouvait les transformer et qu'ils avaient une très forte dimension comique." Les Minions ont aussi cet avantage d'être facile à dessiner - c'est une des clefs de leur succès: "Un œil, un point, une bouche, un genre de gélule et c'est dans la boîte", résume Éric Guillon.

Le directeur artistique, qui a travaillé sur l'essentiel des films d'Illumination (Le Lorax, Tous en scène, Comme des bêtes), ne participera pas au prochain Moi, Moche et Méchant. Il se concentre actuellement sur son premier film en tant que réalisateur.

Plongé dans la conception de ce long-métrage, il regarde de loin, mais avec joie, le succès des Minions 2, qui vient de dépasser les 200 millions de dollars au box-office mondial et inspire le phénomène des "GentleMinions", où des ados se rendent en costume au cinéma pour découvrir le nouveau film de la saga. "C'est extraordinaire ce qui se passe", sourit le dessinateur.

Article original publié sur BFMTV.com