Au Conseil constitutionnel, la réforme des retraites est entre les mains de ces 9 Sages

Laurent Fabius, président du Conseil Constitutionnel, le 21 juillet 2020.
Laurent Fabius, président du Conseil Constitutionnel, le 21 juillet 2020.

POLITIQUE - Alors, ça passe ou ça casse ? Ce vendredi 14 avril, le Conseil constitutionnel rend son avis sur la réforme des retraites. Pendant plus de dix jours, ses 9 Sages ont entendu les élus à l’origine des recours, discuté, analysé ... S’ils donnent leur feu vert, c’est une victoire de taille pour Emmanuel Macron. Dans le cas contraire, si la censure est totale, c’est une véritable claque politique... pour une instance qui assure ne pas en faire.

Trois des occupants de la rue de Montpensier sont nommés par le président de la République, trois autres par le président du Sénat et trois autres par celui (ou celle) de l’Assemblée nationale. Leur nomination n’est effective que si une majorité des 3/5es des commissions compétentes de l’Assemblée ou du Sénat ne s’y oppose pas. Une fois cette étape passée, les « Sages » sont en poste pour 9 ans, une mission non renouvelable et incompatible avec tout autre mandat politique.

Aujourd’hui, trois femmes et six hommes siègent au Conseil constitutionnel. Âge moyen : entre 65 et 78 ans. À l’exception de Jacqueline Gourault, titulaire d’une licence d’histoire-géographie, tous sont passés par les bancs de la magistrature, de l’ENA ou des instituts d’études politiques. De même, huit d’entre eux ont occupé des fonctions politiques parfois discrètes - directrice de cabinet de ministre - ou de premier plan, comme maire, sénateur, ministre et même Premier ministre.

De quoi interroger sur le rôle d’arbitre impartial du Conseil constitutionnel ? En janvier, l’actuel président de l’instance Laurent Fabius admettait que « c’est un avantage d’avoir connu soi-même ce qu’est la réalité du pouvoir, parce que ça permet de prendre des décisions éclairées ». Néanmoins, « il y a peu de rapport entre le gouvernement et le Conseil constitutionnel. Et c’est très bien comme ça. Dans les vraies Cours suprêmes, comme c’est le cas du Conseil constitutionnel, il y a une indépendance », assurait-il sur France Inter.

Où l’on reparle de Hollande, Bartolone et Larcher

Les trois membres les plus anciens du Conseil constitutionnel siègent depuis le 8 mars 2016. Ce jour-là, Corinne Luquiens, Michel Pinault et Laurent Fabius prêtent tous serment devant le président de la République de l’époque François Hollande. Le chef de l’État a personnellement choisi Laurent Fabius, jusqu’alors ministre des Affaires Étrangères des gouvernements Valls et Ayrault. L’ancien Premier ministre est un socialiste historique.

Corinne Luquiens n’est pas identifiée politiquement. Mais elle connaît parfaitement le milieu : elle a commencé sa carrière comme administratrice à l’Assemblée nationale (sous la présidence d’Edgar Faure, alors à l’UDR, parti gaulliste, ndlr) avant de finir secrétaire générale - le plus haut poste administratif du Palais-Bourbon - sous la présidence du socialiste Claude Bartolone, lequel a proposé son nom au Conseil constitutionnel. Michel Pinault est lui un homme du privé, cadre de l’Autorité des marchés financiers (AMF) quand le président du Sénat Gérard Larcher lui offre sa place chez les Sages, la même année.

Le sénateur des Yvelines, indéboulonnable figure du Palais du Luxembourg, a nommé trois des 9 membres en poste actuellement. Après Michel Pinault, Gérard Larcher a proposé avec succès les noms de François Pillet en 2019 puis de François Seners en 2022.

Le premier est un ancien sénateur LR du Cher et président du Comité de déontologie parlementaire du Sénat entre 2015 et 2019 - époque où Gérard Larcher présidait déjà la chambre haute. Quant à François Seners, après avoir été conseiller du Premier ministre François Fillon en 2009, il a officié comme directeur de cabinet de Gérard Larcher au Sénat.

La patte Macron et Ferrand

En 2019, Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale, doit remplacer Lionel Jospin. Sollicité, Alain Juppé accepte de quitter la mairie de Bordeaux - le tout au terme de longues discussions entre Richard Ferrand et Emmanuel Macron, et in fine le feu vert de ce dernier. En parallèle, le président de la République arrête son choix sur Jacques Mézard, un de ses soutiens dès 2017, ensuite ministre de l’Agriculture puis de la Cohésion des territoires dans les gouvernements d’Édouard Philippe.

En 2022, Emmanuel Macron pioche à nouveau parmi ses ministres et choisi la MoDem Jacqueline Gourault. Son entrée au Conseil constit’ se fait en même temps que celle de Véronique Malbec, nommée par Richard Ferrand. Magistrate confirmée, elle ne travaille que deux fois dans des ministères : de 2018 à 2020, comme secrétaire générale du ministère de la Justice à l’époque confié à Nicole Belloubet, puis de 2020 à 2022, où elle est directrice de cabinet du garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti.

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