Agriculteurs : malgré la levée d’un barrage emblématique, la contestation n’est pas terminée

Le président des Jeunes agriculteurs Arnaud Gaillot (à droite) et le président de la FNSEA Arnaud Rousseau (à gauche) lors d’une manifestation à Nitry, dans l’Yonne, le 25 janvier.
ARNAUD FINISTRE / AFP Le président des Jeunes agriculteurs Arnaud Gaillot (à droite) et le président de la FNSEA Arnaud Rousseau (à gauche) lors d’une manifestation à Nitry, dans l’Yonne, le 25 janvier.

AGRICULTEURS - Le mouvement de contestation des agriculteurs marche en ordre dispersé ce vendredi soir, après une journée qui aura connu des avancées notables. En début de soirée, l’une des informations principales est venue du barrage emblématique de Carbonne sur l’A64, près de Toulouse en Haute-Garonne. L’éleveur occitan Jérôme Bayle, initiateur du premier barrage et devenu une figure de la contestation, a en effet annoncé la levée de celui-ci.

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« Si on s’est battus, c’est pour arrêter tout ça (...) ce soir je vous annonce que demain midi l’autoroute pourra circuler », a-t-il lancé sous les applaudissements des agriculteurs, après l’annonce des mesures de simplification et d’aides à la profession dévoilées par Gabriel Attal dans l’après-midi.

Depuis une exploitation bovine de Montastruc-de-Salies, en Haute-Garonne, le Premier ministre a promis un « sursaut agricole » pour faire face à la colère profonde des campagnes.

Abandon de la hausse de la taxe sur le gazole non routier (GNR), indemnités gonflées pour les éleveurs touchés par la maladie des bovins MHE, sanctions lourdes contre trois industriels de l’agroalimentaire ne respectant pas les lois Egalim sur les prix : il a accédé à quelques-unes des demandes les plus pressantes des manifestants.

Évoquant un « mois de la simplification » d’ici au Salon de l’agriculture qui s’ouvre fin février, le chef du gouvernement a aussi cité notamment les « curages » des cours d’eau ou les délais de recours contre les projets de stockage d’eau et d’extension des bâtiments d’élevage. « On ne vous lâchera pas. Je ne vous lâcherai pas », a-t-il lancé. « On a décidé de mettre l’agriculture au-dessus de tout », a-t-il ajouté.

FNSEA, Confédération paysanne et Jeunes agriculteurs sur la même longueur d’onde

Las, ce discours et les annonces n’ont pas satisfait les syndicats, qui entendent continuer la contestation. La FNSEA et les Jeunes agriculteurs (JA), après avoir interrogé leurs adhérents, ont ainsi pris « la décision de poursuivre (la) mobilisation », a déclaré dans la soirée sur TF1 le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau. « Ce qui a été dit ce soir ne calme pas la colère, il faut aller plus loin », a-t-il dit, en estimant que les annonces du Premier ministre étaient « trop justes ».

Sur certains points, comme sur le gazole non routier, des annonces « vont dans le bon sens ». Mais dans l’ensemble « elles ne répondent pas à la totalité des questions que nous nous posons », a estimé Arnaud Rousseau en citant notamment les problématiques liées à l’Ukraine, à la « surtransposition » en France des normes environnementales européennes et à la retraite des agriculteurs.

Même son de cloche du côté de la Confédération paysanne. Les annonces sont « très largement insuffisantes », a affirmé sur RTL sa porte-parole, Laurence Marandola, qui a appelé à « rester mobilisé ». « Ce n’est pas nécessairement des barrages, il y aura différentes formes de mobilisations, sur la route, sur des ronds-points, devant des grandes surfaces, des façons inventives de dire au gouvernement que c’est très largement insuffisant », a-t-elle annoncé.

Si le Premier ministre a multiplié les mesures pour tenter d’endiguer la crise engagée depuis une semaine, « on n’a pas entendu d’annonce permettant d’assurer qu’à très court terme aucun paysan ne devra vendre ses produits en dessous du coût de revient de ses produits (...) c’est pour ça que ce n’est pas suffisant », a justifié la porte-parole du 3e syndicat représentatif, classé à gauche.

« L’appel ce soir, c’est de maintenir la mobilisation (...) parce que oui il y a une réponse sur le GNR, mais par contre il manque tout un tas de réponses », a renchéri Arnaud Gaillot, président des Jeunes agriculteurs, sur BFMTV.

À Bordeaux et Montpellier, on rentre à la maison

Sur le terrain, la mobilisation devrait se poursuivre en ordre dispersé. Les agriculteurs mobilisés à Agen, dans le Lot-et-Garonne, ont annoncé dans la soirée vouloir poursuivre, alors que des manifestants en tracteurs ont « levé le camp » dans plusieurs villes.

À Bordeaux, le blocage de la rocade, commencé tôt mercredi matin, a cessé dans la soirée, selon le syndicat FNSEA. « La décision a été prise de lever le barrage », a confirmé à l’AFP Jean-Samuel Eynard, président de la FNSEA en Gironde.

À Montpellier, la FNSEA de l’Hérault a fait circuler le mot d’ordre « Rentrez à la maison », après que 570 véhicules, dont 315 tracteurs, furent entrés à la mi-journée dans la ville. Ils avaient « occupé temporairement plusieurs sites pour y déverser du lisier, de la paille et divers déchets verts », selon la préfecture.

Dans le Rhône, les agriculteurs qui bloquaient le principal accès routier au nord de Lyon depuis Paris ont levé leur barrage vers 16 h 30.

En Normandie, le blocage à Flers (Orne) a été levé vers midi. Sur l’A12, les ralentissements entamés en début d’après-midi ont également pris fin, selon la FNSEA.

Au Mans, dans la Sarthe, quelque 500 tracteurs ont quitté les lieux vers 17 h 30 après avoir déversé et mis le feu à des pneus, de la paille et divers gravats sur un rond-point à proximité d’un supermarché.

À Périgueux, en Dordogne, un impressionnant tas de pneus et de déchets divers a également été amoncelé aux abords de la préfecture.

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