60 degrés en Espagne ? Valérie Masson-Delmotte, du Giec, fait le point sur « la température de surface »

Il fait très chaud en Espagne, mais il ne fait pas 60 degrés comme l’a affirmé la députée Sandrine Rousseau.
Il fait très chaud en Espagne, mais il ne fait pas 60 degrés comme l’a affirmé la députée Sandrine Rousseau.

ENVIRONNEMENT - « Il fait 60 degrés en Espagne. 60 degrés. » Ce message publié sur Twitter Sandrine Rousseau jeudi 13 juillet a fait réagir des experts du climat dont Valérie Masson-Delmotte. L’éminente scientifique du Giec en a profité pour expliquer la différence entre la température de l’air en surface et la température de surface.

Tout a débuté jeudi soir aux alentours de 23 heures. Sandrine Rousseau a publié un message dans lequel elle s’alarme des températures extrêmes en Espagne où les 60 degrés seraient atteints. Elle s’appuie sur des relevés effectués par l’observatoire européen Copernicus. Comme il est précisé dans le tweet, la température au sol dans la région d’Extremadura, la zone noire au-dessus de Séville, a dépassé les 60 degrés.

Mais rapidement, le climatologue Serge Zaka lui indique qu’« il manque des éléments importants de contexte ». En effet, explique-t-il, cette mesure a été prise par un satellite qui donne la température de la surface du sol. Celle-ci « peut être de 15-20 °C supérieure à l’air suivant le type de sol et sa couleur. Il ne s’agit en aucun cas d’une température de l’air ». Serge Zaka lui demande de « supprimer » son message car il fait du tort « aux scientifiques travaillant sur le changement climatique ».

La température peut se calculer de plusieurs manières

C’est finalement Valérie Masson-Delmotte, experte du climat pour le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), qui est venue rappeler les spécifités de la mesure. L’experte du Giec prend alors le temps d’expliquer la différence entre température de l’air en surface et température de surface.

Elle explique ainsi que « le suivi de l’état du climat planétaire est effectué notamment par l’observation globale et dans la durée de 55 variables climatiques essentielles ». Parmi elles se trouve la « température de l’air au-dessus de la surface », qui est « un indicateur important pour les tendances et extrêmes (santé, agriculture, énergie, écosystèmes...) ».

Les températures sont mesurées grâce à des stations météorologiques aux « standards très exigeants de suivi de la qualité des mesures », souligne l’experte, et servent notamment à faire les prévisions météo. « C’est cette variable qui est pertinente pour évaluer les changements de fréquence ou d’intensité de vagues de chaleur au-dessus des continents », poursuit Valérie Masson-Delmotte.

La température au sol peut être trompeuse

Dans le même temps existent « les capteurs infrarouges embarqués dans les satellites » qui « donnent accès à l’estimation de la température de brillance de la surface », ajoute-t-elle. « Estimer cette température de surface est utile pour mieux comprendre le bilan d’énergie de surface, l’état de surface (avec des mesures de végétation et humidité des sols), et les flux eau et énergie surface-atmosphère. »

Cependant, met-elle en garde, « la température de surface fluctue rapidement en réponse aux changements d’ensoleillement incident (jour/nuit, nuages, aérosols), ses variations dépendent de l’albédo [pouvoir réfléchissant de la surface, NDLR], l’évapotranspiration (sol nu/végétation/urbanisation), ou en cas d’incendie ». Elle est aussi plus élevée que la température de l’air, « qui est l’indicateur de référence pour le suivi météorologique ».

Et de conclure : « J’espère que ce fil est utile Sandrine Rousseau pour s’y retrouver entre ces différentes variables, et que la communication vers le public soit plus claire et s’appuie sur la variable pertinente. »

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