Évaluations nationales en classe de quatrième: pourquoi les résultats sont-ils aussi "inquiétants"?

Le ministre de l'Éducation Gabriel Attal s'est alarmé des résultats "inquiétants" en français et en mathématiques des évaluations nationales passées en classe de quatrième en septembre, et propose la mise en place de "groupes de niveau".

Un niveau en maths et en français "inquiétant". Le ministre de l'Éducation Gabriel Attal a réagi ce lundi 13 novembre aux résultats des évaluations nationales réalisées pour la première fois en septembre par les élèves de quatrième.

Selon le ministre, ces résultats "ne sont pas satisfaisants et sont même plutôt inquiétants. Un peu plus de la moitié des élèves ne lisent pas convenablement et en mathématiques, plus de la moitié ne maîtrisent pas la résolution de problèmes et la géométrie".

"On voit que durant le collège le niveau stagne, voire régresse, ce qui signifie que le collège ne parvient pas à réduire les écarts constatés à l’entrée en sixième. Le risque, si on ne fait rien, c’est que notre collège tombe en panne", s'alarme-t-il dans un entretien au Parisien.

"Pas une surprise"

Pour Thierry Chevaillier, professeur émérite à l'Institut de recherche sur l'éducation (Iredu) de l'université de Bourgogne, cette mauvaise performance "n'est pas une surprise". "On savait déjà grâce aux de tests de seconde que les résultats se détérioraient pendant le collège. On a maintenant la confirmation que c'est dès le début que ça se passe", explique-t-il auprès de BFMTV.com.

Toutefois, "on ne peut pas dire que c'est pire qu'avant, car c'est la première fois qu'on évalue les quatrièmes. Il faudra voir les années suivantes", nuance-t-il.

Selon le chercheur, ces nouvelles évaluations en classe de quatrième doivent permettre au ministère d'avoir une analyse "plus fine" de la situation et d'adopter des "solutions plus ciblées".

Pour Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat Snes-FSU, ces résultats doivent être remis dans un contexte d'apprentissage difficile, marqué par la pénurie d'enseignants.

"On parle d'élèves qui ont traversé la sixième et la cinquième avec des classes particulièrement chargées, des suppressions de postes d'enseignant, des professeurs non remplacés... L'institution ne leur a pas offert les meilleures conditions pour surmonter leurs difficultés", estime-t-elle auprès de BFMTV.com.

Fortes disparités en fonction des milieux sociaux

L'analyse des résultats confirme par ailleurs l'influence écrasante des conditions socio-économiques, mesurées dans les établissements grâce à un indice de position sociale (IPS). "Plus l'IPS est bas, plus les résultats sont faibles, surtout en français", constate Thierry Chevaillier, qui souligne l'incapacité du collège à gommer les inégalités.

"Des écarts importants sont observés entre les élèves scolarisés en éducation prioritaire et ceux du secteur public hors éducation prioritaire", reconnaît de son côté le ministère de l'Éducation nationale dans un communiqué. "Par exemple en français, 14,2% des élèves du secteur public hors éducation prioritaire se situent dans le groupe de performance le plus faible. C'est le cas de 38,6% des élèves de REP+ et de 27,2 % des élèves de REP" (réseau d'éducation prioritaire), cite le ministère.

Les sixièmes meilleurs grâce au dédoublement des classes?

Les résultats des élèves de sixième, qui ont aussi passé en septembre une évaluation nationale, représentent pour le ministre une raison d'espérer. Gabriel Attal se félicite de résultats qui "progressent", "notamment en lecture et écriture". En classe de sixième, "les résultats 2023 sont globalement stables en français par rapport à 2022, avec une hausse observée en REP+. Les résultats sont en hausse en mathématiques entre 2022 et 2023, en particulier en REP+", précise le ministère.

Le ministre voir veut y voir l’effet des dédoublements des classes de CP et de CE1 dont ces élèves ont bénéficié. Dont acte pour le syndicat enseignant Snes-FSU. "Si la diminution des effectifs fonctionne, c'est la preuve qu'il faudrait la généraliser à d'autres niveaux et notamment au collège", affirme Sophie Vénétitay, qui préconise 24 élèves maximum par classe et 20 dans les zones d'éducation prioritaire.

Les groupes de niveau, un tabou

Au Parisien, Gabriel Attal avance une autre solution, celle "des groupes de niveau en français et en mathématiques". "La taille du groupe étant réduite pour les élèves les plus en difficulté", précise-t-il.

Si le ministre ne propose pas des classes constituées selon le niveau des élèves, mais bien des groupes à l'intérieur de certaines matières, il s'attaque à un tabou.

"Mettre les bons élèves d'un côté et les moins bons de l'autre, c'est un gros mot dans l'Éducation nationale. On a démontré que des élèves en difficulté apprenaient mieux dans une classe avec de bons élèves que si on les mettait tous ensemble", rappelle Thierry Chevaillier.

"Les groupes de niveaux, on les expérimente déjà d'une certaine manière en classe de sixième avec l'heure de soutien pour les élèves en difficulté ou d'approfondissement pour ceux ayant plus de facilités", estime Sophie Vénétitay.

"Or ce qu'on observe, c'est des écarts qui se creusent entre un groupe qui se cantonne aux savoirs basiques et un autre qui fait des exercices beaucoup plus stimulants", explique-t-elle, en parlant des groupes de niveau comme d'un "renoncement à l'idée que l'on peut progresser par la confrontation et par l'échange avec l'autre".

Gabriel Attal a assuré qu'il annoncerait "des mesures fortes début décembre sur le collège, pour une entrée en vigueur dès la rentrée prochaine".

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - FEMME ACTUELLE - “un choc des savoirs fondamentaux” : le plan de Gabriel Attal pour remonter le niveau des élèves en Maths et en Français