Aux États-Unis, l’accès à la pilule abortive garanti par la Cour Suprême pour l’instant

Une femme tient une pancarte « protégez le droit de choisir » lors d’une manifestation en faveur du droit à l’avortement et de l’accès à la pilule abortive, à Washington aux États-Unis, le 15 avril dernier. Photo d’illustration.
Une femme tient une pancarte « protégez le droit de choisir » lors d’une manifestation en faveur du droit à l’avortement et de l’accès à la pilule abortive, à Washington aux États-Unis, le 15 avril dernier. Photo d’illustration.

ÉTATS-UNIS - La bataille judiciaire autour de la pilule abortive continue aux États-Unis. La Cour suprême a décidé vendredi 21 avril de maintenir pour l’instant l’accès à une pilule abortive utilisée pour plus de la moitié des IVG dans le pays. Une décision qui suspend des restrictions décidées par des tribunaux inférieurs et offre un répit temporaire aux défenseurs du droit à l’avortement, avant une audience cruciale prévue dès le 17 mai.

Le gouvernement fédéral avait saisi la haute cour en urgence pour faire suspendre ces jugements, ce que le temple du droit a accordé. Seuls deux juges conservateurs de la Cour, Clarence Thomas et Samuel Alito, ont fait savoir leur désaccord vendredi avec la décision prise à la majorité des neuf juges.

La décision de la Cour suprême signifie notamment que les Américaines vont pouvoir continuer à recevoir par voie postale la mifépristone, le nom de la pilule abortive, dans les États où l’IVG reste légal. Il s’agit de l’intervention la plus importante de la Cour sur la question de l’avortement depuis qu’elle a annulé la garantie constitutionnelle à l’IVG en juin 2022. Mais la bataille judiciaire autour de la pilule abortive va se poursuivre, déchaînant de vives passions.

Une « bonne nouvelle »

Évitant de se réjouir ouvertement de cette victoire d’étape, le président démocrate Joe Biden a aussitôt réagi à une annonce bloquant pour le moment des mesures « qui auraient sapé le jugement médical de l’Agence fédérale des médicaments (FDA) et mis en danger la santé des femmes ». L’organisation de planning familial Planned Parenthood a jugé qu’il s’agissait d’une « bonne nouvelle », mais que « les faits restent les mêmes : l’accès à la mifépristone n’aurait jamais dû être menacé en premier lieu ».

Cette décision « n’efface pas le chaos, la confusion et la peur que cette affaire cherchait à susciter », a abondé Elisa Wells, fondatrice du réseau Plan C d’information sur les pilules abortives. « Et même si la mifépristone peut rester sur le marché pour l’instant, l’accès à l’avortement est toujours sévèrement et injustement restreint dans de nombreux États », a-t-elle ajouté dans un communiqué.

L’un des groupes conservateurs et anti-IVG à l’origine de l’affaire, Alliance Defending Freedom, a au contraire dit que la FDA devait « rendre des comptes pour les dégâts qu’elle a causés ». « Notre affaire, qui cherche à faire passer la santé des femmes avant la politique, continue devant les tribunaux inférieurs », a-t-il écrit. Une audience est prévue devant une cour d’appel à la Nouvelle-Orléans le 17 mai.

L’autorisation de mise sur le marché remise en question

Plus de cinq millions d’Américaines ont déjà pris de la mifépristone depuis son autorisation par la FDA il y a plus de 20 ans.

Le casse-tête judiciaire a commencé lorsqu’un juge fédéral au Texas, connu pour sa foi chrétienne, ses positions ultra-conservatrices et nommé par Donald Trump, a retiré le 7 avril l’autorisation de mise sur le marché de la mifépristone après avoir été saisi par des militants anti-avortement.

En dépit du consensus scientifique, il a estimé qu’elle présentait des risques pour la santé des femmes. Une cour d’appel à la Nouvelle-Orléans, saisie par le gouvernement fédéral, a ensuite permis que la pilule abortive reste autorisée, mais en limitant les facilités d’accès accordées par la FDA au fil des ans.

Son jugement revenait à interdire l’envoi par la poste de la mifépristone et à retourner à une utilisation limitée à sept semaines de grossesse, au lieu de dix.

L’avortement interdit dans une quinzaine d’États

Le gouvernement fédéral de Joe Biden a alors saisi en catastrophe la Cour suprême. Cette dernière a temporairement maintenu il y a une semaine l’accès à la pilule abortive, en suspendant la décision de la cour d’appel afin d’avoir plus de temps pour examiner le dossier.

La première suspension décidée par la Cour suprême valait jusqu’à mercredi juste avant minuit. Mais signe probable de profonds désaccords, le juge Alito a indiqué mercredi qu’elle était prolongée de 48 heures, jusqu’à « 23 h 59 vendredi 21 avril ». La Cour pouvait, au choix, décider de suspendre les décisions des cours inférieures, les maintenir, s’emparer de l’affaire ou au contraire refuser de s’impliquer.

La pilule abortive n’est déjà plus disponible officiellement dans une quinzaine d’États américains ayant récemment interdit l’avortement, même si des voies détournées se sont développées. L’impact de restrictions ou d’une interdiction de cette pilule concernerait donc en premier lieu les États où l’avortement reste légal - pour beaucoup démocrates. Même au Canada voisin, l’affaire a provoqué l’inquiétude. La ministre canadienne de la Famille, Karina Gould, a réitéré que son pays entendait aider les Américaines si nécessaire.

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