Écologie, économie, Europe: ces "3 totems d'Emmanuel Macron" renversés par la crise agricole

Samedi 16 avril 2022. Emmanuel Macron, alors en campagne pour le second tour de la présidentielle, se lance dans un plaidoyer pour l'écologie à l'occasion d'un meeting à Marseille. Soucieux de convaincre les électeurs du troisième homme de l'élection, Jean-Luc Mélenchon, le président de la République - qui va jusqu'à reprendre son terme de "planification écologique" - lance:

"La politique que je mènerai dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas."

"Trois totems"

"[Elle] ne l'est donc pas", lui répond Marine Tondelier, secrétaire nationale des Écologistes, ce vendredi sur France 2, plus d'un an et demi après, à l'aune des réponses apportées par l'exécutif à la colère des agriculteurs, qui agite le pays depuis deux semaines.

En cause notamment: la mise en "pause" du plan Écophyto, visant à réduire de 50% les usages de pesticides d’ici à 2030, annoncée par Gabriel Attal la veille, au sein d'une série de mesures - la troisième depuis le début de la crise.

Éditorialiste politique à BFMTV, Matthieu Croissandeau relève également la mise en place de dérogations aux obligations de jachère, décidées par la Commission européenne mercredi, et dont l'Élysée s'était félicitée, estimant que Bruxelles répondait à ses "demandes". Citant l'écologie, mais également l'économie et l'Europe, notre journaliste observe le renversement de "trois totems" du second quinquennat du président de la République.

"Le macronisme, c'est un pragmatisme"

"Ça fait des semaines, voire des mois, que le pouvoir défile en nous disant qu’il va falloir faire des économies, qu’il n’y a plus d’argent", rappelle-t-il, alors que l'assortiment de mesures de l'exécutif à destination des agriculteurs fait grimper la facture à plus de 400 millions d'euros. Et d'évoquer ce slogan que prononçait Gabriel Attal, alors ministre délégué aux Comptes publics, à l'été 2022: "Nous sommes passés du 'quoi qu'il en coûte' au 'combien ça coûte.'"

Troisième totem: l'Europe. "C'était l’horizon indépassable du macronisme. Vous savez, la lumière au bout du tunnel. C’est devenu en quelques jours un bouc émissaire, la responsable de tous les maux", analyse Matthieu Croissandeau, avant de questionner:

"Ça sert à quoi d’invoquer les mânes de Jacques Delors, si c’est pour parler comme François Asselineau?"

Une référence au socialiste, figure de la construction de l'Union européenne, décédé il y a plus d'un mois, et à l'actuel leader de l'Union populaire républicaine (UPR), favorable à un "Frexit" qu'il avait défendu lors de l'élection présidentielle 2017.

Ce "pragmatisme" amène de "la confusion"

"Ça veut dire qu’il faut arrêter de chercher ce fichu cap, cette colonne vertébrale. Le macronisme est un pragmatisme: gérer les affaires courantes au gré des situations", avance Matthieu Croissandeau.

"Le macronisme ne s’appuie sur aucun texte, aucun écrit", rappelle-t-il ensuite, mentionnant également son "parti fantôme", Renaissance, ainsi que l'absence "d'implantation locale". Dès lors, "le président, fait ce qu’il veut, il ne se sent tenu par rien. Il décide au gré du vent", explique-t-il.

Inconvénient néanmoins de son "pragmatisme": cela amène à de la "confusion", à force de présider "un coup à gauche, un coup à droite et même un coup à l'extrême droite" sur le projet de loi immigration, juge Matthieu Croissandeau. " Ça entretient, l’idée que si tout se vaut, plus rien n’est important et donc qu’on peut tout essayer."

Article original publié sur BFMTV.com