Éboulement en Savoie : comment la canicule fragilise les montagnes

MÉTÉO - C’est un éboulement spectaculaire de rochers, en vallée de Maurienne (Savoie), qui n’a heureusement fait aucune victime. Dimanche 27 août, vers 17h15, « plusieurs blocs de rochers représentant un volume d’environ 700 m3 » ont percuté l’écran de protection installée sur la RD 1006, dans un « secteur particulièrement surveillé » sur la commune de Saint-André, à La Praz, a expliqué la préfecture de Savoie dans un communiqué.

Comme le montre notre vidéo en tête d’article, on peut voir un important panache de poussière basculer d’une falaise et s’abattre sur la départementale jouxtant la voie ferrée et l’autoroute A43 en contrebas. Un éboulement qui s’ajoute à ceux déjà survenus les semaines précédentes, dont par exemple celui dans le massif des Ecrins. Ce phénomène naturel, est accentué par les épisodes caniculaires et les fortes pluies.

Ainsi, en Savoie, l’éboulement est survenu lors d’un « épisode pluvieux avec des ruissellements importants qui a suivi un épisode caniculaire dans toutes les Alpes », explique auprès de l’AFP Denis Roy, responsable du centre de montagne Alpes du Nord de Météo France.

Le département était en alerte jaune orage et on est « très vigilant sur ce type d’événement » qui peut affecter les infrastructures, dit-il en soulignant que ces phénomènes « s’accélèrent avec le changement climatique ».

« Cette succession de chaud suivi de fortes pluies » peut avoir causé l’instabilité de la roche, appuie Serge Taboulot, président de l’Institut des risques majeurs à Grenoble, rappelant la série d’éboulements survenus ces derniers jours en haute montagne. « La montagne s’est toujours écroulée mais il y a des périodes plus propices que d’autres, comme cette canicule un peu hors norme », ajoute-t-il.

De la neige qui fond de plus en plus haut

Dans la région de Chamonix, les chutes de pierres se sont en effet multipliées en cette fin du mois d’août. « Ces derniers jours, on a pu en observer plusieurs chaque jour, voire même plus d’une dizaine », assure auprès de BFMTV Ludovic Ravanel, directeur de recherche au CNRS, spécialiste du réchauffement climatique en montagne. Une tendance confirmée par des guides de haute montagne.

Pendant cet épisode caniculaire récent, aux alentours du 20 août, l’isotherme 0°C s’était par ailleurs situé vers 5 000 mètres d’altitude dans la partie sud de la France, un indicateur marquant pour expliquer la chute de pierres. Terme essentiel en montagne, l’isotherme indique l’altitude à laquelle se trouve la température de 0°C. Si les températures sont supérieures à cette marque, la neige commence à fondre et c’est le dégel jusqu’aux sommets des glaciers, ce qui peut entraîner le détachement de pans entiers de roche.

La prudence doit alors être absolument de mise pour tous les randonneurs en haute montagne et les alpinistes. Ce qui ne peut empêcher des décès, comme un alpiniste ce week-end dans son ascension du Mont-Blanc par le couloir du Goûter.

Interrogé par nos confrères de France 3, la semaine dernière, après des chutes de pierres dans la vallée de Chamonix, le géomorphologue Ludovic Ravanel, évoquait également la fonte du permafrost, cette épaisse couche de glace présente dans et sous la montagne, et qui maintient les couches de terre et de pierres entre elles. « Ces dernières années, nous avons pu observer une très forte accélération de cette érosion à haute altitude, avec des phénomènes naturels importants », expliquait-il.

Or, « cette eau qui est gelée depuis des milliers d’années, du fait de la présence du permafrost, joue le rôle de ciment de glace pour maintenir la stabilité des parois rocheuses », ajoute-t-il ce lundi auprès de nos confrères du Point.

Attention aux pluies

Depuis les années 1970, les chutes de pierres ont été multipliées par dix, selon une étude menée sur une partie du massif du Mont-Blanc, rapporte BFMTV.

Le 2 juillet 2019, une coulée de lave torrentielle de 1 000 m3 avait enseveli les rails sur 60 mètres, au niveau de Saint-Michel-de-Maurienne, provoquant l’interruption du trafic ferroviaire France-Italie via Modane pendant trois semaines.

Après une dizaine de jours marqués par une exceptionnelle canicule, la Savoie se trouve, comme la Haute-Savoie et l’Isère, en alerte jaune pluie-inondations. Jusqu’à 40 mm de précipitations étaient prévus en cumulé ce lundi 28 août sur le secteur de l’éboulement de la veille et « à cette heure, le risque est toujours présent », a indiqué la préfecture à l’AFP à la mi-journée.

Cet éboulement massif a par ailleurs entraîné une suspension du trafic ferroviaire et des poids lourds sur un axe majeur entre la France et l’Italie du Nord. Le retour à la normale pourrait prendre plusieurs jours, selon les autorités.

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