États-Unis : après l'avortement, la Cour suprême va statuer sur le sort de la pilule abortive

L'institution judiciaire, à majorité conservatrice, devra rendre son verdict avant juin 2024. La Maison Blanche est montée au créneau, craignant une interdiction du moyen le plus utilisé en cas d'avortement.

L'intervention la plus importante de la Cour suprême américaine au sujet de l'avortement depuis juin 2022. L'institution a annoncé ce mercredi 13 décembre se saisir de la question de la pilule abortive, utilisée dans plus de la moitié des avortements aux États-Unis et objet d'une intense bataille judiciaire.

La haute cour devra se prononcer sur une décision d'une cour d'appel ayant rétabli des restrictions à l'utilisation de la pilule abortive, qui pourrait s'appliquer à l'ensemble des États américains, mais qui est pour le moment suspendue.

La Cour suprême, institution qui tranche les grands débats de société aux États-Unis, devrait étudier le dossier dans les prochains mois pour rendre une décision d'ici la fin de sa session annuelle, en juin 2024. Actuellement à majorité conservatrice, l'annulation de la garantie constitutionnelle à l'IVG en juin 2022, avait provoqué un séisme dans le pays.

"Défendre l'accès des femmes"

La Maison Blanche n'a pas tardé à réagir. "Le président Biden et la vice-présidente restent fermement engagés à défendre l'accès des femmes aux soins en matière de procréation", a déclaré mercredi sa porte-parole Karine Jean-Pierre dans un communiqué.

Si la décision de la cour d'appel, en août à la Nouvelle-Orléans, était confirmée, cela se traduirait notamment par un retour à une limite maximum de sept semaines de grossesse au lieu de dix pour bénéficier d'une IVG, une interdiction de l'envoi de la pilule abortive par la poste et le rétablissement de l'obligation de prescription exclusivement par un médecin.

La question est celle de l'accès à la mifépristone (RU 486) qui, combinée à un autre cachet, a été utilisée par 5,6 millions de femmes depuis son agrément par l'Agence américaine du médicament (FDA) en 2000. Le casse-tête judiciaire a commencé lorsqu'un juge fédéral au Texas, connu pour sa foi chrétienne, ses positions ultra-conservatrices et nommé par Donald Trump, a retiré le 7 avril l'autorisation de mise sur le marché de la mifépristone après avoir été saisi par des militants anti-avortement. En dépit du consensus scientifique, il a estimé qu'elle présentait des risques pour la santé des femmes.

Facilité d'accès limitée

La cour d'appel fédérale de la Nouvelle-Orléans a ensuite permis que la pilule abortive reste autorisée, mais en limitant les facilités d'accès accordées par la FDA au fil des ans. C'est cette décision, pour l'instant suspendue, qui sera étudiée au fond par les neuf sages à Washington, à la demande du gouvernement fédéral du démocrate Joe Biden et du fabricant de la pilule, le laboratoire Danco.

Le 24 juin 2022, la Cour suprême, à majorité conservatrice à la suite des nominations décidées sous la présidence de Donald Trump, a annulé son arrêt Roe v. Wade qui garantissait depuis 1973 le droit des Américaines à avorter, et a rendu à chaque Etat sa liberté de légiférer en la matière. Depuis, le pays est fracturé entre la vingtaine d'Etats ayant interdit ou strictement restreint l'accès à l'avortement, principalement situés dans le Sud et le centre du pays, et ceux des côtes qui ont adopté de nouvelles garanties.

Fuir son État pour avorter

En début de semaine, une Texane à la grossesse risquée a dû quitter le Texas, où les IVG sont interdites sauf rares exceptions, pour pouvoir avorter, car son fœtus est atteint d'une anomalie chromosomique associée à des malformations graves. Le fait qu'elle ait dû fuir son Etat pour "recevoir les soins dont elle a besoin" est "scandaleux", a jugé mardi Joe Biden.

Plus de la moitié des avortements (53%) aux Etats-Unis en 2020 étaient médicamenteux, selon l'institut Guttmacher, spécialiste du sujet. Les avortements utilisant mifépristone et misoprostol dans le délai autorisé sont très sûrs et efficaces, martèlent tous les experts. Aux Etats-Unis, cette méthode est autorisée par l'Agence américaine des médicaments (FDA) depuis 2000.

Article original publié sur BFMTV.com

VIDÉO - Les États-Unis autorisent la première pilule contraceptive sans ordonnance