Yannick Morez, maire de Saint-Brévin, démissionne et quitte sa ville après l’incendie de son domicile

POLITIQUE - C’est trop. Le maire de Saint-Brévin-les-Pins, commune de Loire-Atlantique où un projet concernant un centre d’accueil de demandeurs d’asile suscite une vive opposition, a annoncé mercredi 10 mai sa démission après l’incendie criminel de son domicile en mars.

« Ce mardi 9 mai, j’ai adressé à Monsieur le préfet de Loire-Atlantique un courrier informant ce dernier de mon souhait de démissionner de mon mandat de maire de Saint-Brévin-les-Pins », a écrit mercredi Yannick Morez (DVD) sur la page Facebook de la commune, confirmant une information du site internet de Ouest-France.`

« J’ai pris cette décision pour des raisons personnelles, notamment suite à l’incendie criminel perpétré à mon domicile et au manque de soutien de l’État, et après une longue réflexion menée avec ma famille », explique Yannick Morez.

Le domicile du maire a été visé, le 22 mars, par un incendie qui a détruit deux véhicules et endommagé une partie du bâtiment, sans faire de blessé. Une enquête criminelle a été ouverte par le parquet. « J’ai toute confiance en mon équipe, une équipe compétente (...) qui continuera à agir au service de notre ville et de ses habitants. Après 15 ans de présence dans le Conseil municipal, dont 6 ans en tant que maire, je pars en étant confiant dans l’avenir », conclut le maire démissionnaire.

Il a annoncé dans la foulée quitter la ville. « Ma femme et mes trois enfants ne souhaitent plus que je continue mon mandat de maire. Aujourd’hui, mon épouse a peur de croiser la personne qui a fait ça en faisant ses courses. D’où notre décision de quitter Saint-Brévin une fois que les travaux de la maison seront terminés. Nous quittons la commune où nous vivons depuis trente-deux ans », confie-t-il dans une interview à Ouest-France.

Sollicitée par l’AFP mercredi soir, la préfecture de Loire-Atlantique n’était pas en mesure de confirmer avoir reçu sa démission.

Tensions et pressions de l’extrême droite

Saint-Brévin-les-Pins est, depuis plusieurs mois, le centre de tensions. En cause, un projet de déplacer près d’une école élémentaire le Centre d’accueil de demandeurs d’asile (Cada) qui avait ouvert dans la station balnéaire en 2016 après le démantèlement de la « jungle de Calais ».

Plusieurs manifestations contre ce projet y ont été organisées à l’appel de l’extrême droite, en particulier dans le sillage d’Éric Zemmour. Bernard Germain, un candidat de Reconquête aux législatives de 2022 dans les Côtes-d’Armor, figurait parmi les intervenants de la dernière manifestation en date, fin avril.

Bernard Germain était le porte-parole d’un comité hostile à un projet de centre d’accueil pour réfugiés en situation régulière à Callac (Côtes-d’Armor). Face aux pressions de l’extrême droite et aux tensions dans la commune, la municipalité de Callac avait finalement renoncé en janvier à ce projet, porté par une fondation privée, contrairement à Saint-Brévin où le projet contesté est porté par l’État.

Interrogé par l’AFP fin mars, le maire de Saint-Brévin avait rappelé que 400 demandeurs d’asile ont été au total accueillis sur la commune depuis l’ouverture du Cada il y a sept ans. Et, soulignait-il, « il n’y a jamais eu le moindre souci ».

Applaudissement à l’Assemblée (sauf au RN)

La démission du maire s’est invitée dans la séance nocturne de l’Assemblée nationale, lorsque le socialiste Jérôme Guedj a évoqué l’affaire. « Son domicile a été incendié parce qu’il demandait l’installation d’un centre d’accueil pour les demandeurs d’asile. Des évènements de cette nature nous interpellent », a clamé le député alors que l’hémicycle se levait, à l’exception des députés du Rassemblement national.

« L’Assemblée nationale se lève en hommage à Yannick Morez, maire de Saint-Brevin-les-Pins, qui vient de démissionner après l’incendie de son domicile et des menaces de l’extrême droite. Mais les députés du Front national restent assis. La honte », a rapporté sur Twitter le coordinateur de la France insoumise Manuel Bompard, tandis que l’Assemblée nationale se penchait mercredi soir sur la création d’une commission d’enquête sur les groupuscules violents.

David Samzun, le maire PS de Saint-Nazaire, une ville proche de Saint-Brévin, a fait part de sa tristesse et déploré que « pour avoir servi la République et soutenu les peuples en détresse, il a été contraint de démissionner pour protéger sa famille ». « La fonction d’élu serait-elle devenue dangereuse au point de risquer sa vie et celle de nos proches ? Je ne m’y résous pas », a-t-il ajouté.

« Inacceptable. Les violences, les menaces envers les élus doivent être le combat de tous. Soutien amical et républicain au Maire de Saint-Brevin-Les-Pins Yannick Morez », a pour sa part réagi sur le même réseau social la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et élue (Modem) nantaise, Sarah El Haïry.

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