"On a vu les plus grandes horreurs de l'humanité": comme BSD, cet ancien des forces spéciales s'est reconverti dans le MMA

Comme BSD, il a vécu la guerre avec les forces spéciales américaines. Comme BSD, il s'est reconverti dans le MMA où il a combattu pour l’UFC, Strike Force et IFL. Tim Kennedy sera un suiveur particulièrement concerné par le combat tant attendu entre le Français Benoît Saint Denis et l'Américain Dustin Poirier, samedi à Miami (à partir de 23h30, sur RMC Sport 2). Auteur à succès du New York Times, l'ancien combattant vient de sortir une version française de son livre "Des plaies et des bosses" (éditions Nimrod). Ce colosse aux multiples casquettes a aussi servi de sparring-partner à l’ancien soldat français, en qui il retrouve beaucoup de similitudes liées à leurs parcours similaires.

Après l'armée, "vous ne vous regardez plus de la même façon, parce que vous savez de quoi vous êtes capable"

"Toutes les choses qui font de vous un bon soldat, font de vous un meilleur combattant, et toutes les choses qui font de vous un bon combattant font de vous un meilleur soldat", confie-t-il à RMC Sport dans une longue interview dans le cadre du film exceptionnel consacré au combat de samedi (disponible sur la plateforme YouTube RMC Sport). Tous les attributs et toutes les caractéristiques que j’avais en tant que soldat, la discipline, le souci du détail, le respect du temps, la connaissance de l’importance de l’entraînement, ce sont de grands atouts pour être un athlète."

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Admiratifs des soldats français croisés en opérations, Tim Kennedy partage avec Benoît Saint Denis le même cheminement qui l’a mené à revêtir le treillis, puis à monter dans l’octogone.

"J’étais bon dans la violence. Si je voyais quelque chose de mauvais se passer devant moi, je n’hésitais jamais à y aller et à essayer de protéger ceux qui ne pouvaient pas se protéger", confie-t-il.

"Je pense que c’est la meilleure transition que vous pourriez faire"

L’engagement militaire a aussi contribué à le faire changer en tant qu’homme entre la formation extrême et les situations qui amènent à tuer. "A partir de ce moment-là, vous ne regarderez plus jamais le monde de la même façon, et surtout, vous ne vous regarderez plus de la même façon, parce que vous savez de quoi vous êtes capable. Et c’est... spécial", ajoute celui qui a combattu en Afrique ("au moins dix fois"), en Irak (à la recherche du responsable d’Al-Qaïda Abou Moussab Al-Zarqaoui, en 2006), en Afghanistan ou en Ukraine.

Il en a conservé une grande froideur à l’approche des combats, contrairement à ses partenaires d’entraînement. "Je suis dans les coulisses et tous ces gars deviennent fous", sourit-il à l’évocation d’une anecdote sur sa placidité, au point de faire une sieste 20 minutes avant un combat. "Ils se mettent des gifles. Un gars se jette dans le coin, l’autre n’arrête pas d’aller aux toilettes pour aller pisser. Et je suis assis là, genre zen. (…) Je le prends (son adversaire), je le soulève. Tête contre le sol. Je le frappe environ 25 fois et c’est la fin du combat. Mon rythme cardiaque n’a jamais augmenté. En rentrant dans les coulisses, Leo, le manager de l’équipe de combat me dit: ‘Mais c’était quoi ce cirque?’ Je lui dit: ‘c’était un combat! C’est pour ça que tu m’as emmené ici, je vais aller chercher des sushis.’ Il ne pouvait pas comprendre à quel point j’étais différent de tous les autres dans cette salle."

Il a noté cette même facilité à changer de personnalité chez Saint Denis une fois dans l’octogone. "L’autre jour, je rentre dans le café, la sublime femme de Benoît, Laure, est assise en face de lui. Et sur ses genoux se trouve sa jolie petite fille, ses beaux yeux bleus, ses petits cheveux bouclés. Et Benoît la fait rebondir sur ses genoux, elle sourit et se blottit contre son père alors que 10 minutes avant, ce mec me frappait au visage avec la main droite."

"Ce switch est dans un autre niveau quand vous entrez dans la cage. Quand Benoît switche de mentalité, tu vois dans son regard qu’il n’est là pour aucun but, si ce n’est la violence. C’est magnifique."

"Le meilleur et le pire de l'humanité"

Pour Tim Kennedy, dans la cage, tout est "simplifié". "C’est la version la plus primaire de nous-mêmes. Est-ce que c’est la vraie version de vous-même? Dans certains sens, c’est parfois ce que nous sommes vraiment." Le passif dans l’armée (que Saint Denis affiche sur un tatouage) aide, en cela, à garder un cadre fort. "Ils vous montrent comment faire votre lit, comment manger, dormir, vous entraîner. Et vous portez cela avec vous dans le combat, dans le fait d’être un athlète. Je pense que c’est la meilleure transition que vous pourriez faire."

Il conclut en imageant le MMA comme une soupape ravivant un peu les émotions de leur vie antérieure à l’armée. "Nous avons vu certaines des plus grandes horreurs qu’un humain peut voir dans nos vies", lance-t-il. "Nous avons vu le meilleur de l’humanité et nous avons vu le pire de l’humanité. J’ai vu des actes d’héroïsme, de courage et des sacrifices les plus incroyables. Et j’ai aussi vu les choses les plus déplorables dégoûtantes qu’une personne peut faire. A cause de ce spectre, ce n’est jamais assez. Parce que tout le reste dans ce monde est maintenant un peu brumeux. C’est un peu fade, un peu gris."

Article original publié sur RMC Sport