Troubles cognitifs, du comportement… Les vrais dommages de l’alcool sur les jeunes

Une nouvelle campagne de prévention contre l’alcool à destination des jeunes suscite la polémique parce qu’elle n’insisterait pas assez sur les dangers.

Un groupe d'étudiants buvant de l'alcool (crédit : getty image)
Un groupe d'étudiants buvant de l'alcool (crédit : getty image)

L’alcool chez les jeunes, un “fléau de santé publique”, note le ministre de la Santé Aurélien Rousseau sur X (ex-Twitter). Pour tenter de l’endiguer, le gouvernement a lancé ce mardi une nouvelle campagne de prévention qui a suscité la polémique chez certains professionnels de santé. Son tort : inciter davantage à l’encadrement qu’à la réduction. "Cette campagne est un peu ambiguë. Elle ne parle pas des dangers de l'alcool, ne dit pas qu'il faut réduire sa consommation... Elle parle de précautions", a par exemple estimé Bertrand Basset, président de l'association Addictions France, au micro de Sud Radio.

Les effets de l’alcool sur le cerveau

“La molécule alcool est dangereuse, qu’on en abuse ou pas, nous rappelle de son côté l’addictologue Stéphanie Ladel. Dès les premières gouttes, il y a des effets psychoactifs et toxiques sur l’organisme”. À faible dose, l’alcool a un effet psychostimulant excitant qui entraîne une désinhibition du comportement, ce qui est souvent l’effet recherché. Mais à plus forte dose, l’effet devient sédatif. Les conséquences peuvent alors être graves en entraînant des troubles du comportement, des violences, des rapports sexuels non protégés et/ou non désirés ou encore une baisse de la vigilance. Une ingestion à très forte dose peut conduire au coma éthylique qui nécessite une hospitalisation en urgence.

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Et sur les effets à long terme ? “Chacun de nous n’a pas la même résistance à l’alcool, ni les mêmes vulnérabilités, détaille la spécialiste. Quand on boit de l’alcool jeune, on accepte la prise de risque qui va avec.” Si le danger est bien présent dès le premier verre, les situations les plus à risques se présentent au bout de deux verres dans la même journée ou de deux verres tous les jours de la semaine. Hormis les troubles de l’attention, de la concentration et de la mémoire momentanés, l’intoxication alcoolique peut être à l’origine d’un syndrome de Korsakoff (démence alcoolique) caractérisé par une altération irréversible de la mémoire, des troubles de l’humeur et une affabulation.

Les effets de l’alcool sur l’organisme

Après l'absorption d’un verre d’alcool (environ 10 grammes), l'éthanol va vers les organes les plus vascularisés comme le cerveau, les poumons et le foie. C’est d’ailleurs ce dernier qui l’élimine à 95%. Ainsi, même sans être un très grand consommateur, l’alcool peut augmenter le risque de développer certaines pathologies comme la cirrhose, aussi appelée “maladie du foie gras”, ou certains cancers. “Sept localisations de cancers ont un lien avéré avec la consommation d’alcool : cancers de la bouche, du larynx, du pharynx, de l’œsophage, du foie, du côlon-rectum et du sein”, précise Santé publique France. L’éthanol qui n’est pas éliminé par le foie l’est par les reins, la peau, les poumons et la salive.

La consommation d’alcool régulier a aussi un effet sur la pression artérielle et favorise les risques d’accidents vasculaires cérébraux (AVC hémorragique) et de fibrillation atriale (augmentation du risque de survenue à partir de 10g d’alcool par jour chez les hommes et 30g d’alcool par jour chez les femmes). Au total, l’alcool est à l’origine de 49 000 décès par an, estime le Ministère de la Santé.

Boire de l’eau ou manger avant de boire pour diminuer les risques ?

Une des affiches de la campagne de prévention rappelle de “de boire aussi de l’eau si l’on consomme de l’alcool”. “Ce conseil permet de diminuer les risques, car ça permet d’une part de combler la déshydratation due à l’alcool mais aussi de canaliser un comportement. A chaque verre d’alcool bu, on enchaîne avec un verre d’eau avant de boire un autre verre d’alcool”, explique Stéphanie Ladel.

Une autre affiche rappelle de manger avant de boire, car l’ingestion de nourriture permet de ralentir la “vidange gastrique”. “Même s’il y a une recrudescence de l'alcoolorexie (fait de ne pas manger pour avoir plus vite les effets de l’alcool), il y a aussi qui le font parce qu’ils n’ont pas les moyens de se payer à manger et à boire dans la même soirée”, rappelle l’addictologue. Si, pour elle, certains messages manquent effectivement de clarté, d’autres peuvent trouver leur public. “L’un des meilleurs messages de cette campagne est de rappeler de ‘ne pas insister si tes potes ne veulent pas consommer, conclut-elle. On voit d’année en année que le groupe des “jeunes” comprend de plus en plus d’abstinents. Ce n’est plus un passage obligé pour socialiser.”

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