"Nous vivrons": comment Joann Sfar a imaginé son dessin devenu viral, après l'attaque du Hamas contre Israël

"Nous vivrons": comment Joann Sfar a imaginé son dessin devenu viral, après l'attaque du Hamas contre Israël

"Cela veut dire 'nous vivrons'." Cette phrase, en légende d'une aquarelle de Joann Sfar représentant le mot hébraïque 'hai', qui signifie 'la vie', est devenue virale le week-end dernier sur Instagram, après l'attaque du Hamas contre Israël, qui a fait plus de 1.200 victimes selon un dernier bilan publié ce mercredi matin.

Avec près de 33.000 "likes" et autant de partages, ce visuel fort du dessinateur du Chat du Rabbin est devenu un des symboles du soutien aux victimes israéliennes. Interrogé par BFMTV sur ce qui l'a inspiré, Joann Sfar précise que "c'est tout simple":

"Quand (les juifs) trinquent, ils disent 'L'Chaim', ça veut dire 'à nos vies'. Le 'haï', c'est ce qu'on met autour du cou des jeunes gens (juifs) pour leur porter bonheur. Je trouve très beau le fait que là où de nombreux hymnes nationaux appellent au sang et au massacre, le slogan israélien est: 'Am Israël Haï!', c'est 'Israël vivra'."

"Venant d'un petit pays qui a la taille des Alpes-Maritimes et qui peut être rayé de la carte en 24 heures, venant d'une population, les juifs, qui où qu'elle soit depuis l'antiquité a connu le risque de l'extermination, cette aspiration à vivre, elle suscite une rage qui est difficile à comprendre", commente encore Joann Sfar.

"S'intéresser à l'histoire réelle"

Pour lui, ce dessin entend lutter contre la désinformation qui règne depuis le début du conflit: "Les enfants ou les jeunes gens mal informés depuis la France s'imaginent qu'Israël est une terre expansionniste qui occupe tout le Proche-Orient. J'essaye d'amener les auditeurs ou les gens qui me lisent à s'intéresser à l'histoire réelle."

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Joann Sfar se défend de vouloir inciter à "choisir son camp" et souhaite au contraire faire "comprendre l'humanité et la complexité" d'une situation "forcément déchirante puisqu'en 1917 les Anglais ont promis aux Arabes et aux Juifs la même terre. C'est ça qui s'est passé lors de la déclaration Balfour."

Pas du cartoon mais de l'affiche

Le dessinateur, dont l'œuvre est exposée à partir de jeudi 12 octobre au Musée d'art et d'histoire du Judaïsme, commente souvent l'actualité en dessin. En réaction à l'attentat contre Charlie Hebdo, il avait déjà imaginé en 2015 un dessin lui aussi très relayé, qui synthétisait en une formule percutante la situation: "Si Dieu existe, il ne tue pas pour un dessin."

"C'est marrant, parce qu'il y a une partie de moi qui n'aime pas faire ça", réagit Joann Sfar. "Quand on me parle d'un dessinateur politique et qu'on me dit, 'en un dessin, on a tout compris à l'actualité', ça m'agace parce que je n'aime pas les simplifications. J'aime bien qu'on voie que le monde est complexe."

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"Mais s'il y a un lieu où je me retrouve dans ce que vous dites, c'est presque plus (dans ce rôle) d'affichiste ou de graphiste. J'ai un travail qui fonctionne par images multiples, textes protéiformes, livres dans lesquels il y a de plus en plus de pages. Et quand je dois me résoudre à l'image unique, ce n'est pas du cartoon, mais plus de l'affiche."

Le dessinateur, dont le nouveau Chat du rabbin en librairies ce jeudi dénonce aussi l'antisémitisme ambiant, conclut: "Quand j'ai écrit ce 'hai', qui est une calligraphie, je l'ai vraiment fait comme un affichiste, en pensant aux gens qui faisaient les sérigraphies aux Beaux-Arts pendant Mai 68 ou à des choses comme ça."

Article original publié sur BFMTV.com