Viry-Châtillon : qu'est-ce que l'excuse de minorité, que François-Xavier Bellamy et Xavier Bertrand veulent supprimer ?

Plusieurs LR ont prôné sa suppression, en réaction à la mort de Shemseddine, collégien mort à Viry-Châtillon après avoir été roué de coups.

Francois-Xavier Bellamy, tête de liste LR aux européennes, propose la suppression de l'excuse de minorité (Photo by Ludovic MARIN / AFP)
Francois-Xavier Bellamy, tête de liste LR aux européennes, propose la suppression de l'excuse de minorité (Photo by Ludovic MARIN / AFP)

Mettre un terme à l'excuse de minorité. C'est la solution avancée par plusieurs élus de droite, après la mort de Shemseddine, collégien de 15 ans tué à Viry-Châtillon après avoir été roué de coups, et après le passage à tabac de Samara, collégienne de 13 ans frappée dans son établissement de Montpellier.

Sur LCI dimanche, François-Xavier Bellamy, eurodéputé et tête de liste LR pour les européennes, a affirmé qu'"il faut sortir de l'excuse de minorité (...) car elle veut dire l'impunité, un mineur sait qu'il ne lui arrivera rien tant qu'il transgresse couvert par le fait qu'il est encore loin de sa majorité.

LR veut supprimer l'excuse de minorité

Quelques minutes plus tard, Xavier Bertrand, président LR de la région Hauts-de-France a rappelé sur France 3 être favorable à la suppression de l'excuse de minorité depuis plusieurs année car "il n'y a plus la crainte de l'autorité".

Un principe qui date de 1945

Le principe d'excuse de minorité est créé en 1945, par une ordonnance prise le 2 février par le Conseil National de la Résistance. Le texte pose les deux grands principes modernes de la justice pénale des mineurs : protéger et éduquer. Les mineurs ont une juridiction pénale spécifique, et surtout ils bénéficient d'une présomption d'irresponsabilité.

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L’excuse de minorité, également appelée atténuation de responsabilité selon la loi, est définie par l’article 122-8 du Code pénal : "Les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils ont été reconnus coupables, en tenant compte de l’atténuation de responsabilité dont ils bénéficient en raison de leur âge, dans des conditions fixées par le Code de la justice pénale des mineurs."

Entre 13 et 18 ans, pas de peine supérieure à la moitié de la peine encourue

Concrètement, cela signifie qu'en dessous de 13 ans, il y a une présomption simple de non-discernement du mineur. Or, quand il n'y a pas discernement, il ne peut y avoir de responsabilité pénale. À partir de 13 ans, il y a une présomption de discernement mais avant 18 ans, les mineurs bénéficient d'une atténuation de leur responsabilité en raison de leur âge.

Le code de la justice pénale des mineurs, créé en 2021, remplace l'ordonnance de 1945, et précise que "le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs ne peuvent prononcer une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine encourue", une peine fixée à 20 ans maximum si l'on considère que la peine fixée est la réclusion à perpétuité.

L'excuse de minorité levée deux fois

Entre 16 et 18 ans, l'excuse de minorité peut être, de manière très exceptionnelle, levée par le tribunal pour enfants ou la cour d’assises des mineurs. Depuis son existence, l'excuse de minorité n’a été levée que deux fois : dans les affaires Patrick Dils en 1989 et Agnès Marin, en 2014, note Marianne.

Le débat sur la suppression de l'excuse de minorité revient fréquemment sur le devant de l'actualité, souvent porté par la droite, au gré des faits divers. Dernier en date, lors du procès du meurtrier de Shaïna, jeune fille de 15 ans poignardée et brûlée vive en 2019.

La mort de Shaïna avait relancé le débat

L’ex-petit ami de Shaïna a été condamné en juin 2023 à 18 ans de réclusion criminelle. L’avocat général avait demandé la levée de l’excuse de minorité de l’accusé, âgé de 17 ans au moment des faits, permettant de porter la peine maximum de 20 à 30 ans. Mais celle-ci n’a pas été retenue par la cour.

David Lisnard, président de l'Association des maires de France, mais aussi Olivier Marleix (LR) ont alors directement réclamé la suppression de l'excuse de minorité, alors que Marine Le Pen, sans la mentionner, interrogeait, "la faiblesse de la condamnation".

"Fermeté sans démagogie, humanisme sans angélisme", répondait Dupond-Moretti

Au moins deux propositions de loi ont été déposées pour supprimer l'excuse de minorité, une part la LR Alexandra Martin et l’autre par la députée (extrême droite) Emmanuelle Ménard, sans aboutir. Interrogé dans l'hémicycle en janvier 2023 par cette députée LR sur la suppression de l'excuse de minorité après un nouveau fait divers, le Garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti évacuait totalement cette hypothèse.

"Je vous rappelle qu’en matière de justice pénale des mineurs, l’atténuation de responsabilité, issue du Conseil national de la Résistance du général de Gaulle, est un principe à valeur constitutionnelle, consacré par le Conseil constitutionnel. Le droit actuel permet déjà de lever l’excuse de minorité à 16 ans sur décision du juge. En la matière, ma ligne est claire : fermeté sans démagogie, humanisme sans angélisme".