Un journaliste palestinien tué à la frontière entre Gaza et Israël

Des collègues du journaliste palestinien Yasser Murtaja lors de ses funérailles à Gaza. Un journaliste palestinien touché vendredi par des tirs israéliens alors qu'il couvrait les manifestations à la frontière entre Gaza et Israël a succombé samedi à ses blessures. /Photo prise le 7 avril 2018/REUTERS/Suhaib Salem

GAZA (Reuters) - Un journaliste palestinien touché vendredi par des tirs israéliens alors qu'il couvrait les manifestations à la frontière entre Gaza et Israël a succombé samedi à ses blessures, ont rapporté les services de santé.

Yasser Mourtadja, caméraman pour Aïn Media, était âgé de 30 ans. Le bilan de cette "Grande marche du retour" organisée pour réclamer le droit au retour des réfugiés, qui est entrée dans sa deuxième semaine, s'élève désormais à 29 morts.

L'armée israélienne assure dans un communiqué "ne pas viser intentionnellement les journalistes" et annonce l'ouverture d'une enquête.

Des photos prises peu de temps après les faits vendredi montrent le journaliste au sol avec une veste bleu marine, sur laquelle figure l'inscription "PRESS" en majuscules. Trois autres journalistes ont été blessés le même jour, rapportent les autorités gazaouies.

Selon Radio Israël, qui cite une source interrogée à Gaza, Yasser Mourtadja filmait à l'aide d'un drone, ce que trois de ses collègues ont démenti.

"Nous filmions des jeunes qui brûlaient des pneus. Nous nous trouvions à peu près à 250 mètres de la clôture. Les forces israéliennes ont ouvert le feu et il y a eu des blessés. Yasser et moi nous sommes mis à courir pour aller filmer puis il est tombé", a raconté Achraf Abou Amra, un photographe indépendant interrogé par Reuters. Selon lui, Yasser Mourtadja portait un casque et un gilet pare-balles.

HUIT BLESSÉS SAMEDI

Environ 20.000 personnes ont pris part aux manifestations de vendredi, a estimé l'armée israélienne. Au premier jour de protestation, le 30 mars, dix-sept personnes avaient été tuées par l'armée israélienne, d'après les services de santé palestiniens. Selon l'Etat hébreu, il s'agissait majoritairement de combattants du Hamas ou d'autres groupes armés palestiniens.

Samedi, les services médicaux de la bande de Gaza ont fait état de huit blessés.

Le ministre israélien de la Défense Avigdor Lieberman a prévenu cette semaine que toute personne s'approchant de la clôture risquait sa vie.

Pour l'Union européenne, le bilan des manifestations soulève de sérieuses questions sur le recours à la force. Les jets de pierres ou de cocktails Molotov et les tentatives d'infiltration signalés par les autorités israéliennes "doivent également être clarifiés", ajoute-t-elle dans un communiqué.

Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans Frontières (RSF), a quant à lui condamné "la réaction disproportionnée des forces israéliennes qui ont blessé et tué plusieurs civils dont des journalistes".

"Nous appelons le gouvernement israélien au strict respect de la résolution 2222 du Conseil de sécurité sur la protection des journalistes, adoptée en 2015 et demandons une enquête indépendante et la condamnation des auteurs de ce crime contre la liberté de la presse", ajoute-t-il.

A Genève, le Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme a déclaré vendredi que les tirs à balles réelles ne devaient être employés qu'en dernier recours et que leur utilisation injustifiée équivaudrait à une violation de la IVe convention de Genève.

(Nidal al-Mughrabi, Arthur Connan et Jean-Philippe Lefief pour le service français)