TRIBUNE. "Sans la séparation des procureurs et des juges, il ne peut y avoir de véritable pouvoir judiciaire"

Voici sa tribune : "La justice est rendue en France au nom du peuple français par les ­magistrats du siège et du parquet." Cet adage si longtemps rabâché résume parfaitement le fantasme qui infecte la ­question de la réforme du parquet. Non, les procureurs français ne peuvent pas être des juges. La Cour européenne des droits de l'homme l'a souligné : seul le juge du siège rend la justice, et un ­parquetier n'est pas une autorité judiciaire. Soutenant ­l'accusation, il représente une partie. Tout le débat actuel sur la réforme du parquet est vicié par le refus de trop de magistrats de regarder les choses en face.

Ce débat tombe dans l'ornière des idées reçues façonnées par deux siècles d'histoire dont on n'arrive pas à se dépêtrer. Pour maîtriser les magistrats, Napoléon les a confondus dans ce corps unique leur permettant d'être tantôt juge, tantôt procureur (on a même vu un remarquable magistrat nommé ­premier président de la Cour de cassation après toute une carrière au parquet). Les procureurs recevaient des instructions directes du ministère. ­Ensuite, leur avancement et leur ­carrière dépendaient largement de leur soumission au pouvoir.

Cheval de Troie du pouvoir exécutif dans la magistrature, le parquet s'est retourné vers son maître pour revendiquer le même ­statut que le juge puisqu'il est magistrat comme lui. Deux cents ans après avoir créé un corps unique, ­Napoléon est pris à son propre piège. Et que procureurs et juges aient en outre des syndicats communs vient r...


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