Temu : 5 choses à savoir sur le géant de la fast-fashion au menu d’Envoyé Spécial

Chaque semaine, Yahoo vous invite à mieux connaître une entreprise. Petits secrets, anecdotes, histoires insolites, ne manquez pas l’occasion d’épater vos amis. Pour ce 103e épisode, on s’intéresse à l’application star du moment : Temu.

Temu : 5 choses à savoir sur le géant de la fast-fashion au menu d’Envoyé Spécial (Crédit :Photo Illustration by Justin Sullivan/Getty Images)

1 - Temu dans le viseur des députés

La France va devenir le premier pays à légiférer sur les dérives de la fast fashion. Les députés ont examiné et adopté à l'unanimité ce jeudi 14 mars une proposition de loi destinée à freiner le développement des sites d’ultra fast fashion, notamment en raison de son impact environnemental. Coïncidence ou pas, Envoyé Spécial diffuse le même jour une émission sur les coulisses de Temu, l’application phénomène du moment.

La proposition de loi, portée par la députée Anne-Cécile Violland (Horizons et apparentés), vise à imposer un malus économique sur les prix de vente de ces vêtements pour compenser son coût environnemental. "Ce n'est pas une taxe, ce n'est pas l'État qui va percevoir cela, c'est plutôt un pot commun où chaque producteur va mettre ses pénalités, qui vont ensuite être utiles pour traiter les déchets mais aussi soutenir les entreprises françaises parce qu'on a couplé cela aussi à un bonus", précise l’élue qui souhaite aussi interdire la publicité pour ces marques. Concrètement, la proposition de loi prévoit la mise en place d’une pénalité de 50% du prix hors taxe pour chaque article vendu. Pour un produit à 10 €, Temu devra ainsi verser une taxe de 5 €.

Avec cette proposition de loi soutenue par le gouvernement, Anne-Cécile Violland ambitionne de "réduire les pulsions d’achat qui ont des conséquences sur les plans environnementaux, sociaux et économiques".

2 - De l’ombre à la lumière en moins d’un an

Son ascension est fulgurante et son succès étourdissant. Inconnue en France début 2023, l’application Temu - prononcez "ti-mou" - cartonne depuis son lancement dans l’Hexagone en avril dernier. En ces temps d’inflation, la plateforme chinoise de e-commerce, propriété du géant Pinduoduo, s’est imposée grâce à ses prix très (très) bas, souvent à moins de 1 euro. Brosse de nettoyage, écouteurs, housse de coffre pour animaux… Vous y trouvez tout et surtout n’importe quoi pour une bouchée de pain.

Pour séduire ses clients, la plateforme chinoise mise sur des réductions jusqu’à -90%, des codes promo à gogo, un marketing ultra-agressif sur les réseaux sociaux, notamment sur TikTok, et sur la "gamification". Cet anglicisme désigne le fait d'introduire des jeux qui permettent de gagner des récompenses pour inciter les consommateurs à revenir et s'attarder sur l'application.

"La gamification et les effets de raréfaction artificielle incitent à des achats spontanés et impulsifs, décrypte Darius Zumstein, chargé de cours et directeur du E-Commerce Lab de la ZHAW pour le journal suisse 20 Minutes. Ils éveillent la curiosité et activent le centre de récompense du cerveau." Là où sa grande soeur Shein se concentre uniquement sur les vêtements, Temu propose un catalogue beaucoup plus large, presque à l’infini.

3 - On la surnomme le "boucher des prix"

Deux ans après le raz-de-marée Shein, Temu trône régulièrement en première position des applications gratuites les plus téléchargées en France. Deux mois après son lancement, Temu comptait déjà 9,5 millions d'adeptes dans l'Hexagone, selon Médiamétrie. Cette nouvelle bombe du e-commerce s’est déjà hissée à la 35e place des enseignes où les Français ont le plus dépensé au troisième trimestre 2023. En poursuivant sur ce rythme effréné, une entrée dans le top 10 en 2024 n’est pas à exclure. Comptez 2,17 euros pour le haut féminin le moins cher, 4,49 euros pour un jeu électronique pour enfants ou encore 38 centimes pour une paire de boucles d’oreilles.

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Ces prix défiant toute concurrence lui valent d’être surnommée "le boucher des prix" selon le site d'information américain The China Project. Comment se débrouille-t-elle pour proposer des prix ridiculement bas ? Temu profite du succès de sa société mère, capable de négocier de meilleurs prix auprès de son vaste réseau de fournisseurs mondiaux. L'application fonctionne comme une place de marché tierce, proposant des produits provenant de vendeurs indépendants. Les vendeurs, en concurrence, sont ainsi obligés de maintenir des prix bas pour garder leurs clients.

Temu surnommée le
Temu surnommée le "boucher des prix"

4 - Une exposition XXL au Super Bowl

Lancée en septembre 2022 aux États-Unis, la marque chinoise n’a pas fait les choses à moitié pour se faire connaître outre-Atlantique. Temu, aidé par l’argent de sa maison-mère Pinduoduo, s’est offert une publicité de 30 secondes pendant la mi-temps du Super Bowl, le plus grand événement sportif aux États-Unis. Coût de l’opération : 7 millions de dollars. Visiblement, son slogan entêtant "Shop like a billionnaire" ("Achetez comme un milliardaire") a fait mouche auprès des téléspectateurs américains puisque les téléchargements ont explosé après la diffusion. Fort de ce coup marketing, Temu compterait déjà plus de 900 millions d'adeptes dans le monde.

5 - Des polémiques en pagaille

Il n’y a pas qu’en France que la marque est pointée du doigt, loin s’en faut. De l’autre côté de l’Atlantique, la société américaine d'analyses Grizzly Research a qualifié Temu de “menace pour les États-Unis”. L'application chinoise est accusée d'héberger un logiciel espion qui collecterait massivement les données personnelles de ses clients. "De grands efforts ont été déployés pour dissimuler les intentions malveillantes et le caractère intrusif du logiciel", indique l’enquête américaine. Au printemps dernier, CNN révélait que Pinduoduo avait pu s'immiscer dans les smartphones Android pour "accéder aux contacts, calendriers, notifications et albums photos des utilisateurs sans leur consentement". Pour couronner le tout, Temu est fortement soupçonnée de profiter du travail forcé des Ouïghours.

Face à ces accusations, l'entreprise tient à tranquilliser ses clients par la voie d'un porte-parole. "Au sein de Temu, nous avons mis en place des systèmes spécifiques pour contrôler et répondre rapidement aux problèmes de qualité, de sécurité et autres. Nous prenons des mesures immédiates et énergiques pour remédier à ces problèmes, rassure l'entreprise. Depuis que nous avons commencé à opérer dans l'UE et en Suisse, nous avons affiné avec diligence nos systèmes de surveillance et de contrôle de la qualité afin d'aborder les différents domaines qui nécessitent des améliorations. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos commerçants pour nous assurer qu'ils répondent aux exigences de l'UE et de la Suisse", fait remarquer la plateforme chinoise.

Qu'importe les accusations, les clients attirés par les prix bas continuent d'acheter. Cette réussite de Temu met surtout en avant un paradoxe chez les consommateurs. Alors qu'ils sont de plus en plus nombreux à se soucier de leur impact écologique - l'essor du marché de la seconde main le montre -, ils n’hésitent pas non plus à se tourner vers des sites à mille lieux de ces considérations. Pas toujours facile d'allier fin du mois et fin du monde.