Technologie, recyclage, espèces différentes... Comment les villages fleuris survivent à la sécheresse

Dans un monde où la température aura augmenté d'au moins 2°C, serons nous contraints de peindre en vert nos pelouses et espaces verts exsangues? C'est la solution de la commune de Mandelieu-la-Napoule en Côte d'Azur, où la verdure desséchée est recouverte d'une peinture à base d'algues.

Comme 4700 communes françaises, Mandelieu-la-Napoule s'est vue décerner le label "villes et villages fleuris", un marqueur de "la qualité de vie" décerné par le Conseil national des villes et villages fleuris (CNVVF). L'association, née il y a 60 ans, n'avait pas pu anticiper la situation actuelle, notamment le risque de sécheresse. Un risque déjà bien présent, un bon tiers de la France étant, à date, en vigilance jaune, orange ou rouge. Sois autant de degrés de restriction dans l'usage de l'eau, élément indispensable pour l'entretien des plantes.

La sécheresse va-t-elle inexorablement rendre nos villes laides? "Pas du tout", balaye Julien Faivre, le directeur du CNVVF. L'organisation a d'ores et déjà adapté ses critères pour mieux correspondre aux "contraintes" du monde moderne:

"Le respect de l'environnement est l'un des nombreux critères. Le jury ne s'attend pas à une pelouse verdoyante dans une ville où on n'a pas le droit d'arroser. Au contraire, la gestion de la ressource en eau est l'un des critères".

Si l'esthétique n'est pas leur unique point d'intérêt lorsqu'il faut attribuer d'une à quatre fleurs à une commune - l'équivalent d'un guide Michelin pour la qualité de vie d'une ville - ce point n'est pas pour autant abandonné.

"On peut absolument végétaliser durablement et faire en sorte que ce soit beau".

Faire "beaucoup avec peu"

Dans l'Indre, l'Oise, la Charente ou encore l'Herault, les communes labellisées pullulent, et ce malgré une alerte rouge cramoisi. Dans nombre de ces communes, on a appris à faire "beaucoup avec peu", indique le CNVVF. L'enjeu est de taille, une commune accueillante pour espérer faire fleurir son tourisme ou garder le moral des locaux ensoleillé.

Mais comment faire dans une commune comme Perpignan (Pyrénées-Orientales) ou la préfecture a intimé l'ordre de fermer les robinets jusqu'en septembre au moins? Les équipes de Julien Faivre ont attribué 4 fleurs à la ville. "Il n'y a dans toute la ville que 24 bacs à fleurs, mais j'ai été impressionné par la beauté Perpignan", admet le directeur du label. "Ils ont su faire beaucoup avec peu".

Ce petit miracle vert est le fruit du travail de David Tranchecost, adjoint de la mairie chargé de l'embellissement. Il le cultive depuis des années. Les astuces sont nombreuses. Pour remplacer la pelouse complètement brûlée, la ville utilise du Kikuyu, un équivalent bien plus résistant et moins gourmand en eau. Pour remplacer les pots de fleurs, il a planifié l'installation de micro-forêts, de couvert végétal, de paillage et de plantes grimpantes sur les façades.

Pour les arbres, la ville qui pouvait accueillir des espèces plus fragiles a basculé vers des "essences méditerranéennes". Plus de 22.000 ont été plantés en l'espace de trois ans. À chaque décision, le mot d'ordre est le même, choisir des espèces plus résistantes et moins consommatrices d'eau. Ces changements ont un autre avantage, ils permettent de lutter contre les effets de halo de chaleur urbaine et de créer des zones naturellement plus fraîches, même au coeur d'une ville de pierre.

"Et dire que pendant des années on a ouvert le robinet sans se poser la moindre question. Maintenant, on doit s'adapter à la réalité de la situation", relève David Tranchecost.

Technologie et nature

Face à la sécheresse, pour espérer garder ses espaces verts, des solutions naturelles existent. Comme à Perpignan, il est possible d'opter pour des plantes coriaces. Mais il n'est pas pour autant question de mettre à l'amende ses spécificités locales. En Alsace, le géranium conserve sa place. "Un géranium peut très bien survivre s’il n’a pas d’eau pendant 3 ou 4 jours par exemple", comme l'a expliqué à BFMTV Fabien Junger, adjoint au maire chargé du fleurissement dans la commune d'Oberhaslach dans le Bas-Rhin.

Les alternatives locales sont nombreuses. À Vesoul (Haute-Saône), on utilise l'eau des piscines pour nettoyer les rues. Les liquides contenus dans celles-ci sont d'abord laissés au repos le temps que le chlore soit évacué. D'une manière générale, les communes sont ennuyées par le manque de cadre sur les "eaux grises", celles qui ont été légèrement polluées, comme après une douche. Les particuliers, eux, sont généralement invités à s'en servir pour leurs plantes personnelles.

"On peut également s'appuyer sur les nouvelles technologies", ajoute le directeur du CNVVF. Des solutions qui permettent par exemple de n'arroser qu'au goutte-à-goutte, ce qui sert à diminuer de 50% ou plus la consommation d'eau. Certaines villes font aussi usage de boîtiers qui permettent de mesurer en temps réel le taux d'hydratation de leurs plantes, la pluviométrie, et donc de n'arroser que lorsqu'absolument nécessaire. Côté astuces, les villes ne semblent pas être à sec.

Article original publié sur BFMTV.com