« La syndicaliste » : Maureen Kearney revient sur son calvaire face à la justice

« La syndicaliste » : Maureen Kearney revient sur son calvaire face à la justice
« La syndicaliste » : Maureen Kearney revient sur son calvaire face à la justice

SOCIÉTÉ - « Moi, personnellement, je n’ai plus du tout envie d’être face à la justice. » Ces mots sont ceux de Maureen Kearney, ancienne représentante CFDT d’Areva qui a inspiré le film La Syndicaliste, de Jean-Paul Salomé et Fadette Drouard, sorti en salle le mercredi 1er mars.

Invitée sur le plateau de C à vous le même jour, Maureen Kearney est revenu sur le calvaire qu’elle a vécu à son domicile, le 17 décembre 2012, puis lors des six années de parcours judiciaire qui ont suivi. Ligotée, violée, scarifiée, elle a finalement été accusée par la justice d’avoir elle-même mis en scène son agression. Ceci avant d’être relaxée l’année suivante, en 2018. Aujourd’hui, alors qu’un film retrace cette affaire, une autre femme est sortie du silence pour témoigner des mêmes sévices, qu’elle dit avoir subis en 2006. Une nouvelle pièce qui pourrait relancer l’enquête.

Interrogée par Anne-Élisabeth Lemoine sur le chamboulement que pourrait provoquer ce nouveau témoignage, l’ancienne syndicaliste d’Areva dit avoir renoncé à se lancer dans un nouveau parcours judiciaire. Ceci même si elle a « envie que l’enquête soit relancée ».

« Moi, personnellement, je n’ai plus du tout envie d’être face à la justice. Ces six ans étaient longs, difficiles, douloureux, quand on vit dans la peur et dans la terreur viscérale on ne vit pas en fait, on survit », dit-elle. Préférant « la paix à la vérité », elle a d’ailleurs retiré sa plainte en 2019 afin de s’extraire de la machine judiciaire.

« Je n’ai pas de mots pour parler du premier procès, c’était odieux », se souvient-elle, précisant que dans la réalité, l’audience a selon elle été « beaucoup plus dure » que ce qui est montré dans le film. « Je ne suis pas prête à renoncer à la paix que j’ai trouvée aujourd’hui », explique l’ancienne représentante.

Quand la justice se retourne contre la victime

La Syndicaliste, adapté d’un livre-enquête de la journaliste de L’Obs Caroline Michel-Aguirre, revient sur une affaire qui a éclaboussé le nucléaire français en 2012 : l’histoire de Maureen Kearney, représentante CFDT chez Areva, farouchement opposée à un accord entre Areva, EDF et l’opérateur nucléaire chinois CGNPC permettant des transferts de technologie en vue du développement d’un nouveau réacteur chinois. Elle jugeait cet accord dangereux, compte tenu de la sensibilité des informations transmises qui, selon elle, mettaient en péril le maintien de l’emploi sur le territoire français.

En décembre 2012, après des mois à dénoncer ce projet, Maureen Kearney est retrouvée ligotée à son domicile, victime d’un viol avec le manche d’un couteau et un « A » scarifié sur le ventre.

Mais voilà, aucune empreinte n’a été retrouvée, hormis les siennes, celles de son mari et de la femme de ménage. Devant la justice, Maureen Kearney paraît froide, presque insensible à ce qui vient de lui arriver. On apprend, aussi, qu’elle a été victime d’un premier viol quand elle était jeune. Épuisée, Maureen Kearney dit avoir tout inventé, puis finalement se rétracte. Elle passe pour une mythomane. La justice se retourne contre elle et l’accuse d’avoir mis en scène sa propre agression, liée selon elle à son combat syndical. Elle est relaxée en appel en 2018. Elle n’a pas ensuite souhaité poursuivre la procédure pour viol.

« Scandale d’État »

Aujourd’hui, une nouvelle femme témoigne de la même horreur, perpétrée six ans avant le supplice de la syndicaliste. Elle s’appelle Marie-Lorraine Boquet-Petit et dit avoir été attaquée à son domicile dans les Yvelines le 22 juin 2006.

Le mode opératoire présente d’incroyables similitudes avec celle de Maureen Kearney. « Un mode opératoire si rare qu’il ne peut être l’œuvre que d’une seule et même officine : menaces téléphoniques, intrusion au domicile, scarifications à la pointe du couteau – une croix sur le ventre et un cercueil sur la poitrine –, viol. », écrit L’Obs, qui a recueilli son témoignage.

Comme le souligne Patrick Cohen dans C à vous, parmi les nombreuses similitudes entre les deux affaires, on compte notamment le fait que les dossiers d’enquêtes ont été bâclés, ou perdus et que les enquêteurs n’ont pas correctement fait leur travail. À ce sujet, le groupe La France Insoumise a plaidé le 28 février pour l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur une affaire que « l’on peut pressentir comme un scandale d’État ».

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