Wendie Renard: "On a créé quelque chose, à nous d’être encore meilleures"

Wendie Renard: "On a créé quelque chose, à nous d’être encore meilleures"

Quel bilan faites-vous de cette Coupe du monde?

Déçue de rentrer plus tôt que prévu... On avait cet objectif collectif d’aller dans le dernier carré. On rentre une semaine avant la fin de la compétition. C’est difficile mais en même temps, il y a beaucoup d’enseignements positifs à tirer pour la suite avec des joueuses qui vont prendre en expérience et en maturité. Avec le groupe que l’on avait, beaucoup de joueuses ont participé à leur première Coupe du monde, voire pour certaines c’était leur première compétition avec l’équipe de France. Cela va faire grandir individuellement et collectivement, le groupe.

Quel type d’enseignements positifs voyez-vous?

A l’arrivé du coach, son mot d’ordre était: le groupe doit être uni. Il fallait que l’on soit solidaire, former cette unité entre staff et joueuses pour nous permettre de bien vivre ensemble et sur le terrain, l’effet se ressentirait. Sur ce côté-là, c’est très très positif. On a passé beaucoup de jours ensemble, même plus qu’avec nos familles, nos proches. Au-delà de la déception sportive, c’est une déception humaine de s’arrêter en quart de finale. Merci au président Philippe Diallo d’avoir été présent du début à la fin, le président Aulas également qui est venu en Australie, les différents staffs : technique, du médical à la vidéo, les cuistos, les gars de la sécurité, les observateurs, les familles présentes en Australie, et tous les supporters qui nous ont soutenues. Tout le monde qui a été embarqué avec nous dans cette aventure. Il y a eu une belle unité. On va continuer à travailler pour revenir plus fortes.

La force du groupe c’est ce qui ressort de cette compétition...
J’ai reçu beaucoup de messages dans ce sens, des amies, de la famille, des personnalités du monde sportif, d’anciens sélectionneurs qui ont remarqué cet élan. C’est totalement différent, partout où le coach est passé, on a vu que ses groupes vivaient bien. J’ai toujours dit : cela part du boss. Le boss c’est lui, c’est lui qui instaure les règles, il insuffle le côté "bien vivre ensemble", et l’exigence sur le terrain car on parle de haut niveau, et on ne peut pas réussir sans exigence. Mais quand on est amené à partager beaucoup de temps ensemble, c’est un paramètre essentiel. C’est réel.

Et sur le terrain, sur le plan du jeu?
Sur le terrain on a été capables d’être ensemble, de montrer beaucoup de solidarité, monter le curseur dans l’agressivité. Je pense que l’on peut mieux faire et notamment dans le jeu car on a des joueuses pour. Je ne vois pas vraiment d’équipe qui a dominé avec le ballon sur ce Mondial. Cela a été d’une intensité différente de ce que j’avais vécu auparavant. C’est monté d’un cran. A part le Japon et l’Espagne qui ont un fort pourcentage de possession, chaque équipe avait leur mi-temps, voire leur quart de mi-temps. Il faut être encore meilleures.

Qu’est-ce qui fait que l’équipe de France s’arrête encore en quart de finale?
Quelques années plus tard, on ne retiendra que le vainqueur, pour moi tu ne sors pas des poules, tu te fais sortir en huitième, quart ou demie, la déception est toujours la même. Forcément dans l’histoire, on rabâche que cela fait des années que l’on ne passe pas ce cap, et c’est vrai. Moi je parle plutôt terrain, et sur ce que l’on a produit. Quand on regarde le quart de finale que l’on a vécu contre les USA à la maison en 2019 et celui contre l’Australie, on a vu un autre visage de l’équipe de France. C’est ça que je retiens. Ce n’est pas un problème mental, je l’ai vu déjà trois fois ce match face à l’Australie, je le connais par cœur. Mentalement, on a montré que l’on était là, même si on a subi en début de deuxième période, à aucun moment on a montré qu’on était faibles. Elles ne nous ont pas marché dessus. Après on a des jeunes joueuses, cela prend plus de temps en sélection, plus qu’en club.

Les fondations pour les JO sont là?

Je dirais oui. Le socle est fait, il est soudé. On sait à quoi s’attendre, on sait ce que l’on a créé entre nous. On sait ce que le coach attend de nous. On aura plus de temps pour se préparer. Le coach est arrivé au printemps, en presque trois mois, il y a vraiment eu un changement radical sur tous les domaines. On pourra s’appuyer dessus. On a aussi une nouvelle compétition, la ligue des Nations, qu’il ne faut pas oublier. Tous ces matchs-là doivent nous permettre d’emmagasiner de l’expérience en vue des Jeux olympiques. Mais c’est loin, regardez pour le Mondial: on avait des plans, et des joueuses se sont blessées avant la compétition. Le sélectionneur a conçu quelque chose, ce sera à nous de hausser le niveau d’exigence.

Vous êtes convaincue que cette équipe de France peut faire de grandes choses?

Cela travaillait bien, sur le terrain et en dehors, c’était bien. Quand on vous responsabilise, quand on vous donne cette confiance, on a envie de rendre. Pour la rendre, si on doit faire trois pas, on va en faire dix. On oublie ça souvent car on montre souvent le côté argent, business dans le sport de haut niveau mais on est des êtres humains. Dans toute relation personnelle ou professionnelle, il y a de l’affect. Au travail, on peut apprécier son collègue ou son patron sans pour autant avoir des idées négatives. On ne s’en rend pas compte mais on passe beaucoup de temps loin de nos proches. Si entre nous, il n’y a pas de compassion, d’entraide, d’amour, on n’arrive à rien.

Ce quart de finale face à l’Australie, était-ce votre dernier match de Coupe du monde?

Oui, malheureusement. Oui, oui… On ne sait pas de quoi demain sera fait, mais aujourd’hui il faut être honnête et lucide surtout. Dans quatre ans, j’aurai 37 ans, il y a des exemples de joueurs et joueuses qui évoluent encore à cet âge-là au plus haut niveau mais je pars du principe que c’était mon dernier Mondial, c’est pour ça que j’étais encore plus en mission.

Article original publié sur RMC Sport