Ski: 2030 déjà dans le viseur face à un hiver pour l'instant morose chez les Bleus

Ski: 2030 déjà dans le viseur face à un hiver pour l'instant morose chez les Bleus

Depuis 2016 et une deuxième place de Nastasia Noens à Crans Montana, aucune slalomeuse française n'a réussi à se hisser sur un podium en Coupe du monde. Pire, la dernière victoire tricolore dans cette discipline remonte à 2010 et un succès de Sandrine Aubert à Zagreb en Croatie.

Symbole de cette disette, une seule française, Clarisse Brèche, était qualifiée ce jeudi pour la deuxième manche du slalom nocturne de Courchevel. Une sur six partantes, un bilan peu reluisant devant le public pourtant chauffé à blanc du Stade Emile Allais.

Excellence désirée

Locale de l’étape, Marie Lamure pleine d’espoir avec son dossard 31 avait ouvert le bal tricolore. Sans succès. Finalement 36e à 29 centièmes de la qualification pour la deuxième manche, la skieuse de 22 ans gardait le sourire malgré une déception évidente. eC'est sûr que je suis déçue. Je me fais prendre par la pression que je me mets moi-même, regrettait-elle dans l’aire d’arrivée. J’ai envie de bien faire, peut-être trop envie de bien faire, donc ça donne du joli ski, mais du ski qui n’est pas rapide. Si vraiment je veux faire de la démo en ski, il faut que je fasse du carving mais là c'est la compète, c'est le chrono qui compte."

Un bilan qui exception faite de Clarisse Brèche donc, 21e au cumul des deux manches malgré son dossard 69 et donc une piste et des conditions de ski très dégradées en première manche, laissera un goût d’inachevé à l’équipe de France de ski féminine qui continue son difficile parcours vers une excellence désirée, mais qu’elle peine à atteindre en slalom, discipline à de rares exceptions près, historiquement faible chez les skieuses françaises.

L’espoir d’un bon résultat, mais quand?

Pourtant, Marie Lamure l’affirme, "il y a vraiment moyen de jouer, il y a des filles qui en veulent dans le groupe France. Certes c’est un groupe jeune et encore en construction, mais certaines filles ont déjà prouvé des choses. Maintenant ce ne sont pas des acquis tous les jours, ce sont des remises à zéro en permanence."

Un état d’esprit conquérant pour un groupe dans lequel Chiara Pogneaux, autre jeune pouce de l’équipe de France, âgée de 21 ans, assure elle aussi avoir de l’espoir pour l’avenir. "On a une super dynamique donc on est en train d'apprendre et de construire donc un bon résultat ça va arriver, j'en suis sûre et j'ai hâte du moment où on sera toutes bien positionnées."

Un sentiment partagé au plus haut de la Fédération Française de Ski, par son président Fabien Saguez, présent jeudi soir dans la raquette d’arrivée. "Cette jeune génération vit relativement bien", constatait-il, reconnaissant toutefois que ce n’était pas "l'ambiance dans un groupe qui fait le résultat. Mais pour le coup comme ça travaille bien, je pense que quoi qu'il arrive, même si on ne sait pas quand, ça va finir par payer."

Le ski alpin français dans le creux de la vague

Car au-delà de Marie Lamure, Chiara Pogneaux et Clarisse Brèche, le slalom français espère aussi pouvoir compter notamment sur Doriane Escane, 24 ans, parmi les toutes meilleures depuis le début 2023 en Coupe d’Europe, même si elle peine un peu à l’image de ses coéquipières à passer le cap du tout meilleur niveau en Coupe du monde.

Une équipe de slalom féminin français qui n’est finalement que le reflet du ski alpin tricolore en général qui avec les départs en retraite de Tessa Worley et de Johan Clarey, et la reconversion partielle de technicien à descendeur d’Alexis Pinturault, laisse pour l’heure les podiums au plus haut niveau dépourvus de bleu-blanc-rouge depuis le début de l’hiver.

Un manque d’infrastructures

Du côté de la Fédération, on n’imagine pas un seul instant qu’il puisse s’agir d’un manque de travail, de sérieux et d’implications de la part des athlètes. En revanche, on se pose la question des moyens et des infrastructures qui seraient pour les skieurs de haut niveau insuffisantes pour pouvoir concurrencer de manière plus régulière le gotha du ski mondial.

"On est sans arrêt en lutte pour trouver des terrains d'entraînement, regrette ainsi Fabien Saguez. On est très bien accueillis là où l’on va, mais il faut qu’on passe un cap supplémentaire. En début de saison, en octobre ou novembre là où les Scandinaves, les Suisses ou les Autrichiens ont des terrains d’entraînement de niveau de la Coupe du monde en permanence, nous on n’a pas ça. Chez eux, il a beau neiger 30 centimètres dans la nuit, le lendemain ils peuvent s’entraîner normalement, ça fait la différence."

Déjà les yeux tournés vers 2030

Un dossier sur lequel la Fédération Française de ski souhaite très vite avancer, notamment en vue de l’objectif des Jeux olympiques d’hiver de 2030, qui sauf énorme retournement de situation devraient revenir à la France. "Il faut qu’on travaille à obtenir des terrains d’entraînements qui soient les meilleurs possibles, insiste Fabien Saguez. Former des gens à préparer ces terrains-là, comme c'est le cas aujourd'hui en Autriche, en Italie ou en Suisse ou en Scandinavie."

Dans cette perspective, si la station de Tignes fait office de modèle en France en la matière, les instances actuelles du ski aimeraient en impliquer d’autres, comme Val Thorens en Savoie ou Vaujany près de l’Alpe d’Huez en Isère. "Mais au-delà de la préparation des terrains d’entraînement, ça va aussi être la question de l’accompagnement des athlètes, de les conduire sur les pistes, de les ramener chez eux, de prendre soin d'eux", insiste Fabien Saguez, reconnaissant avoir un rôle prépondérant à jouer en la matière.

A travers les mauvaises passes sportives se construisent parfois les succès de demain. Méthode Coué ou vrai sentiment, la Fédération Française de ski est persuadée qu’elle n’est pas loin de faire éclore les grands champions du ski alpin de demain et vise déjà les JO 2030.

Un message à la fois sportif, et à l’attention des politiques qui elle l’espère, auront aussi leur poids dans tous ces investissements désirés. D'ailleurs, Laurent Wauquiez, le Président de la région Auvergne-Rhône-Alpes était lui aussi présent jeudi soir aux côtés du staff de l'équipe de France.

Article original publié sur RMC Sport