24 Heures du Mans: les pilotes au défi d'exigences hors norme

Le pilote d'Alpine Endurance Nicolas Lapierre au Mans, le 13 juin 2024, à quelques jours du départ des 24 Heures du Mans (FRED TANNEAU)
Le pilote d'Alpine Endurance Nicolas Lapierre au Mans, le 13 juin 2024, à quelques jours du départ des 24 Heures du Mans (FRED TANNEAU)

Pour répondre aux contraintes hors norme des courses d'endurance comme les 24 Heures du Mans, dont la 92e édition débute ce week-end, la préparation physique et mentale des pilotes est devenue une science très sophistiquée, dans un sport où la moindre erreur peut coûter cher.

Niché dans les Alpes françaises, à quelques kilomètres du lac d'Annecy, Nicolas Lapierre teste ses réflexes devant un mur de pods clignotants. "Quand on est jeune, c'est plus instinctif. Mais avec l'âge, ça se complique", ironise le jeune quadragénaire.

Pour le Français, qui dispute avec l'équipe Alpine ses 17e "24 Heures", "la préparation en amont est tout aussi importante que la gestion de la course".

Et pour cause: au volant de voitures toujours plus fiables et performantes, "c'est devenu un sprint de 24 heures", explique à l'AFP Xavier Feuillée, patron du centre de performances 321 Perform, où s'entraînent de nombreux sportifs comme Nicolas Lapierre ce jour-là, ou le pilote de Formule 1 Esteban Ocon.

"Le fait de mettre la voiture à la limite pendant 24 heures, cela met aussi le pilote à sa limite, ce qui n'était pas le cas avant", poursuit-il.

Durant chaque relais - de quatre heures maximum par pilote, par tranche de six heures - tous encaissent force g et freinages intenses. Rien ne doit donc être laissé au hasard: nutrition, vision, adresse, gestion du stress, soins... tout est scrupuleusement étudié dans le seul but d'optimiser les performances.

- En apnée -

Comme tout autre sportif, les pilotes sont, eux aussi, de véritables athlètes pour qui s'entraîner occupe plus de temps que piloter.

Et si la plupart d'entre eux préparent la légendaire épreuve mancelle comme n'importe quelle autre épreuve du championnat du monde d'endurance - dont les 24 Heures du Mans sont le 4e rendez-vous de la saison -, Nicolas Lapierre rappelle qu'elle reste "la plus importante" des courses.

Dans ce qu'ils appellent le "laboratoire" de 321 Perform - une pièce bourrée de gadgets et de machines servant notamment à tester et améliorer les performances mentales et cognitives de pilotes - Charles Milesi travaille, lui, sur sa vision périphérique.

Pour ses premières 24 Heures du Mans dans la catégorie reine des Hypercars, le jeune pilote Alpine de 23 ans est confiant. Encouragé par Xavier Feuillée, le Français enchaîne les modules avec une dextérité folle.

Tout cela "aide à fiabiliser davantage le pilotage", explique le quadragénaire, chargé d'établir le programme d'entraînement des pilotes.

Une fiabilité qui touche jusqu'à la respiration: à cause de la force g ou lors de mouvements précis effectués par le pilote, le patron du centre raconte avoir enregistré sur l'un d'eux "32 minutes d'apnée au cumul sur un relais de 3 heures - sur une piste qui tourne tout de même plus qu'au Mans".

"Pour ne pas carencer l'organisme en oxygène, ce qui serait préjudiciable à la lucidité, on doit travailler cette capacité à remettre de l'oxygène très rapidement ou à pouvoir porter un endettement en oxygène supérieur sans engendrer de trouble", poursuit-il.

- Multitâche -

Dans le "laboratoire", Matthieu Vaxivière, lui, termine son programme de gainage. Durant deux jours d'entraînement dans les Alpes, le coéquipier de Nicolas Lapierre dans l'Alpine N.36 --qui, comme tous, s'entraîne la majeure partie du temps chez lui-- a jonglé entre les exercices.

"En Hypercar, on a énormément de boutons à toucher pendant que l'on conduit", explique ce Bordelais d'adoption. En plus d'avoir la condition physique, "il faut être multitâche dans la voiture".

Et la concentration doit être constante: "Il faut être à fond tout le temps", assure Nicolas Lapierre. "Car dès qu'on a une petite baisse d'attention, on peut être sûr que ça se paye +cash+ direct".

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