Les sorciers “tiktokés” prospèrent au Sénégal

Une jeune fille se balance compulsivement à même le sol sableux. Dressé devant elle, Karamba scande des incantations pour enjoindre aux esprits de la guérir, pendant qu’elle hurle en se frappant la poitrine, dans une lutte apparemment de plus en plus violente contre ses démons intérieurs.

Ces images totalisent 33 000 vues sur le compte TikTok de Karamba. Elles sont parfaitement représentatives du contenu qu’il partage avec ses milliers d’abonnés : ces vidéos lui servent à prouver l’étendue de son pouvoir sur les esprits et les djinns [esprits ou créatures immatérielles dans l’islam] – un outil marketing dans l’air du temps.

Escroqueries en ligne

Karamba est sorcier guérisseur et contrôlerait, selon ses dires, plus de 600 000 esprits, avec lesquels il pourrait faire ce qu’il veut : guérir des malades, raviver la flamme des passions amoureuses, et faire décoller des carrières.

“Je partage des images de mon travail pour montrer ce dont je suis capable, explique-t-il. Internet ne ment pas.” Ses clients viennent le voir après avoir regardé ses vidéos. Il dit même avoir reçu la visite d’Américains.

Karamba, Cheikh Diop de son vrai nom, rassemble 220 000 abonnées rien que sur TikTok, et publie aussi des vidéos sur YouTube et Instagram. Son utilisation astucieuse des réseaux sociaux a permis à ce quadragénaire d’amasser une petite fortune ; il vit désormais dans une villa de trois étages avec plusieurs dizaines de chambres.

Au Sénégal, les guérisseurs traditionnels comme Karamba sont légion. On les appelle “marabouts” ou “tradipraticiens”.

Dans un pays où l’offre de soins est clairsemée, onéreuse et de piètre qualité, consulter un guérisseur est souvent le premier réflexe quand on tombe malade. Les superstitions et le manque d’instruction viennent également gonfler les rangs des patients.

En Europe comme aux États-Unis, les réseaux sociaux ont encouragé la désinformation et les escroqueries autour des enjeux de santé. Et le phénomène ne se limite pas à l’Occident : le développement de ces plateformes est une aubaine pour les charlatans du monde entier, y compris en Afrique.

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