Serge et Beate Klarsfeld décorés Grand-Croix et Grand officier de la Légion d'honneur par Emmanuel Macron à Berlin

Une vie de traque des nazis. Ce lundi 27 mai, l'avocat et historien français Serge Klarsfeld, fils d'un Juif assassiné à Auschwitz, et son épouse allemande Beate ont respectivement été décorés des insignes de Grand-Croix et de Grand officier de la Légion d'honneur par le président de la République, Emmanuel Macron, lors de sa viste à Berlin.

"Votre couple cristallise ces décennies de chemin parcouru par nos deux nations", a déclaré Emmanuel Macron lors de son discours prononcé dans la matinée après s'être recueilli dans l'imposant mémorial de l'Holocauste, au cœur de la capitale allemande.

"Vous êtes des militants de la Mémoire et des militants de la Justice. Vous avez livré bataille contre l'oubli et pour que les victimes de l'Holocauste redeviennent des sujets de l'Histoire", a-t-il ajouté, estimant que le couple a permis "à nos deux pays de regarder leur histoire en face".

"Important que cela se passe en Allemagne"

"C'est la plus belle des récompenses (...) Ensemble nous avons fait un très long parcours depuis 64 ans et ce parcours a été utile à l'Allemagne, à la France, à la réconciliation franco-allemande", disait à l'AFP Serge Klarsfeld, 88 ans, qui a rencontré Beate, alors jeune fille au pair, en 1960 à Paris.

Être décoré à Berlin, c'est aussi tout un "symbole", d'autant plus "nécessaire aujourd'hui où il y a des petits dissentiments dans le moteur franco-allemand", observe-t-il.

"Pour moi, c'est évidemment important que cela se passe en Allemagne, car après mon histoire de gifle et les grosses manifestations qui avaient suivi, j'étais devenue une brebis galeuse", renchérit Beate, aujourd'hui âgée de 85 ans. Cette dernière avait giflé le chancelier Kurt Georg Kiesinger en 1968 à Berlin pour dénoncer son passé nazi.

S'ils estiment leur "combat essentiel terminé" - débusquer des responsables nazis et les traîner en justice, comme Klaus Barbie, le chef de la Gestapo à Lyon - ils restent "préoccupés" par l'antisémitisme, exacerbé par l'attaque du mouvement islamiste Hamas contre Israël le 7 octobre et la riposte de Tsahal à Gaza.

Et dans cette ultime bataille, le parti de Marine Le Pen, qu'ils vilipendaient encore en 2017, est désormais à leurs yeux au rendez-vous. "Nous avons été soulagés, je ne dirais pas heureux, mais soulagés d'entendre la dirigeante du Rassemblement national condamner Pétain, condamner Laval, condamner la rafle du Vel d'Hiv et prendre parti pour Israël", a déclaré Serge Klarsfeld.

Cette prise de position, esquissée fin 2023, leur vaut de nombreuses réactions d'incompréhension. Elle s'annonce aussi embarrassante pour le chef de l'Etat qui a fait de la lutte contre le RN le combat suprême, de surcroît à deux semaines d'européennes où le parti de Marine Le Pen caracole en tête des intentions de vote. Ils restent en revanche vent debout contre le parti d'extrême droite allemand "Alternative für Deutschland" (AfD), avec lequel le RN a pris ses distances. "Il est anti-européen et antisémite", martèle Beate.

Le président français Emmanuel Macron a honoré lundi à Berlin la mémoire des six millions de Juifs assassinés par les nazis avant une importante étape dans l'est de l'Allemagne pour défendre l'Europe auprès des jeunes, à moins de deux semaines des élections européennes.

"Nous sentons que nous ne pouvons pas nous reposer sur nos acquis, mais que nous devons défendre ce qui nous est cher", a renchéri le président allemand Frank-Walter Steinmeier lors d'une conférence de presse commune.

Article original publié sur BFMTV.com