« Je me suis séparée de mon partenaire à cause de ses opinions politiques » - Témoignage

« Il n’y avait pas débat, on jouait la mauvaise foi pour essayer de “gagner”, on ne s’écoutait pas. »
« Il n’y avait pas débat, on jouait la mauvaise foi pour essayer de “gagner”, on ne s’écoutait pas. »

POLITIQUE - Je l’ai rencontré à une soirée du Nouvel An alors que j’étais encore au lycée. J’avais 17 ans, il en avait 23. Il y a tout de suite eu un bon feeling, on s’est revus plusieurs fois pendant l’année qui a suivi, avant de finalement tomber amoureux et de se mettre en couple.

À l’époque, je ne connaissais pas encore ses idées politiques. On n’avait jamais vraiment eu l’occasion de discuter de ces sujets, ou alors c’était sur le ton de la blague. Je me disais qu’à partir du moment où on était d’accord sur des questions comme l’immigration et le mariage pour tous, on était du même bord politique, je n’ai pas cherché à creuser davantage. Pourtant, la politique était un sujet important pour moi. Je suis de gauche et au fond, je voulais que mon partenaire partage les mêmes idées que moi.

Je me suis sentie trahie

On a connu quatre années de lune de miel. La politique avait très peu de place dans nos discussions. On s’aimait et notre relation fonctionnait. Ma première prise de conscience a eu lieu au moment des élections présidentielles de 2017. J’ai voté pour Macron aux deux tours, plutôt par dépit et faute de mieux. Mon partenaire a voté pour lui par conviction.

Ça a ouvert une discussion entre nous sur nos opinions politiques. Je me suis aperçue que les valeurs qui lui tenaient le plus à cœur étaient traditionnellement à droite, surtout économiquement à cette époque.

Quatre ans, c’est long pour se rendre compte des idées politiques de son partenaire. Mais avant ces élections, il n’y avait pas eu d’élément vraiment interpellant, ou du moins il faisait en sorte qu’il n’y en ait pas. On avait des discussions sur le féminisme, la solidarité, les minorités sexuelles, mais il détournait constamment la conversation sur le ton de la blague.

Quand j’ai pris conscience qu’il avait des idées de droite, je me suis sentie trahie. J’avais l’impression qu’on m’avait menti, trompée. Je me suis rendu compte qu’il ne tenait pas le même discours quand il était avec moi et quand il était avec ses amis. Lorsqu’on était tous les deux il me disait ce que j’avais envie d’entendre, alors qu’avec ses amis, c’était « blagues sexistes à volonté ». Mais je l’aimais et je crois que je cherchais aussi à être la « petite amie parfaite », donc j’ai décidé d’arrêter de parler de féminisme et de politique avec lui.

C’est difficile de partager la vie de quelqu’un à qui on ne peut rien raconter

Après cinq ans en couple, on a décidé d’emménager ensemble, mais petit à petit notre relation s’est dégradée. Alors que je n’abordais plus les sujets qui me tenaient à cœur, lui se permettait d’en parler. Et le peu de moments où j’ai eu le courage de l’affronter, il devenait agressif. Il n’y avait pas débat, on jouait la mauvaise foi pour essayer de « gagner », on ne s’écoutait pas et il finissait par m’insulter : « feminazi », « gauchiasse de merde », « mouton de Twitter ».

J’ai donc fini par ne plus être honnête dans mes réponses. Je me sentais désespérément seule, pas écoutée. Pendant cette période, toute activité du quotidien était propice à une dispute. Il suffisait qu’on regarde une série, pour que ça provoque des tensions. Il donnait constamment son opinion sur le fait « qu’il y ait trop de héros gays », ou se plaignait qu’il y ait un elfe noir dans Les Anneaux de pouvoir, par exemple. Dans ces moments, j’essayais de détourner la conversation et si ça ne marchait pas je le laissais parler.

C’est difficile de partager la vie de quelqu’un à qui on ne peut rien raconter, avec qui on ne peut plus être soi.

La question des enfants

Les élections présidentielles de 2022 ont été l’ultime épreuve pour notre couple. Avec le temps, je suis devenue de plus en plus de gauche et à l’inverse, il s’est radicalisé à droite. J’ai voté Jean-Luc Mélenchon au premier tour. Lui a décidé qu’il était désormais anti-vote.

À la même époque, j’ai commencé à m’interroger sur mon désir d’enfants et à réfléchir à l’éducation que je voudrais leur donner. Ça a été le point décisif. C’était impossible d’envisager de fonder une famille avec quelqu’un qui ne partageait pas des valeurs comme la compassion, l’antiracisme, ou l’ouverture d’esprit.

Comment expliquer à ses enfants qu’il ne faut pas rire de tout quand leur père passe son temps à faire des blagues racistes ? Quand je lui ai parlé de tout ça, il m’a dit qu’il ne voyait pas le problème, que « justement, c’est bien d’avoir deux parents aux points de vue différents ». J’ai fini par rompre avec lui, nos divergences politiques étaient la cerise sur le gâteau d’une relation qui ne fonctionnait plus.

Aujourd’hui, j’ai 28 ans et je rêve juste de pouvoir tomber sur un article dans le journal, le montrer à mon ou ma partenaire et lui dire quelque chose comme « C’est choquant, tu ne trouves pas ?  » et qu’il ou elle me répond juste « oui, je trouve aussi » ou même juste « non, je ne trouve pas, mais discutons-en pour trouver un terrain d’entente ». Ça a l’air tellement reposant !

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