Sébastien Boueilh nouveau coprésident de la Ciivise, voici un livre et un téléfilm pour connaître « le colosse aux pieds d’argile »

INCESTE - Un maintien, non sans changement. Le gouvernement a acté ce lundi 11 décembre la poursuite du travail mené par la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), comme le souhaitait son coprésident Édouard Durand. Mais ce dernier, ancien magistrat spécialiste de la protection de l’enfance, ne sera pas de la partie, puisqu’un nouveau duo a été nommé pour le remplacer à la tête de la commission : la pédiatre et experte judiciaire Caroline Rey-Salmon et l’ex-rugbyman Sébastien Boueilh.

La Ciivise rend son rapport final, et voici trois mesures essentielles qu’elle propose

Originaire de Mont-de-Marsan, Sébastien Boueilh est le fondateur de l’association « Colosse aux pieds d’argile », qui lutte contre les violences sexuelles dans le milieu sportif, comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête d’article, un entretien réalisé en mars 2020. Ancien joueur pro, il a lui-même été abusé sexuellement dans son enfance par un proche, le mari de sa cousine. Un lourd secret qu’il a mis 18 ans à révéler et à porter devant la justice.

Cette histoire, il la raconte dans un livre paru en 2020 aux éditions Michel Lafon, Le colosse aux pieds d’argile, en référence à un surnom dont l’a affublé son avocat lors du procès de son agresseur. Ce livre a ensuite été librement adapté dans un documentaire éponyme et multirécompensé, sorti en 2022 et réalisé par Stéphanie Murat avec Éric Cantona dans le rôle du rugbyman. Un téléfilm qui a été diffusé en mai dernier sur TF1.

« Dix-huit ans de silence »

C’est en 2009, après s’être rendu compte que ses deux meilleurs amis ont également été abusés sexuellement, que Sébastien Boueilh porte plainte contre son violeur, qui était aussi son entraîneur. Celui-ci sera condamné quatre ans plus tard à une peine de 10 ans prison, après trois jours de procès à Mont-de-Marsan, relatait en 2020 Actu.fr.

« Mes parents avaient tellement confiance qu’il fallait que je parte avec lui, et que je rentre avec lui pour des répétitions de musique ou des entraînements de rugby. C’est à ce moment-là qu’il me violait : cinq minutes avant de me ramener, il me violait ; cinq minutes après il buvait le café avec mes parents », raconte-t-il.

Dans son livre, le désormais coprésident de la Ciivise revient sur les « dix-huit ans de silence » qui ont suivi, ainsi que « la plongée dans un processus d’autodestruction (alcool, addiction au sexe, violence extrême) et un procès d’assises pour que sa parole se libère enfin », comme on peut le lire sur le site de son éditeur, Michel Lafon.

Un travail de sensibilisation

Sébastien Boueilh créé son association seulement quelques jours après la fin du procès, racontait-il dans une vidéo du HuffPost, à l’occasion de la sortie de son livre. Au début, son association vise uniquement les publics des clubs de rugby des Landes et de la côte basque. Mais elle grandit rapidement, si bien que son action est maintenant nationale et va bien au-delà du sport.

Mais avec toujours la même mission, précise son site officiel : « La prévention aux risques de violences sexuelles, de bizutage et de harcèlement en milieu sportif, la formation des professionnels ainsi que l’accompagnement et l’aide aux victimes restent le fer de lance de l’association. »

Car pour Sébastien Boueilh, la solution passe d’abord par la prévention. « Un enfant qui sait que son corps lui appartient, c’est un enfant qui sait se protéger face à ces situations et ces prédateurs », expliquait-il encore au HuffPost. Il faut donc « apprendre comment fonctionne un prédateur » et « parler librement de sexualité à la maison, (...) dès le plus jeune âge, avec des mots adaptés ».

D’autant qu’il estime qu’il « n’y a pas un sport qui est épargné par ce fléau » : « Du moment qu’on reçoit des enfants, il y a potentiellement des prédateurs », assurait-il. Une affirmation étayée une fois de plus par un récent documentaire d’Enquête Exclusive, qui mettait en lumière fin novembre la manière avec laquelle des pédocriminels sévissent dans le monde du football.

Selon l’ancien joueur de Dax, au minimum deux victimes d’agression sexuelle sont « libérées » à chacune de ses interventions dans les clubs sportifs ou les établissements scolaires. Un travail de prévention et de recueil de paroles qui prend cette année une nouvelle dimension, à la tête de la Ciivise.

À voir également sur Le HuffPost :

Mathias Vicherat, directeur de Sciences Po Paris, se met « provisoirement en retrait » de l’école

Le Prix Goncourt des lycéens 2023 remis à Neige Sinno pour « Triste Tigre », un roman sur l’inceste