Récréations, devoirs... Un rapport pointe les disparités d'enseignement dans les classes de CM1 et CM2

Une école primaire à Bordeaux en septembre 2016 (photo d'illustration) - MEHDI FEDOUACH / AFP
Une école primaire à Bordeaux en septembre 2016 (photo d'illustration) - MEHDI FEDOUACH / AFP

Des récréations à rallonge, des horaires d'enseignement non respectés, des évaluations limitées... Dans un rapport de l'Inspection générale de l'éducation sur l'enseignement en cours moyen - c'est-à-dire le CM1 et le CM2 - des inspecteurs tirent la sonnette d'alarme. Ils dénoncent un enseignement très variable d'une école à l'autre et formulent des recommandations pour remédier à ces inégalités de traitement.

Des récréations trop longues

Les inspecteurs se sont ainsi rendus dans 160 classes de 92 écoles situées dans 29 départements et ont repéré plusieurs points qui font l'objet de fortes disparités selon les établissements.

Tout d'abord, ils pointent un temps de récréation qui peut varier d'une heure à plus de trois heures hebdomadaires selon les écoles. "Il est à noter que ce temps de 3h15 minutes comparé au temps hebdomadaire minimal consacré aux récréations, c'est-à-dire une heure, représente sur une année scolaire (...) 81 heures d'enseignement en moins, soit le temps dédié à l'enseignement de l'histoire, de la géographie et de l'enseignement moral et civique sur une année, ou encore l'équivalent d'un peu plus de trois semaines et demie d'enseignement", écrivent les auteurs du rapport.

Ils recommandent ainsi de "cadrer plus précisément" ce temps de récréation, soit quinze minutes, avec une durée hebdomadaire maximale de deux heures "afin de garantir une meilleure équité en ce qui concerne le temps d'enseignement".

Des horaires pas toujours respectés

Au niveau des enseignements, si les volumes horaires sont atteints en français et en mathématiques dans plus de sept classes sur dix - respectivement 7h20 et 4h35 hebdomadaires - voire pour certaines dépassés, ce n'est pas le cas pour les sciences et technologie, les enseignements artistiques et l'EPS. Dans ces trois disciplines, le volume horaire est bien en-dessous des prescriptions nationales. Il est parfois même inexistant.

Pour les langues vivantes, si l'horaire attendu - soit 1h20 - est respecté dans plus d'une classe sur deux, dans 12% des classes, "la mission n'a trouvé aucune trace d'enseignement d'une langue vivante".

Mais il n'est pas question de distribuer les bons et les mauvais points, assure à BFMTV.com Caroline Pascal, cheffe de l'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche.

"Ce rapport est pour nous un outil de mesure pour nous rendre compte des réalités du terrain. Il n'a pas une visée exhaustive." 876450610001_6291543300001

Plus ou moins de travail à la maison

Autre point ciblé par le rapport: les devoirs à la maison. Si presque tous les enseignants donnent du travail oral et écrit, avec une moyenne de deux à trois items de travail par jour (un item correspond à un type de travail, oral ou écrit, comme revoir une leçon ou réaliser une opération), pour certains, c'est plus que d'autres.

"Les écarts d'une classe à l'autre sont très importants", déplorent les inspecteurs. Ils relèvent dans certaines classes aucun devoir et dans d'autres jusqu'à vingt items de travail en une semaine. Par ailleurs, ils remarquent que dans les établissements défavorisés, moins de travail à la maison est donné aux enfants.

"Il est évident que ce type de rapport montre des disparités mais ne dessine pas nécessairement la carte des inégalités sociales ou scolaires, nuance Caroline Pascal. Pour nous c'est un outil afin de proposer des solutions."

En l'occurence, sur le travail à la maison: pas plus de trente minutes par jour.

Des rédactions rares

Sur le sujet des évaluations, elles sont "rares" en dehors des mathématiques et du français, pointent les inspecteurs. Et même dans ces disciplines phares, elles "se limitent souvent à des tests bilans de fin de séquence". Les interrogations écrites très courtes sont "excessivement rares". Et dans moins d'une classe sur dix, les évaluations de français comprennent des rédactions.

Les inspecteurs dénoncent également un manque d'équipement numérique. Des ordinateurs de fond de classe sont présents dans moins de deux classes sur dix. Et dans ce cas, un à cinq postes sont disponibles. Les tablettes sont par ailleurs très rares - elles équipent seulement 9% des classes. "Le plus souvent il s'agit d'un lot de six ou dix tablettes (6% des classes observées) éventuellement partagé entre plusieurs classes."

Pour Anne Szynczak, inspectrice générale de l'éducation, du sport et de la recherche, il ne faut pas dramatiser les conclusions de ce rapport. "Il n'y a pas une accumulation de tous les travers ou demi-travers dans une école, met-elle en garde pour BFMTV.com. Dans une école, on peut manquer de matériel numérique mais respecter les volumes horaires. Cela peut aussi être le choix d'une organisation." L'objet du rapport ne serait donc pas de dessiner des pratiques universelles d'enseignement qui pourraient s'appliquer de manière uniforme.

"Une bonne pratique à un endroit n'est pas forcément la bonne ailleurs, poursuit Anne Szynczak, également responsable coordination des missions et mission premier degré. L'objectif, c'est de dessiner des pistes d'accompagnement des enseignants. Cela passe notamment par la formation continue des enseignants, comme pour les langues ou l'utilisation des outils numériques." 876450610001_6305806697112

Peu de manuels

Autre sujet pointé par le rapport: des supports pédagogiques insuffisants. En français comme en mathématiques, seules quatre classes sur dix disposent de manuels. Et ils sont "pratiquement inexistants" dans les autres matières.

"Ce faible nombre de manuels conduit à produire un grand nombre de photocopies et à utiliser des documents iconographiques en noir et blanc et souvent de piètre qualité", écrivent les inspecteurs.

Ils ont ainsi constaté "une très grande complexité" dans les outils, complexité liée à leur nombre. "Comprendre le travail réalisé par les élèves a donc parfois été particulièrement difficile", écrivent-ils. Ils citent, en mathématiques, un cahier du jour, un cahier de mathématiques, un cahier de devoirs du soir, un cahier de calcul mental ou encore une chemise dans laquelle se trouvent des constructions géométriques sur feuilles blanches. Ils regrettent également l'utilisation trop fréquente de photocopies et feuilles volantes et préconisent l'usage des cahiers et manuels.

Article original publié sur BFMTV.com