"Les risques sont réels": l'AIEA se prépare à une visite de la centrale nucléaire de Zaporijia

"Les risques sont réels": l'AIEA se prépare à une visite de la centrale nucléaire de Zaporijia

C'est une enclave de l'armée russe, nichée dans un territoire que contrôlent encore les soldats ukrainiens. Et pour le Kremlin, cette prise de guerre - qui remonte déjà au 4 mars - est cruciale: il s'agit de la centrale nucléaire de Zaporijia. Tandis que les deux camps se disputent le terrain, les bombardements, frappes, et assauts qui s'y sont déroulé ces dernières semaines font craindre une catastrophe à la communauté internationale.

"Les risques sont réels", a commenté ce jeudi Rafael Mariano Grossi, directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), invité de France 24.

"Il y a eu des attaques, des bombardements", a-t-il rappelé, assurant même: "Les opérations militaires se sont aggravées." Des attaques dont il a souligné qu'elles étaient "inacceptables".

De surcroît, la menace tient aussi selon lui à l'alliage instable entre l'envahisseur et le personnel exerçant sur les lieux: "C’est une installation importante, c’est la centrale la plus grande d’Europe qui est occupée par les forces russes, mais où ce sont les opérateurs ukrainiens qui opèrent donc déjà c'est une situation sans précédent."

Rafael Mariano Grossi a relevé un dernier péril: "Il existe toujours la possibilité d’une interruption de l’approvisionnement électrique de la centrale qui pourrait mener à l’interruption du système de refroidissement de la centrale."

Une visite imminente de l'AIEA

Le directeur de l'AIEA, qui s'est entretenu avec Emmanuel Macron dans la matinée, était toutefois porteur d'une bonne nouvelle. Son agence a finalement obtenu l'"accord de principe" des deux ennemis mais aussi des institutions internationales pour se rendre sur place.

"C’est pour très vite, d’ici quelques jours", a-t-il promis. "Il n’y a plus de blocage, il y a eu des doutes, des objections politiques des deux côtés mais nous en sommes arrivés à un stade où nous sommes tout près d’une acceptation totale des deux côtés", a-t-il expliqué.

Sa récente intervention au Conseil de sécurité de l'ONU lui a permis de mesurer le consensus autour de l'importance de sa mission. "Tout le monde disait une chose : ‘L’agence doit y aller’. On en arrive à un point où on ne peut pas risquer, en plus du drame de la guerre, un accident nucléaire", a lancé Rafael Mariano Grossi.

Les enjeux de l'inspection

Outre la prévention d'un tel cataclysme, le directeur de l'AIEA a listé les enjeux de cette visite d'inspection imminente. En premier lieu, il s'agira d'attribuer la paternité des bombardements perpétrés sur la centrale alors que Russes et Ukrainiens s'en rejettent la responsabilité. "Des accusations mutuelles se croisent. De là, la nécessité de la présence de l’inspecteur nucléaire globale qui est l’agence", a-t-il observé.

D'après le dirigeant argentin, cette présence pourra de plus décourager ces agressions: "La manière de stabiliser la situation, c’est d’avoir une présence internationale sur place. Le président Macron a été en contact avec le président Zelensky, le président Poutine et moi-même. On a essayé de trouver le minimum politique pour entamer la partie technique."

En avoir le cœur net

Il existe encore d'autres inquiétudes autour des menées russes dans la centrale de Zaporijia. Les Ukrainiens soupçonnent Moscou d'y entreposer des armes lourdes, ou de vouloir la soustraire au réseau électrique ukrainien et européen pour alimenter la Crimée. "Laissez-moi y aller et on verra. C’est une de mes tâches de constater si c’est vrai ou pas", s'est borné à rétorquer sur ces points Rafael Mariano Grossi.

Enfin, il a précisé la forme que prendrait les conclusions de cette visite - laissant transparaître la fonction purement consultative de celle-ci: "On fait un rapport, on aura des recommandations pour la communauté internationale, en espérant que les parties y donneront suite."

Article original publié sur BFMTV.com