"Une responsabilité particulière": plus de 500 scientifiques demandent à la France de freiner les importations de cuisses de grenouilles

Un appétit vorace qui menace la biodiversité. 557 chercheurs français et étrangers ont écrit une lettre ouverte au président Emmanuel Macron mercredi 6 mars appelant la France à réduire les importations de cuisses de grenouilles venues notamment d'Asie. Un commerce qui menace certaines espèces.

"Nous demandons à la France, en tant que principal pays consommateur, de prendre des mesures pour que ce commerce soit contrôlé par la Convention CITES sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction afin de surveiller et d'assurer le commerce durable des taxons et des populations concernés", demandent les scientifiques.

"Nous considérons que la France a une responsabilité particulière et devrait prendre cette initiative", soulignent-ils.

Parmi les signataires, on compte des spécialistes du monde entier exerçant principalement en France, mais aussi en Allemagne, aux États-Unis ou encore en Inde.

Plus de 4.000 tonnes importées par an dans l'UE

Dans leur courrier, les scientifiques rappellent que 4.070 tonnes de cuisses de grenouilles congelées sont importées dans l'Union européenne chaque année. Elles alimentent de nombreux pays, mais la France est le plus gros consommateur.

Problème, pour les scientifiques, ces animaux sont issus "en grande majorité de populations sauvages", et "en particulier d'Indonésie, de Turquie, d'Albanie et du Vietnam".

En raison de leur chasse importante, plusieurs espèces et populations connaissent déjà un déclin significatif", s'inquiètent les experts. Parmi elles, la grenouille mangeuse de crabe (Fejervarya cancrivora) et la grenouille des rizières (Fejervarya limnocharis), dont les populations ont baissé ces dernières années.

Un déclin des espèces qui menace les écosystèmes

Ces évolutions ne sont pas anodines. "Les grenouilles jouent un rôle crucial dans le fonctionnement des écosystèmes et les prélèvements perturbent ces fonctions", rappellent-ils.

Les scientifiques mentionnent notamment leur rôle de "contrôle" des "parasites, y compris ceux qui peuvent affecter la santé des populations humaines". "Dans le même temps, les grenouilles peuvent être des bioindicateurs, leur présence étant une source d'informations sur l'état de santé d'un écosystème", ajoutent-ils.

Pour freiner ce phénomène, les experts demandent donc "instamment à la France de développer des propositions d'inscription des espèces et les groupes d'espèces concernés afin de préparer une base politique et formelle de discussions pour que des restrictions du commerce international assurent la surveillance, la réglementation et donc la durabilité du commerce des cuisses de grenouilles".

Plus de 40 ONG également mobilisées

En plus de la lettre des scientifiques, 42 ONG françaises et internationales ont également écrit un courrier le 26 janvier dernier aux ministres chargés de l'environnement dans les 27 États membres de l'Union européenne.

Parmi eux, on compte notamment l'association française Robin des Bois, Pro Wildlife, la fondation Brigitte Bardot, France Nature Environnement, la Ligue pour la Protection des Oiseaux ou encore PETA.

Dans cette lettre, les associations demandent aux ministres de "mettre fin aux importations incontrôlées des cuisses de grenouilles" et "de proposer en 2025 lors de la prochaine Conférence des Parties à la CITES, l’inscription à l’Annexe II des espèces de grenouilles dont les cuisses sont importées en Europe à des fins culinaires", ce qui permettrait d'imposer un "contrôle du commerce international" des cuisses de grenouilles.

"Elles en appellent également à la suspension des importations en raison des méthodes de mise à mort inacceptables et cruelles".

Article original publié sur BFMTV.com