Pour la rentrée, on a demandé à des profs d’école et de collège comment ne pas être un parent d’élève relou

Depuis la pandémie de Covid, certains parents ont aussi pris l’habitude de solliciter les enseignants beaucoup plus fréquemment.
Depuis la pandémie de Covid, certains parents ont aussi pris l’habitude de solliciter les enseignants beaucoup plus fréquemment.

PARENTS - Les relations entre les enseignants et les parents d’élèves sont l’une des clefs de la réussite scolaire des enfants. En cette rentrée scolaire, on a demandé à des professeurs ce qui peut parfois les agacer dans le comportement des parents. Voici leurs réponses et leurs conseils pour fluidifier les rapports profs-parents.

Première chose : n’oubliez pas que les profs ont, eux aussi, une vie. Depuis la pandémie de Covid, certains parents ont pris l’habitude de solliciter les enseignants beaucoup plus fréquemment qu’avant. « Ils nous contactent à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, via la messagerie de l’ENT, exigeant une réponse immédiate », détaille Nora, 45 ans, professeure d’espagnol dans le secondaire à Lyon.

Même son de cloche du côté de Mathilde, 38 ans, institutrice dans le XIXe arrondissement de Paris. Une année, la mère d’une élève a commencé à l’appeler tous les soirs. « Elle me demandait les devoirs qu’il y avait à faire, parfois à 19 heures, se souvient-elle. Ça peut arriver que les enfants ne notent pas bien les devoirs, mais dans ce cas ils peuvent appeler une autre famille ou mettre un mot dans le cahier de correspondance. »

Les deux enseignantes soulignent évidemment l’importance des échanges et de la communication, pendant les horaires de travail. Répondre aux interactions proposées par le professeur, notamment via les applications ou messageries dédiées, est par exemple une bonne idée. « Certains profs utilisent “TouteMonAnnée” pour poster des infos, des photos, raconte Mathilde. Mais la plupart des parents ne réagissent jamais à ce qui est publié, pas de likes, ni de commentaires, rien. »

Non, votre enfant n’est pas parfait

Autre comportement qui agace les enseignants : les parents qui considèrent - ou en tout cas affirment - que leur enfant est parfait. « L’année dernière, un petit a mordu un de mes élèves à travers sa doudoune et son sweat, jusqu’au sang. Le gamin, je lui ai dit : tu es un loup. Je l’ai puni, j’ai mis un mot à ses parents, relate Mathilde. Le lendemain, la mère est allée voir ma directrice pour dire que son fils n’avait rien fait. Certains ne supportent pas que quelqu’un d’autre engueule leur enfant. »

Si votre enfant n’a pas les notes que vous espériez pour lui, ce n’est pas non plus forcément dû à la méthode d’enseignement des profs, mais peut-être à son niveau d’investissement, rappelle Nora. Et surtout, si une note vous déçoit, il ne sert à rien de faire pression sur l’enseignant pour la changer. Nora a déjà vécu ça. « Le parent d’un élève de Terminale avait tenté de me soudoyer pour que je modifie l’appréciation sur ses bulletins, pour que son fils ait un meilleur dossier postbac », se souvient celle qui a immédiatement rejeté la requête.

Par ailleurs, gardez aussi en tête qu’il existe différentes méthodes pédagogiques et essayez de faire confiance à celle choisie par l’enseignant. « En lecture, on peut recevoir ce type de commentaire : “Ah mais votre collègue qui a le même niveau que vous a déjà fait le présent des verbes en ER et pas vous, comment ça se fait ?” », détaille Mathilde.

Choisir des vêtements pratiques pour ses enfants

Parfois, Mathilde a l’impression que le bon sens des parents s’est perdu au fil des années. « On est de plus en plus obligés de les driver », souligne-t-elle. Et de lister les moindres détails des consignes.

L’institutrice parisienne insiste par exemple sur la tenue vestimentaire inadaptée de certains enfants. « Certains gamins arrivent avec des habits hyper chers, comme un manteau Nike à 200 €. Et comme les parents ne marquent pas le nom de leur enfant sur leurs affaires, certaines finissent par se perdre, raconte Mathilde. Donc ils râlent et on cherche toujours un peu, mais on ne peut pas faire le tour des manteaux des 200 élèves. »

D’autres parents ne conçoivent pas l’aspect « pratique » des vêtements pour l’école. « En maternelle, une maman m’avait reproché le fait que sa fille soit rentrée tachée de peinture. J’avais beau leur avoir mis des tabliers, la petite s’était salie, se souvient Mathilde. C’était un très beau pull, genre Cyrillus. Et la mère m’avait engueulée. Je lui avais expliqué que ces vêtements-là, il fallait les garder pour le week-end ou le mercredi. »

Autre exemple : les parents qui mettent des salopettes ou des vêtements compliqués à retirer à des enfants de maternelle. « Pour aller faire pipi, c’est pas possible », résume-t-elle. Elle se souvient de la mode des « jeans skinny », il y a quelques années. « On se retrouvait en sport avec des gamins qui n’arrivaient pas à courir tellement leurs jeans étaient serrés ! Il faut qu’ils soient en jogging ou legging, mais certains parents zappent », note-t-elle.

« Il ne faut pas rester sur des incompréhensions »

De manière générale, le maître-mot de la relation entre parents et profs est bien entendu la communication, mais dans un cadre défini. « Il ne faut surtout pas que les parents se plaignent au prof devant leur enfant, rappelle Mathilde. S’ils ont quelque chose à nous dire, qu’ils nous le disent, mais en écrivant un mot ou en demandant un rendez-vous. Il ne faut pas rester sur des incompréhensions. » Ayant elle-même deux filles, elle reconnaît que certains enfants « ne racontent que leur version des choses », d’où l’intérêt de dialoguer pour dédramatiser une situation.

« Parfois, on a du mal à se comprendre avec les parents d’élèves. Mais c’est parce qu’on est dans l’école et que l’on a des attentes vis-à-vis d’eux qu’ils ne connaissent pas », concède-t-elle. Elle enseigne depuis quinze ans et a pu observer les parents d’élèves au fil des années. Ce qu’elle regrette le plus : le manque d’implication et la sensation que « tout leur est dû ».

« Qu’ils n’hésitent pas à dire aussi quand ça va bien »

« Certains ne se comportent plus comme des usagers du service public mais comme des clients. C’est terrible, souligne-t-elle. L’année dernière, on a organisé une classe verte, ce qui a engendré du travail en plus et une responsabilité monstrueuse. Et lorsqu’on est rentrés, les parents d’élèves ont exigé qu’il y en ait tous les ans. Sauf que non. Ce sont des heures sup’ bénévoles, pour les enseignants. »

Même son de cloche chez Nora. « Ce sentiment de clientélisme est de plus en plus partagé, confirme-t-elle. Certains arrivent et demandent à vous voir sans avoir pris rendez-vous. D’autres font louper des jours de cours à leur enfant pour partir en vacances et s’attendent à ce que l’on envoie des cours et qu’on lui fasse rattraper son retard à son retour. »

Les parents préférés des enseignants ? Ceux qui participent à la vie scolaire de leur enfant et sont présents, sans en faire trop. « Qu’ils n’hésitent pas à dire aussi quand ça va bien ou que leur enfant a aimé telle activité, ajoute-t-elle. Ça valorise un peu notre travail et ça motive, en tant que prof, à continuer à faire des projets et des sorties. »

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