Raid à l'ambassade mexicaine de Quito: la CIJ rejette une demande de Mexico

Le président de la Cour, Nawaf Salam (c), arrive au premier jour de l'audience sur la requête déposé par le Mexique contre l'Équateur à la CIJ, le 29 avril 2024 à La Haye (Remko de Waal)
Le président de la Cour, Nawaf Salam (c), arrive au premier jour de l'audience sur la requête déposé par le Mexique contre l'Équateur à la CIJ, le 29 avril 2024 à La Haye (Remko de Waal)

La plus haute juridiction de l'ONU a rejeté jeudi une demande de mesures d'urgence du Mexique après le raid policier mené en avril contre son ambassade à Quito, affirmant que l'Équateur avait donné l'assurance que la mission diplomatique serait protégée.

Des policiers ont pénétré le 5 avril à l'intérieur de l'ambassade mexicaine dans la capitale équatorienne pour y arrêter l'ancien vice-président Jorge Glas, visé par un mandat d'arrêt pour corruption, qui s'y était réfugié.

Le Mexique a rompu ses relations diplomatiques avec Quito après l'assaut, qui a provoqué un tollé international, et déposé une requête devant la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, aux Pays-Bas.

Mexico, estimant que l'Equateur a violé le droit international, réclamait des mesures d'urgence en attendant un jugement sur le fond de l'affaire, qui peut prendre des années.

"La Cour considère que les assurances fournies par (...) l'Equateur répondent aux préoccupations exprimées par le Mexique dans sa demande", a déclaré Nawaf Salam, juge président de la CIJ.

"La cour conclut que les circonstances, telles qu'elles se présentent acutellement à elle, ne sont pas de nature à exiger l'exercice de son pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires", a-t-il ajouté.

La CIJ se prononçait jeudi sur une demande de mesures d'urgence du Mexique pour protéger son ambassade et ses autres locaux diplomatiques à Quito et permettre au gouvernement mexicain de les libérer.

Quito a assuré accéder à ces demandes, a déclaré le juge.

"L'Équateur maintient ses assurances et nous saluons la décision de la cour", a déclaré devant les journalistes Andrés Terán Parral, ambassadeur de l'Equateur aux Pays-Bas.

Le Mexique s'est aussi dit "très satisfait" de la décision, qui "signifie que nous pouvons compter non seulement sur la crédibilité de l'Équateur, mais aussi sur les assurances et les obligations légales devant la cour pour savoir que notre ambassade ne sera plus violée", a affirmé le représentant du Mexique, Alejandro Celorio Alcantara.

Ce verdict est une "première étape" vers une normalisation des relations entre les deux pays, a-t-il affirmé.

- Ligne rouge -

Les juges se pencheront ultérieurement sur le fond de l'affaire. Dans sa requête, Mexico demande à la CIJ de "suspendre l'Equateur en tant que membre des Nations unies" jusqu'à ce qu'il présente des excuses publiques.

Le Mexique souhaite également que les magistrats déclarent que cette juridiction est l'organe judiciaire approprié pour déterminer la responsabilité d'un Etat "afin d'engager un processus d'expulsion" de l'ONU.

Le pays a fondé sa requête sur la Charte des Nations unies, sur le Pacte de Bogota de 1948 - dont le but est d'obliger les Etats signataires à régler leurs différends de façon pacifique - et sur la Convention de Vienne de 1961 qui garantit la protection du personnel diplomatique.

Lors d'une audience en avril, le Mexique a déclaré que l'Equateur avait franchi une ligne rouge avec son raid, créant un précédent déconcertant dans les relations diplomatiques mondiales.

L'Equateur a assuré que le raid était survenu dans des "circonstances très exceptionnelles" et visait uniquement à traduire en justice un fugitif.

L'Equateur a par ailleurs présenté sa propre requête devant la CIJ contre le Mexique pour violation d'"une série d'obligations internationales" après l'asile accordé à M. Glas.

Jorge Glas, vice-président équatorien de 2013 à 2017, a été arrêté à l'ambassade pour des accusations de détournement de fonds liés à des contrats de travaux publics attribués après le séisme de 2016 en Equateur.

Il a également été reconnu coupable dans une autre affaire de fraude en 2017.

Le raid, qui a eu lieu quelques heures après que le Mexique a accédé à la demande d'asile politique de M. Glas, a été condamné par plusieurs Etats d'Amérique latine, l'Union européenne, les Etats-Unis et le secrétaire général de l'ONU.

M. Glas se trouve dans la prison de Guayaquil en Equateur. Ses avocats essaient d'empêcher l'extraction des données de deux téléphones portables et d'un iPad saisis lors de son arrestation.

cvo/ybl