Résultats Législatives 2022: avec plus de 80 députés, le RN s'offre un succès sans précédent

Le parti d'extrême droite dépasse Les Républicains, obtient un groupe puissant, refait ses finances et offre à Marine Le Pen une victoire personnelle.

POLITIQUE - C’est tout simplement historique, et ça annonce des combats féroces au Palais Bourbon. Ce dimanche 19 juin, le Rassemblement national sort de manière fracassante des marges parlementaires, en s’imposant comme la surprise de ce deuxième tour des élections législatives, avec plus de 82 sièges et jusqu’à plus de 102 députés à l’Assemblée nationale selon les estimations.

“Nous avons atteint les trois objectifs que nous nous étions fixés: faire d’Emmanuel Macron un président minoritaire (...), poursuivre la recomposition politique indispensable (...) et constituer un groupe d’opposition déterminant”, a savouré Marine Le Pen depuis son fief d’Hénin-Beaumont. “Nous incarnerons une opposition ferme, sans connivence, responsable, respectueuse des institutions, parce que notre seule boussole, c’est l’intérêt de la France et du peuple français”, a-t-elle ajouté, tout sourire.

Non seulement le parti d’extrême droite dépasse Les Républicains (ce qui en soit inédit aux législatives), mais il disposera d’un large groupe au Palais Bourbon. Du jamais vu depuis les élections législatives de 1986, où le Front national de Jean-Marie Le Pen avait obtenu 35 députés. Mais dans des conditions bien différentes, parce qu’il s’agissait à l’époque d’une proportionnelle intégrale, et non d’un scrutin uninominal qui a souvent empêché la toile lepéniste de trop s’étendre sur la vie parlementaire française.

Victoire et bouffée d’oxygène

Un plafond de verre qui a littéralement explosé ce dimanche, faisant entrer le parti lepéniste dans une autre dimension. Celle des forces politiques majeures avec lesquelles il faudra compter au Palais Bourbon. Sur le plan symbolique, Marine Le Pen et les députés RN ne siégeront plus avec les non-inscrits, mais disposeront de leurs propres bancs. Et donc, de leurs propres prérogatives. Ils bénéficieront d’un temps de parole consacré et élargi et se verront attribuer plusieurs postes clés au Palais Bourbon, du Bureau de l’Assemblée nationale aux commissions permanentes (finances, affaires étrangères, etc.).

Sur le plan politique, la formation d’extrême droite disposera aussi de nouveaux leviers, comme la création de commissions spéciales ou la possibilité de mettre ses propres sujets à l’agenda (et donc au débat) via les niches parlementaires.

L’autre avantage est d’ordre matériel, puisque le RN disposera de moyens financiers pour faire fonctionner le groupe, ainsi que des locaux, bureaux et collaborateurs qui seront spécialement alloués. Cerise sur le gâteau parlementaire, les subventions publiques accordées aux partis en fonction du nombre de sièges obtenus. Ce qui, pour un RN lourdement endetté, est une bouffée d’oxygène, comme le souligne un journaliste de L’Obs dans le calcul ci-dessous.

Caisse de résonance

Une réelle victoire pour Marine Le Pen qui, malgré une campagne poussive et des candidatures révélant les failles structurelles du parti lepéniste, permet à sa formation de faire résonner encore plus fort ses idées dans l’enceinte d’un Palais Bourbon qui résistait jusque-là à sa progression électorale, en plus de conforter sa stratégie de “normalisation” en vue de conquérir le pouvoir. Un véritable tour de force alors que c’est la NUPES de Jean-Luc Mélenchon qui attirait l’attention politico-médiatique durant la campagne.

En 1988, comme le souligne L’Express, Jean-Marie Le Pen et ses troupes avaient déposé 63 propositions de loi, dont le rétablissement de la peine de mort ou l’instauration de la “préférence nationale”. De quoi avoir un aperçu de la force de frappe dont pourra faire usage le RN, qui a déjà fait de l’Assemblée une caisse de résonance de ses obsessions.

On citera pour exemple la proposition de loi portée par Sébastien Chenu contre l’écriture inclusive. À la condition d’être à la hauteur des exigences de l’Assemblée nationale. Ce qui, entre cafouillage et une participation peu flatteuse, était loin d’être le cas lors de la précédente mandature pour celle qui ambitionne de présider le groupe du Rassemblement national à l’Assemblée, 36 ans après son père. En s’offrant le luxe de doubler le nombre de députés dans un mode de scrutin autrement plus difficile.

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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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