Sur la réforme des retraites, Macron et Borne au défi d’une semaine cruciale

Sur la réforme des retraites, Emmanuel Macron et Élisabeth Borne au défi d’une semaine cruciale (Photo d’illustration : Élisabeth Borne et Olivier Dussopt le 31 janvier à l’Assemblée nationale).
STEPHANE DE SAKUTIN / AFP Sur la réforme des retraites, Emmanuel Macron et Élisabeth Borne au défi d’une semaine cruciale (Photo d’illustration : Élisabeth Borne et Olivier Dussopt le 31 janvier à l’Assemblée nationale).

POLITIQUE - La course d’obstacles se poursuit pour le gouvernement. La réforme des retraites arrive ce lundi 6 février dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. Un texte phare, l’un des plus importants des deux quinquennats Macron, mais très impopulaire dans l’opinion publique, largement décrié par les syndicats et porté par un ministre du Travail, Olivier Dussopt, fragilisé au pire des moments par des soupçons de « favoritisme » dans l’attribution d’un marché public lorsqu’il était maire d’Annonay.

Malgré cette mauvaise passe, et cette défiance quasi généralisée, l’équation est simple pour l’exécutif. D’une part, Élisabeth Borne « n’envisage pas » l’hypothèse de dégainer comme à l’automne le 49.3. Le gouvernement et la majorité en sortiraient « politiquement affaiblis », selon les mots de la députée Renaissance Stéphanie Rist, la rapporteure du projet de loi, lors d’une rencontre avec l’Association des journalistes de l’information sociale jeudi 2 février.

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De l’autre, il est « impossible » pour l’exécutif de renoncer, expliquait un cadre de la majorité au HuffPost après les dernières manifestations, car « si le gouvernement devait reculer demain sur les retraites, je ne vois pas comment il pourrait réformer pour le reste du quinquennat. » Dès lors, charge à la locataire de Matignon et à ses ministres de convaincre une majorité de députés, et ceci pour chaque vote. Pas si simple.

L’incertitude LR

En réalité, les marges pour faire adopter la réforme à l’Assemblée se sont dangereusement rétrécies pour Élisabeth Borne au fil des jours. D’abord les députés LR qui font monter les enchères, puis les états d’âme d’une poignée d’élus du camp présidentiel : les pronostics sur les scrutins à venir sont délicats, les uns et les autres assurent qu’ils trancheront en fonction des « améliorations » apportées lors du débat parlementaire.

Dans le détail, le camp présidentiel dispose de 250 voix (170 députés Renaissance, 51 Modem, 29 Horizons), soit 39 voix sous le seuil de la majorité absolue. À l’inconfort de cette majorité relative s’ajoute la menace d’embarrassantes défections, dont certaines au sein même du groupe macroniste Renaissance.

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Tour à tour, des voix internes se sont élevées pour critiquer le projet, à l’image de l’ancienne ministre Barbara Pompili, de son collègue Patrick Vignal, ou de plusieurs élus de la formation philippiste Horizons. Rentreront-ils dans le rang, comme l’assurent des cadres de la majorité ? Si ce n’était pas le cas, une dizaine de voix pourraient manquer aux troupes du chef de l’État lors d’un vote final.

Dans ce contexte, avec d’un côté 240 voix favorables à peu près garanties, de l’autre au moins 256 « contre », les intentions des 62 députés LR seront d’autant plus déterminantes pour l’issue des différents scrutins. Et on ne peut pas dire que le groupe présidé par Olivier Marleix se soit montré très rassurant pour le gouvernement, dimanche, à la veille de l’ouverture des débats.

Une première séance test

La Première ministre n’a pas attendu l’arrivée du texte dans l’hémicycle pour essayer de les convaincre. Elle leur a donné satisfaction, en partie, sur un des points les plus décriés, en annonçant au JDD une extension du dispositif de carrières longues aux personnes ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans. Elles pourront donc partir à la retraite à 63 ans, et non 64 ans. Opération ratée.

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Les quelques élus déjà hostiles au texte qui se sont exprimés dimanche ont jugé la proposition d’Élisabeth Borne largement insuffisante. Aurélien Pradié, le député le plus identifié parmi eux, voit même dans le geste de la Première ministre « une tromperie qui ne respecte ni les Républicains, ni les Français », selon ses mots sur les réseaux sociaux. Reste à savoir, là aussi, si les chefs du parti, plus favorables à la réforme en l’état, réussiront à convaincre la dizaine de leurs collègues qui y restent opposés.

En attendant, les premières heures de discussions lundi promettent de donner un bon aperçu de l’état des rapports de force au Palais Bourbon. Les députés vont effectivement commencer la séance en examinant des motions demandant un référendum ou un rejet pur et simple de la réforme. Ils passeront ensuite à l’examen des articles et des 20 000 amendements déposés… pour lesquels chaque vote risque d’être serré.

De quoi promettre une ambiance électrique, comme un écho aux manifestations qui vont traverser la France, mardi, pour le troisième acte de la mobilisation sociale, et le deuxième jour de l’examen en plénière à l’Assemblée. Seule bouffée d’air pour la majorité dans cette séquence délicate : une journée réservée au groupe PS au Palais Bourbon, jeudi, au cours de laquelle les socialistes peuvent déterminer l’ordre du jour. Les joutes sur les retraites seront donc en pause… pour laisser la place à un débat sur les superprofits, notamment. « What a week, huh ? » comme diraient certains.

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