La quête d’un travail qui a du sens peut rendre fou

Katrin Wilkens se présente comme journaliste, mais c’est aussi en tant que directrice d’une agence de ressources humaines (RH) à Hambourg, où elle conseille les personnes dans leur carrière, qu’elle a pris la plume dans les pages de Die Zeit pour critiquer la quête constante de sens au travail. En effet, elle a accompagné plus de 2 500 personnes, souvent en plein désarroi, insatisfaites professionnellement ou épuisées. “Chaque année, je dois en envoyer un nombre toujours croissant directement en hospitalisation ambulatoire à la clinique de soins aigus en psychiatrie, écrit-elle. Parfois, j’appelle leurs médecins de famille parce que j’ai peur qu’ils se fassent du mal. Ils sont assis devant moi, impuissants, abattus, pleurant assez souvent, parce qu’ils attendent de leur ancien travail (ou du nouveau qu’ils espèrent) quelque chose qu’il peut difficilement leur donner : un sens.”

Selon Katrin Wilkens, la quête de sens au travail est un phénomène très propre à notre époque, marquée par une nouvelle idéologie “WeWork”. La génération des baby-boomers, occupés à la reconstruction économique, ne se souciait pas de cette question existentielle, contrairement à leurs enfants et petits-enfants qui affichent fièrement des maximes de développement personnel dans leur cuisine et sur leur page LinkedIn. Cela ne se joue pas uniquement au niveau individuel : de très nombreuses entreprises, comme Deloitte, Mercedes et Starbucks, affichent leurs “buts”, leurs “professions de foi”, leur “ADN de marque”. Le travail est censé permettre la réalisation de soi dans un but noble, et l’entreprise est souvent présentée comme une famille.

Un mécanisme pour exploiter les salariés

“Oubliez tout ça ! exhorte Katrin Wilkens. La simple vérité est la suivante : trop de sens vous rend malade.” En effet, en Allemagne, le nombre de congés maladie a augmenté, notamment en raison d’une santé mentale plus fragile chez les travailleurs. Penser que le travail doit avoir un sens, nous combler, voire nous définir est une illusion qui peut rendre fou.

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