Présidentielle américaine 2024 : Ron DeSantis veut battre Donald Trump mais sa stratégie interroge

Le gouverneur de Floride Ron DeSantis, ici le 14 avril 2023, n’a pas encore annoncé sa candidature à la présidentielle 2024 mais se place déjà comme le principal opposant de Donald Trump du côté républicain.
Le gouverneur de Floride Ron DeSantis, ici le 14 avril 2023, n’a pas encore annoncé sa candidature à la présidentielle 2024 mais se place déjà comme le principal opposant de Donald Trump du côté républicain.

ÉTATS-UNIS - Il ne s’est même pas encore déclaré candidat et pourtant, il est déjà vu comme le principal opposant à Donald Trump dans la bataille des primaires républicaines pour la présidentielle de 2024. Ron DeSantis, le jeune gouverneur de Floride, veut incarner le futur du parti face à l’ex-président de 76 ans embourbé dans les affaires... Mais tout ne semble pas encore gagné.

Attaques contre Disneyland et sa « culture woke », limitation du droit à l’avortement, élargissement du droit au port d’arme, expulsion par avion de migrants vers l’île huppée de Martha’s Vineyard... Depuis des mois Ron DeSantis, catholique marié et père de deux enfants, tente d’incarner le parfait candidat républicain, un Donald Trump sans les scandales pour conquérir le cœur des électeurs les plus à droite.

Autre terrain sur lequel le républicain de 44 ans aime jouer : l’éducation. Ce mercredi 19 avril, il a d’ailleurs étendu à tous les niveaux scolaires de son État sa très controversée loi surnommée « Don’t Say Gay » (Ne parlez pas des gays), qui interdit l’enseignement de sujets en lien avec l’orientation sexuelle ou l’identité de genre.

La machine DeSantis se grippe

Ces politiques sulfureuses, ajoutées à sa lutte très peu contraignante contre Covid, ont conquis les habitants de Floride qui l’ont réélu lors des midterms de novembre dernier avec près de 60 % des voix. Un raz-de-marée, alors qu’il avait remporté l’élection d’un cheveu quatre ans plus tôt... notamment grâce au soutien de Donald Trump.

La machine DeSantis, si efficace au niveau local, semble toutefois se gripper ces dernières semaines au-delà des frontières du Sunshine State. Le 15 avril dernier, le richissime entrepreneur et donneur républicain Thomas Peterffy a annoncé dans le Financial Times avoir renoncé temporairement à aider financièrement Ron DeSantis « à cause de ses positions sur l’avortement et l’interdiction de certains livres » dans les écoles.

Il faut dire que la stratégie du gouverneur de Floride, très ancrée à droite afin de siphonner les supporters les plus radicaux de Donald Trump, pourrait se retourner contre lui au moment de convaincre les Américains plus modérés. C’est ce que montre un sondage de l’agence de presse Reuters avec Ipsos paru fin mars.

Ce dernier révèle que seulement un tiers des électeurs soutiendrait un prétendant à la Maison Blanche qui défendrait des restrictions sévères en matière d’avortement et autoriserait le port d’arme sans licence. « Si un candidat mène sa campagne avec ces thèmes-là, les démocrates auront un avantage » à la présidentielle, tranche William Frey, un expert des sondages membre du cercle de réflexion Brookings Institution, interrogé par Reuters.

Trump reste en tête des sondages pour la primaire

« DeSantis fait du Trump radical, notamment en menant sa guerre culturelle contre Disney, ce qui n’est d’ailleurs pas forcément un pari gagnant. Ce qui est sûr en revanche, c’est que ça va poser problème au niveau des élections générales », confirme au Huffpost Jérôme Viala-Gaudefroy, chargé de cours à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye et spécialiste des États-Unis.

Avant même l’élection générale, l’homme d’affaires Thomas Peterffy s’interroge déjà sur la capacité de Ron DeSantis à battre Donald Trump aux primaires républicaines. Selon le milliardaire, le gouverneur de Floride aurait « perdu une partie de l’élan » qui faisait de lui un si bon candidat face à l’ancien président.

Les deux graphiques ci-dessous, réalisés par l’institut de sondage The Morning Consult, résument parfaitement la situation. Sur la pente ascendante depuis mai 2021 et encore plus après son énorme succès aux midterms, Ron DeSantis (en bleu sur le deuxième tableau) n’a pas réussi à transformer l’essai. Au contraire, l’écart se creuse avec l’ancien président (en rouge) qui domine toujours très largement la course malgré son arrestation dans l’affaire Stormy Daniels.

Sondages pour les primaires républicaines entre novembre 2020 et novembre 2022. Trump est en rouge, DeSantis en orange.
Sondages pour les primaires républicaines entre novembre 2020 et novembre 2022. Trump est en rouge, DeSantis en orange.
Les sondages sur le candidats ou potentiels candidats aux primaires républicaines. La ligne rouge correspond à Donald Trump, la ligne bleu à Ron DeSantis.
Les sondages sur le candidats ou potentiels candidats aux primaires républicaines. La ligne rouge correspond à Donald Trump, la ligne bleu à Ron DeSantis.

« Si une partie du parti veut se débarrasser de Trump, qui est une machine à perdre, la base pro-Trump adhère encore complètement à ses idées. Il pourrait être mis en examen dans le futur et cela lui serait encore bénéfique, car son discours de victimisation marche très bien auprès de son électorat », explique Jérôme Viala-Gaudefroy.

Une candidature attendue en mai

C’est dans ce contexte que Thomas Peterffy a avoué être « plus réticent » à soutenir Ron DeSantis. « (Mes amis et moi) attendons de voir qui, parmi les candidats aux primaires, est le plus capable de gagner l’élection générale, pour lui donner toute la puissance de feu que nous pouvons », a-t-il donc décidé. Et il n’est pas le seul à s’interroger sur la capacité du gouverneur à faire face à l’ouragan Trump.

Pour l’instant, aucun élu républicain de Floride au Congrès américain ne lui a apporté son soutien. Pire, quatre ont choisi le camp du « Make America Great And Glorious Again ». De quoi affoler l’équipe du potentiel candidat, qui a appelé directement plusieurs d’entre eux afin de stopper l’hémorragie, comme l’a révélé NBC le 13 avril.

Cette fuite pourrait peut-être prendre fin avec l’annonce de sa candidature officielle, attendue en mai, voire en juin. Donald Trump a de son côté bien compris la menace que représentait DeSantis, une de ses stratégies d’attaque consistant à le surnommer « Meatball Ron » (Ron boulette de viande) ou « Ron DeSanctimonious » (Ron l’hypocrite). La guerre entre les deux hommes est déjà déclarée.

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