Pourquoi Nordahl Lelandais est de retour devant la justice

Pourquoi Nordahl Lelandais est de retour devant la justice

Charlotte*, cousine de Nordahl Lelandais, est "rongée par la culpabilité". Cinq mois après l'avoir agressée sexuellement, l'ancien maître-chien enlève et tue Maëlys, 8 ans, lors d'une fête de mariage à Pont-de-Beauvoisin (Isère) dans la nuit du 26 au 27 août 2017. "Si j'en avais parlé plus tôt, peut-être que la petite Maëlys serait encore en vie", regrette Charlotte qui n'a osé parler que plusieurs années après les faits.

Nordahl Lelandais va donc faire son retour sur le banc des accusés, ce lundi 27 novembre, seulement un an après avoir été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de la petite fille. L'homme, âgé de 40 ans aujourd'hui, sera jugé par le tribunal correctionnel de Charleville-Mézière (Ardennes) pour "agression sexuelle sur mineur de 15 ans" et "menace ou acte d'intimidation pour déterminer une victime à ne pas porter plainte ou à se rétracter".

"J'avais peur qu'il revienne pour me tuer"

Retour le 16 mars 2017. Ce jour-là, ce sont les obsèques du père de Charlotte. Les proches se sont réunis au domicile familial, situé dans les Ardennes. Nordahl Lelandais, cousin de Charlotte, a lui aussi fait le déplacement. L'adolescente a alors 14 ans, lui, 34 ans. "On s’est éloigné sur le côté de la maison pour fumer, je pleurais forcément c’était l’enterrement de mon père, avait confié la jeune fille à BFMTV en 2019.

"Il me prend dans ses bras, sauf qu’il descend ses mains. Je sens ses mains descendre dans mon dos, ses mains se mettent sur mes fesses, avec insistance", avait ajouté Charlotte.

L'adolescente le repousse, mais son cousin lui "touche la poitrine". Elle le repousse une nouvelle fois. Charlotte tente de s'extirper, mais au moment où elle veut rentrer dans la maison, Nordahl Lelandais la menace: "Il me dit: 'Tu dis quelque chose, je te tue'". "Son visage, il a changé, c'était pas le même visage, c'était pas le visage du cousin que j'avais connu. C'était un visage qui fait peur, vraiment peur, avec un regard noir", avait-elle expliqué au micro de BFMTV à l'époque.

Et l'histoire ne s'arrête pas là. Pendant plusieurs mois, Nordahl Lelandais va continuer à envoyer des messages à sa petite-cousine: "C'est quand qu'on se marie ?" ou encore "T'es ma petite bombe". Par "peur" des représailles, la jeune fille lui décide de lui répondre.

"J'avais peur qu'il revienne. J'avais peur qu'il revienne pour me tuer tout simplement si je ne répondais pas", avait raconté Charlotte.

À l'époque, Charlotte ne se doute pas du profil criminel de son cousin. Pourtant, un mois plus tard, dans la nuit du 11 au 12 avril 2017, Nordahl Lelandais assassine le caporal Arthur Noyer près de Chambéry. Quatre mois plus tard, c'est au tour de Maëlys de croiser tragiquement la route du maître-chien, dans la nuit du 26 au 27 août 2017. Il faudra plusieurs mois avant que Nordahl Lelandais soit identifié dans ces deux affaires.

"Je ne pouvais plus le garder pour moi"

Pendant de longs mois, Charlotte garde tout pour elle. Mais à l'été 2018, Nordahl Lelandais est mis en examen pour des agressions sexuelles sur deux autres petites-cousines, âgées de 4 et 6 ans, survenues un an avant. Un choc pour l'adolescente, qui décide de tout révéler à sa mère. "J’ai appris pour ma petite-cousine, je me suis dit qu’il était temps d’en parler, qu’il ne fallait plus que je le garde pour moi. Qu’il fallait que j’en parle parce que je ne pouvais plus le garder pour moi, c’était trop dur. À la fois, j’avais peur d’en parler", avait-elle raconté. En avril 2019, soutenue par ses proches, Charlottes décide de porter plainte contre son cousin pour "agression sexuelle" et "menaces de mort".

Pourtant, prendre la parole a été "très dur" pour Charlotte, avait expliqué Nathalie*, sa mère, à BFMTV: "Une fois qu’elle en a parlé, elle s’est écroulée, ça n’a pas été". "Tant qu’elle a gardé ça pour elle, elle a été forte, elle a géré étonnamment l’enterrement de son papa, cette chose qu’elle gardait en elle", avait raconté Nathalie.

"Une fois que l’affaire de sa petite-cousine est sortie, là par contre, il fallait qu’elle parle, il fallait qu’elle raconte parce que ce n’était pas rien. Elle a compris que ce n’était pas rien ce qu’il s’était passé, que ce n’était pas normal", avait ajouté la mère de Charlotte.

Des révélations d'autant plus horrifiantes pour la mère de Charlotte, qui s'est souvenue d'une soirée d'anniversaire en famille. Ce jour-là, Nordahl Lelandais lui avait proposé d'emmener Charlotte, âgée de 11 ans à l'époque, faire une balade avec ses chiens.

"Ce souvenir m’effraie parce que je me dis ‘mon dieu, si tu avais accepté qu’elle aille faire un tour avec lui, qu’est-ce qui se serait passé’. Forcément on ne voit plus les choses de la même manière, connaissant les autres histoires, ça fait peur", avait-elle expliqué.

Jusqu'aux révélations de sa famille, Nathalie avait pourtant "tout fait" pour "cacher" le lien de sa famille à Nordahl Lelandais. "Je ne voulais surtout pas que mes enfants et moi-même soient reliés à cet individu", avait-elle poursuivi. Aujourd'hui, Nathalie lui en veut d'avoir "profité d’un moment pareil", "le jour, le moment le plus horrible de la vie" de sa fille. "Il a été jusqu’à gâcher l’enterrement de son père", avait-elle déploré.

"Je regrette de ne pas avoir dit avant"

Lors de son procès pour le meurtre de Maëlys de Araujo et pour les agressions sexuelles de deux petites-cousines, en février 2022, Nordahl Lelandais avait fini par reconnaître des penchants "pédophiles".

Après le visionnage des vidéos de ces agressions au procès, le maître-chien avait été interrogé par l'un des avocats des deux associations de protection de l'enfance, parties civiles dans ce procès, Me Yves Crespin. "Qu'est-ce que c'est? Quel est le terme générique pour cela?", lui avait demandé l'avocat. "De la pédophilie", avait répondu Nordahl Lelandais. "Vous admettez que vous avez eu des penchants pédophiles?", avait enchaîné le conseil. "Oui", avait simplement dit l'accusé.

Si elle a osé parler, Charlotte reste "rongée par la culpabilité" de ne pas l'avoir fait plus tôt, estimant que ça aurait "peut-être sauvé des personnes". "Je regrette de ne pas avoir dit avant, parce que peut-être que la petite Maëlys justement elle n’aurait pas été morte à cette heure-là. Je regrette aussi parce que mes petites-cousines peut-être que ça ne serait pas passé également. Je regrette de ne pas en avoir parlé avant", avait-elle déclaré en 2019.

Mais la jeune fille, âgée d'une vingtaine d'années, espère que son témoignage pourra encourager d'autres victimes potentielles de Nordahl Lelandais.

"Peut-être que ça va encourager les personnes, s’il a fait quelque chose à quelqu'un qui est encore vivant, je pense que ça va les encourager à le dire également, ça va peut-être les aider à avoir la force d’y aller et de le dire", avait-elle conclu à l'époque.

Tout au long de l'instruction, Nordahl Lelandais a nié les faits. Poursuivi en état de récidive légale, il encourt une peine de 20 ans d'emprisonnement.

* Les prénoms ont été modifiés

Article original publié sur BFMTV.com